Financement des manuels et ressources numériques - Les éditeurs d'éducation se déclarent ouverts à la concertation
Qui financera les nouveaux manuels scolaires papiers et les nouvelles ressources numériques consécutifs à la réforme du bac 2021 ? L’association représentant les éditeurs scolaires est disposée à en parler dans le cadre d’une concertation. Elle a déjà sa petite idée, mais pas sûr qu’elle plaise aux régions, ni aux familles. Pas sûr non plus que son idée de "repenser" la loi Haby pour le collège ne remporte tous les suffrages dans les départements.
L’association Les Éditeurs d’éducation* a annoncé le 5 septembre, lors de sa conférence de presse de rentrée, souhaiter "ouvrir une concertation sur la question du financement des manuels et ressources numériques". Et cela "avec l’ensemble des acteurs de l’éducation : État, collectivités territoriales, libraires, enseignants et familles". Pas sûr toutefois que les propositions formulées par les éditeurs conviennent aux collectivités locales.
En revanche, le principe même de la concertation devrait réjouir l’association Régions de France qui avait, quelques jours plus tôt, appelé ce dialogue de ses vœux (voir notre article ci-dessous du 28 août 2018).
"Il est urgent d'articuler les réformes avec les mécanismes de financement"
Les éditeurs conviennent que, dans la perspective de la réforme du bac 2021, "les régions qui continueraient à financer les manuels et les ressources numériques devront faire face à une situation inédite". Ils estiment aussi qu’il est "urgent d’articuler les réformes avec les mécanismes de financement qui les accompagnent", en regrettant que cela n'ait pas été fait par le passé. "Au primaire, la réforme de 2016 aurait dû conduire au renouvellement complet des manuels en 2016 et 2017", rappellent-ils. "Or, les communes ne renouvellent en moyenne que 15 à 20% des manuels par an, avec de fortes disparités territoriales", si bien que "à l’issue de la réforme, seuls 40% des élèves sont équipés de manuels conformes aux programmes". Quant au collège, "dans le cadre de cette même réforme, (…) plus de 30% des manuels conformes aux nouveaux programmes manquaient encore à l’appel".
Remettre en question le principe de la gratuité
Voilà pourquoi, selon eux, une "remise à plat" des dispositifs de financement des manuels et des ressources numériques individuels "s’impose". Et dans ce cadre, ils entendent "replacer au centre du débat la question de la gratuité totale ou partielle, pour les familles, de l’accès aux manuels scolaires".
L’association a dressé son état des lieux des options de financements des manuels scolaires au lycée. Elle en voit trois, toutes trois n’envisageant que deux sources de financement : les régions ou les familles. Soit c’est un financement 100% régions et alors c’est "la gratuité totale" pour les familles mais un gros coût budgétaire pour la collectivité, soit c’est "le retour à un financement par les familles", soit c’est la gratuité partielle (il s’agirait alors de discuter la répartition des financements entre régions et familles).
Lorsque des contributions seraient demandées aux familles, les éditeurs suggèrent qu’elles soient accompagnées d’aides régionales pour les plus défavorisées et, pourquoi pas d’un "fléchage de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) vers les outils pédagogiques et les fournitures scolaires".
Pas de baisse de prix envisagée
A lire le dossier de presse, pas question à ce stade d’envisager une baisse des prix des manuels papiers et des ressources numériques. Un mauvais signal pour François Bonneau, président de Régions de France, pour qui il n’est pas question de faire peser les réformes de l’Éducation nationale sur le budget des familles. Si les régions veulent bien prendre leur part, il voit aussi des sources d’économies du côté de l’articulation entre supports papiers et supports numériques.
Mais "le numérique ne coûte pas moins cher", affirme Célia Rosentraub, présidente des Éditeurs d’éducation et présidente de Hachette Livre. Et puis, "peu de lycées disposent aujourd’hui de la bande passante nécessaire à l’usage du livre numérique" et "il faut également équiper tous les élèves en matériel informatique", ajoute-t-elle. De plus, le numérique nécessite une maintenance permanente.
Les communes et les départements aussi
Les communes et les départements auraient toute leur place dans la concertation. Les Éditeurs d’éducation estiment quant à eux qu’"à l’aune du XXIe siècle", "il est temps de repenser" la loi Haby pour le collège ainsi que le décret de 1890 pour le primaire.
Depuis le décret du 29 janvier 1890, les communes prennent en effet en charge le financement des manuels au primaire. Du côté des départements, selon la loi Haby de 1975, c'est l’État qui finance l’achat des manuels scolaires des collégiens. Mais les choses pourraient changer. Jean-Michel Blanquer n'avait-il pas déclaré il y a un an, devant la commission des finances du Sénat (voir notre article du 9 novembre 2017) : "Il n'est pas logique que le ministère de l'Éducation nationale finance les manuels scolaires des collèges alors que pour les autres niveaux, écoles et lycées, cela relève des communes et des régions."
*L’association Les Éditeurs d’éducation (anciennement "Savoir Livre"), a été fondée en 1985 par Belin, Bordas, Hachette, Hatier, Magnard et Nathan. Elle regroupe aujourd’hui plus d’une vingtaine de maisons ou marques d’édition scolaires.