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Emploi - Les maisons de l'emploi peinent à prendre leur envol

Deux ans après leur lancement, les maisons de l'emploi rencontrent encore beaucoup de difficultés. Seulement la moitié d'entre elles ont passé une convention d'objectifs et disposent de moyens financiers. Tour d'horizon des freins et atouts de ces nouvelles structures.

Bientôt deux ans après leur lancement, les maisons de l'emploi ont fait leur chemin. Mises en place dans le cadre du plan de cohésion sociale de 2005, elles ont pour but de faciliter les démarches des demandeurs d'emploi, des salariés et des entreprises, en regroupant sous un même toit l'ensemble des intervenants : les collectivités locales, l'ANPE, l'Unedic et leurs partenaires. Aujourd'hui, 227 maisons de l'emploi ont été labellisées. L'objectif du gouvernement d'atteindre les 300 structures d'ici la fin de l'année 2007 est donc en passe d'être atteint. "Jusque-là, le projet séduit tout le monde, assure Jean Bastide, le président du comité de suivi du plan de cohésion sociale du ministère de l'Emploi. Il n'y a pas de grande disparité sur la carte de la France, on est dans les clous !" Les régions qui étaient pour le moment peu ou pas couvertes (Alsace, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes) ont proposé des candidatures permettant une couverture plus homogène. Quasiment toutes les régions disposent ainsi d'au moins une maison de l'emploi. Mais sur le terrain, il existe encore un écart important entre la labellisation officielle et le fonctionnement réel de ces maisons de l'emploi. Sur les 227 maisons labellisées, seulement 115 ont signé une convention d'objectifs, préalable nécessaire au financement de l'Etat.

 

Lourdeurs administratives et manque d'animation

Si cet écart se réduit au fil des mois, il pose un problème : la labellisation n'assure pas nécessairement la mise en oeuvre. Chaque projet est présenté à travers un dossier d'intention, avant même que les partenariats soient conclus et les engagements financiers des différents partenaires bouclés. Pour Jean Bastide, le problème réside dans la complexité des dossiers qui "exigent de la part des collectivités et des autres partenaires un travail considérable sur l'organisation et le financement". A Saint-Denis, par exemple, la maison de l'emploi du territoire de Plaine Commune, labellisée le 15 novembre 2005, n'existe pas encore réellement sur le terrain. Elle a signé sa convention avec l'Etat fin janvier 2007. Mais le dossier n'est pas simple : il s'agit de mettre en oeuvre un plan d'action unique pour une communauté d'agglomération qui rassemble 320.000 habitants et huit villes. "Pour éviter les doublons, nous avons décidé de créer huit antennes, dont six sur des sites existants, explique Richard Gendron, le directeur de la maison de l'emploi. Nous travaillons à présent sur un concept unique de maison de l'emploi que le public retrouvera dans chacune des huit antennes." D'autres sont "virtuelles", c'est-à-dire qu'elles ont choisi de ne pas créer de structure ex nihilo mais simplement de coordonner celles en place. C'est le cas de la maison de l'emploi de Rennes, labellisée en 2005, qui est chargée d'animer le réseau des différents partenaires. Mais beaucoup de projets se heurtent aux lourdeurs administratives et au manque d'animation de la part de l'Etat. De fait, l'implication des acteurs est très variable. Souvent, l'ANPE se cantonne à de simples permanences ou à des bornes internet ; quant à l'Assedic, elle n'est pas toujours présente. A cela s'ajoutent des difficultés d'ordre géographique : les zones d'intervention des uns et des autres n'est pas toujours le même et ne correspondent pas aux bassins d'emploi. "Il faut qu'un des acteurs prenne les choses en main", insiste Mireille Jassin-Le Guen, chef du service emploi et insertion de la communauté d'agglomération de La Rochelle. "Dans notre cas, c'est la communauté d'agglomération qui a pris les devants et a avancé les fonds en attendant le conventionnement", précise-t-elle.

 

Une approche plus globale sur le bassin d'emploi

Malgré ces freins, les acteurs impliqués dans ces projets soulignent les atouts de cette nouvelle politique et notamment le rôle accru des collectivités locales. Le travail collaboratif entre les différents partenaires, lorsqu'il fonctionne, est également apprécié. "Il y a bien sûr les frileux qui ont peur de voir le monopole de l'ANPE disparaître, explique Maire-Pierre Establie, mais en général, les agents des différentes institutions jouent le jeu." C'est le cas dans la région rennaise. En tant qu'ancien directeur d'agence de l'ANPE, Philippe Lecoq, maintenant directeur de la maison de l'emploi de Rennes, négocie chaque jour avec l'ensemble des partenaires pour lancer des actions communes. Malgré les heures passées à discuter avec les uns et les autres, il est convaincu de l'efficacité du système : "Auparavant, on n'arrivait à peine à faire travailler trois partenaires ensemble. Aujourd'hui, avec les maisons de l'emploi, on répartit les rôles et on passe à l'action." L'intérêt est aussi de pouvoir étendre le champ d'action du service public de l'emploi vers une approche plus globale : les maisons ne s'adressent pas seulement aux demandeurs d'emploi mais intègrent aussi les RMIstes, les salariés, les porteurs de projets de création d'entreprise. "On ne se limite plus à trouver une solution à un problème ponctuel, chacun essaie de penser l'avenir du bassin d'emploi concerné", explique Jean Bastide. De nouvelles labellisations sont prévues d'ici la fin de l'année. Chaque maison de l'emploi devra mener une évaluation. A l'aune de ces résultats, il sera alors possible de jauger l'efficacité réelle du dispositif.

 

Emilie Zapalski

 

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