Les missions locales franciliennes subissent une nouvelle évolution de leur financement
La région Île-de-France a de nouveau modifié les règles de financement relatives à l’insertion des jeunes dans son budget 2024. Les missions locales perdent leur financement pérenne. Elles devront candidater à un appel à projets et seront rémunérées au résultat.
Nouveau changement pour les missions locales franciliennes. Alors que leur mode de financement avait déjà évolué l’an dernier, la région Île-de-France en durcit davantage les conditions puisqu’elles devront désormais candidater à un appel à projets. Cette procédure met fin à la contractualisation spécifique par laquelle la région finançait jusqu’ici les missions locales.
Publié le 17 janvier, le détail de cet appel à projets, appelé "Une chance pour tous", concerne toute structure publique ou privée "dont la capacité à atteindre les publics cibles et les accompagner dans une démarche d’insertion professionnelle est avérée", à l’exception de France Travail et des Cap emploi.
Dans un post sur LinkedIn, le directeur de la mission locale de Paris, Nicolas Garnier, a critiqué "le choix d’une mise en concurrence entre les missions locales et le secteur privé". "La notion de service public n’a visiblement plus cours en Île-de-France. Comment imaginer s’asseoir autour d’une même table dans le cadre du réseau pour l’emploi demain ?", a-t-il dénoncé.
Nouvelles coupes budgétaires
Les missions locales franciliennes avaient déjà critiqué en 2023 la mise en place d’un financement au résultat, avec une enveloppe à 90% liée au nombre de jeunes orientés vers les dispositifs régionaux. Selon l’association régionale des missions locales d’Île-de-France, les ressources versées par la région au titre de l’année 2023 devraient diminuer de 50 à 60%. En 2022, elles s’élevaient à 17 millions d’euros.
Cette année, la région poursuit les coupes en supprimant également le financement socle, soit 10% de l’enveloppe. Comme l’année dernière, elle versera 100 euros en cas d’accompagnement vers l’obtention du permis de conduire, 400 euros pour l’entrée en formation régionale ou en école de la deuxième chance et 600 euros en cas de formation vers un métier en tension. Petite évolution, ces barèmes sont néanmoins doublés pour les profils "rencontrant des problématiques particulières".
Par ailleurs, "seules les actions à partir du 1er février seront prises en compte, ce qui nous prive d’1/12e de nos financements", relève Jérôme Boillat, délégué général de l’association régionale des missions locales d’Île-de-France. Bien que les financements régionaux ne constituent pas la ressource principale des missions locales, celles-ci "ont déjà commencé à ajuster leurs équipes à la fin de l’année", précise-t-il.
La fin d’un consensus politique
L’année 2024 ne signe donc toujours pas l’apaisement des tensions entre les missions locales franciliennes et la région. "On ne comprend pas les intentions de la région. Nous avions rencontré Othman Nasrou [deuxième vice-président à la jeunesse] en septembre dernier, pour finalement aboutir à un durcissement des mesures. C’est assez déstabilisant", poursuit Jérôme Boillat. La question des missions locales fait désormais l’objet de débats houleux avec le groupe socialiste et républicain (SER) qui s’alarme de la "fin du financement pérenne" des missions locales. "On a repolitisé un sujet qui était jusqu’ici consensuel", constate Jérôme Boillat.
Le délégué général de l’ARML conteste le bien-fondé d’un financement en fonction du nombre d’entrées dans les dispositifs régionaux de formation. À rebours de la région qui met en avant une baisse des orientations de jeunes inscrits en mission locales vers les formations régionales, il souligne que ces flux sont globalement stables d’une année sur l’autre (14.000 en 2022), correspondant à la hauteur des besoins exprimés. Par ailleurs, plus de jeunes suivis en mission locales ont aussi été orientés vers l’alternance.
En 2023, malgré le système mis en place par la région, le nombre d’orientations vers les formations régionales ne devrait pas augmenter. "Dans certains territoires de grande couronne, il manque des centres de formation conventionnés avec la région, ce qui oblige à envoyer les jeunes assez loin de leur zone de couverture", ajoute Jérôme Boillat.