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Sécurité - Les maires veulent être davantage associés aux ZSP

Les auditions de la mission parlementaire sur la lutte contre l'insécurité sur les territoires se poursuivent depuis deux mois entre diagnostic de la situation et propositions de réformes avec, en filigrane, la place des maires et de la police municipale...

La mission parlementaire sur la lutte contre l'insécurité dans les territoires poursuit ses auditions, dans la perspective de son rapport attendu pour le mois de juin 2014. Après les tonitruantes déclarations du général Bertrand Soubelet, directeur des opérations et de l'emploi de la Gendarmerie, qui, le mois dernier, avait déclaré que 63% des auteurs interpellés de cambriolages commis en novembre 2013 dans les Bouches-du-Rhône étaient "dans la nature", c'était au tour de Mireille Ballestrazzi, directrice de la Police judiciaire (PJ), d'être auditionnée le 22 janvier. Cette dernière a posé un diagnostic des trois phénomènes majeurs auxquels ses services sont confrontés : les réseaux criminels actifs dans les cités, le milieu traditionnel en Corse et dans le Sud-Est, et les organisations criminelles étrangères en particulier les clans caucasiens (géorgiens, arméniens) ou les mafias des Balkans (albanaise, roumaine, bulgare). Ces groupes ont su profiter de "l'ouverture des frontières Schengen et la mondialisation des échanges" et se sont spécialisés dans les cambriolages, les vols, la contrefaçon, la traite des êtres humains, le proxénétisme, le trafic de stupéfiants.

Une seule cellule pour les ZSP

Alors que les cambriolages sont le point noir du bilan de la délinquance pour 2013 présenté la semaine dernière par le ministre de l'Intérieur, Mireille Ballestrazzi a indiqué qu'il s'agissait d'une priorité de la Police judiciaire, avant même "le cadrage ministériel" qui s'est traduit dans le plan national de lutte contre les cambriolages lancé en septembre 2013. Selon le bilan de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, les cambriolages ont enregistré une hausse de 6,4% en zone police et de 4,7% en zone gendarmerie. Mais sur les trois premiers mois de mise en oeuvre du plan, un début d'amélioration s'est fait sentir en zones rurales (voir ci-contre notre article du 23 janvier 2014). La responsable de la PJ a déclaré vouloir intensifier l'action de ses services dans les zones de sécurité prioritaire (ZSP), où la population est "parfois terrorisée avec un grand sentiment d'insécurité, avec des phénomènes de caïdat, avec des réseaux organisés, beaucoup de trafic de stupéfiants, de règlements de compte, de vols à main armée, de trafic de véhicules…"
La question des ZSP a été l'objet de nombreux débats durant ces premières auditions, notamment celle des associations d'élus (AMF, APVF), le 17 décembre, qui ont regretté que les maires n'y soient pas assez associées. L'adjoint à la sécurité de la mairie de Toulouse, Jean-Pierre Havrin, a même suggéré qu'il n'y ait plus qu'une cellule (aujourd'hui, les ZSP ont deux cellules, l'une de coordination des forces de sécurité, l'autre de prévention), afin de permettre aux maires d'y participer systématiquement. L'ancien patron de la police de Toulouse, débarqué en 2004 avant de rejoindre l'équipe Pierre Cohen, a loué la "coproduction" des forces de sécurité, mais a demandé que le maire ait une place "plus assurée dans le dispositif [des ZSP] vis-à-vis de l'Etat", place qu'il juge aujourd'hui "faible et insuffisante".

Augmenter les crédits du FIPD

Les élus ont également regretté que les crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) soient désormais orientés vers ces ZSP, au détriment des autres territoires. "Il faut que nous demandions ensemble une augmentation du FIPD" dans le cadre du futur budget, a lancé Jean-Pierre Blazy, président et rapporteur de la mission, aux représentants des associations. Alors que le FIPD a perdu 2 millions d'euros, à 52 millions d'euros dans le budget 2014, le député estime à 100 millions d'euros les crédits du fonds nécessaires pour répondre aux besoins de "la prévention de la délinquance sur tout le territoire".
Les élus ont par ailleurs été unanimes à demander une clarification des compétences des forces de sécurité entre police, gendarmerie et police municipale. Alors que les sénateurs examineront cette année la proposition de loi de René Vandierendonck et François Pillet visant à créer des "polices territoriales", Jean-Pierre Havrin a fixé trois conditions : que la police municipale ne fasse "pas de maintien de l'ordre", qu'on ne lui donne "pas de compétence judiciaire", et que la sécurité privée n'intervienne "pas sur la voie publique".
Il a été rejoint par Philippe Guérin, maire PRG de Cugnaux, vice-président du Grand Toulouse, pour qui confier une compétence judiciaire à la police municipale reviendrait à "entacher cette compétence de soupçons", en raison de la proximité avec le maire. "Nous ne sommes plus là dans des actions de prévention, de dissuasion, éventuellement de répression (…) Nous devons collaborer avec les services de l'Etat dans un cadre très précis".
Pour Grégoire Le Blond, maire centriste de Chantepie (Ille-et-Vilaine), la prévention pâtit aujourd'hui d'un "morcellement" entre "l'Intérieur, la Justice, les conseils généraux qui souvent sous-traitent à des associations, et le rôle du maire qui au final a une compétence fondamentale mais qui est très mal définie" et qui "dépend beaucoup de la volonté politique locale".
Les élus ont aussi débattu des "polices intercommunales" promues par le ministre de l'Intérieur. Jean-Pierre Havrin, qui a annoncé qu'il ne se représenterait pas aux municipales aux côtés de Pierre Cohen, ne cache pas son intérêt pour une future police métropolitaine dans le cadre du Grand Toulouse. Si depuis la loi sur la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001, les élus peuvent constituer une police intercommunale, celle-ci reste sous l'autorité du maire du territoire sur lequel elle intervient. Jean-Pierre Havrin souhaiterait aller plus loin, tout en se montrant prudent. "Tout en gardant au maire le commandement de la police municipale, (...) au niveau de la métropole, de la communauté urbaine (...), on pourrait envisager un effectif précis sur des missions précises", a-t-il effleuré. 

 

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