Zones agricoles défavorisées - Les aides aux zones de piémont dans le viseur de la Commission
Les nouveaux critères envisagés par Bruxelles pour définir les zones agricoles défavorisées exclueraient une partie des zones de piémont. Elus et organisations agricoles se mobilisent pour corriger le tir.
La révision en cours de la cartographie des zones agricoles défavorisées (ZAD) pourrait conduire à des effets pervers. Certes la France serait globalement gagnante puisque, selon les estimations du ministère de l'Agriculture, la surface éligible passerait de 53% à 57%. Mais certaines zones fragiles, telles que les piémonts situés en bordure des montagnes, sortiraient du zonage. Ce qui inquiète les organisations agricoles et les élus qui ont encore quelques mois pour convaincre le gouvernement des aménagements à apporter. En effet, les Etats membres ont jusqu'à la fin de l'année pour peaufiner leur carte en fonction des nouveaux critères que la Commission a arrêtés en avril dernier (voir article de Localtis du 22 avril 2009).
Ces ZAD ont été créées en 1975 dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) pour maintenir une activité agricole dans les territoires fragiles, dans un souci économique mais aussi d'entretien de l'espace naturel. Il en existe trois sortes : les zones de montagne, les zones dites "intermédiaires" et les zones de handicaps naturels, comme les espaces côtiers. A chaque Etat membre le soin de définir ensuite ses propres critères. La France en a retenu quatre : zones de haute montagne, zones de montagne, zones de piémont et zones défavorisées simples. Les exploitations y perçoivent des "indemnités compensatoires d'handicaps reconnus comme naturels et permanents" (ICHN). Au-delà, l'estampillage "ZAD" permet de bénéficier d'autres subventions en matière d'investissement, d'équipement, de formation professionnelle… D'où son importance pour les petites exploitations.
Dommages collatéraux
Mais suite aux critiques de la Cour des comptes européenne sur le manque de transparence et les inégalités de traitement au sein de l'Union - les aides varient de moins de 20 euros en Espagne à 250 euros à Malte - Bruxelles a décidé une remise à plat devant entrer en vigueur en 2014. Cette réforme vise exclusivement les zones intermédiaires. La Commission souhaite ainsi instaurer huit nouveau critères communs à tous les Etats et strictement liés au sol et au climat : la faiblesse des températures, le stress thermique, le drainage des sols, leur texture et leur pierrosité, la profondeur d'enracinement, les propriétés chimiques des sols, le bilan hydrique et la pente. C'est justement sur ce dernier critère que le bât blesse : Bruxelles retient une pente de 15%. "La zone de montagne sortirait intacte de la réforme. En revanche ce critère risque de créer des dommages collatéraux", explique Hervé Benoît, chargé de mission Agriculture et forêt au sein de l'Association nationale des élus de montagne (Anem). Toute une série de territoires de moyenne montagne et de piémonts sortiraient mécaniquement du zonage : en particulier le Gers, la partie occidentale du Massif central, la Haute-Saône, une partie du Doubs, des Vosges et du Jura. "Cette exclusion serait une source d'instabilité socio-économique pour ces territoires avec la disparition d'agriculteurs et l'apparition de nouvelles friches qui, à termes, pourraient même contaminer la montagne elle-même", précise Hervé Benoît. Organisations patronales et élus de moyenne montagne ont proposé au gouvernement d'abaisser ce seuil à 12%. "On serait déjà dans un relief où la machinerie agricole et les rendements ne sont pas du tout comparables avec le reste de l'agriculture", estime le spécialiste. La FNSEA propose également de prendre en compte le morcellement parcellaire ou le caractère bocager.
A l'inverse, le nouveau zonage intégrerait de nouveaux territoires : Normandie, Picardie, Bretagne et une partie de l'Ouest. "On court un risque de saupoudrage, au-delà de la montagne, les ZAD ne seraient plus un outil d'aménagement du territoire", ajoute encore Hervé Benoît.
Pour la période 2007-2013, l'Union européenne a prévu de consacrer 12,6 milliards d'euros aux ZAD, au titre du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural).
Michel Tendil