Les aides aux entreprises à nouveau sur la sellette

Dans une revue de dépenses sur les aides aux entreprises, l'Inspection générale des finances estime à 10 milliards d'euros les économies envisageables dans ce domaine : 3 milliards pris sur les aides de l'Etat et 7 sur les taux réduits de TVA.

Cibles récurrentes des rapports de la Cour des comptes, les aides aux entreprises n’échappent pas aux revues de dépense commandées par le gouvernement en novembre et publiées le 4 septembre par l'Inspection générale des finances (IGF). Alors que les comptes du pays sont dans le rouge (voir notre article du 3 septembre), le futur gouvernement Barnier pourra trouver du grain à moudre dans ces documents envoyés au Parlement lundi. Dans l'un d'eux, l'inspection évalue ainsi à environ 100 milliards d'euros le montant d'aides versé en 2022 aux entreprises : 88 milliards d'euros provenant de l'Etat et de la Sécurité sociale, 7 milliards d'euros versés par les collectivités et 9 à 10 milliards d'euros par l'Union européenne, essentiellement via la politique agricole commune. S'agissant des aides des collectivités, 40% proviennent des régions et 34% du bloc communal, précise le rapport.

Chambres consulaires

Les trois auteurs estiment à 10 milliards d'euros les économies envisageables : 3 milliards d'euros pris sur les aides de l'Etat et 7 milliards sur la TVA. Encore la mission ne s'est-elle livrée qu'à l'examen d'un périmètre restreint de 22,9 milliards d'euros d’aides, dont 4,5 d’aides budgétaires et 18,4 d’aides fiscales, qui n'inclut pas les aides des collectivités. Même si certains de leurs interlocuteurs sont directement concernés. Elle suggère tout particulièrement de tailler dans les dépenses que les chambres de commerce et d'industrie et les chambres des métiers et de l'artisanat consacrent à l'accompagnement des d'entreprises. Gain escompté : 800 millions d'euros ! Une mesure radicale qui risque de bien mal passer au sein de ces réseaux déjà mis au régime sec depuis des années. L'IGF relève par ailleurs que le coût de l'activité d'accompagnement de Bpifrance (qui inclut le plan Quartier 2030) a été multiplié par 11 en cinq ans et elle attend de sa suppression une économie de 130 millions d'euros. Elle préconise aussi de sabrer 450 millions d'euros dans le crédit d'impôt recherche (CIR) – sur une dépense de 6 milliards d'euros – en supprimant le dispositif "jeunes doctorants", en réduisant le nombre d'activités éligibles et en abaissant le taux forfaitaire des frais de fonctionnement de 43 à 40%. 200 millions d'euros sont susceptibles d'être trouvés dans la "Patent box" (un régime fiscal incitatif sur la taxation de la propriété intellectuelle), en relevant de 10 à 15% le taux d’impôt sur les sociétés appliqué. 

Transmissions d'entreprises

La mission escompte aussi une centaine de millions d'euros d'économies sur les dispositifs fiscaux en faveur de la transmission d'entreprises, en particulier le "Pacte Dutreil", mis en place en 2003. Elle relève que les organisations patronales (Medef et Meti) ont fait part "d’un vif attachement au dispositif" sans "apporter d’arguments tangibles sur ses effets positifs".

Elle propose aussi de supprimer les tarifs réduits d’accises sur les biocarburants (700 millions d'euros) et les tarifs réduits sur les carburants pour le transport collectif routier (170 millions d'euros) et les taxis (40 millions d'euros) ainsi que la prime à la conversion pour les véhicules d’entreprise (15 millions d'euros). 100 millions d'euros pourraient encore être trouvés en limitant les tarifs réduits d’accise sur l’électricité aux seules installations industrielles électro-intensives.

Taux réduits de TVA

Autres économies envisagées : 50 millions d'euros obtenus en limitant les aides aux buralistes aux seules aides à l’investissement dans les zones transfrontalières et rurales, 40 millions d'euros en supprimant la mission de service public de transport et de distribution de la presse assurée par le groupe La Poste… 

L'IGF veut aussi s'attaquer aux taux réduits de TVA. Supprimer certains taux réduits dans la restauration, l'hôtellerie, les services de télévision, l'accès aux enceintes sportives, ou les eaux en bouteille rapporterait 4 milliards d'euros. Et remonter le taux réduit de 10 à 12,5% génèrerait 3 milliards d'euros de plus.

Enfin, elle invite à approfondir certaines évaluations. Elle suggère de mettre en place une mission d'inspection pour approfondir les pistes d’économie relatives aux missions de service public du groupe La Poste. Une autre mission pourrait "examiner les conditions actuelles de répartition du fret entre les trois modes de déplacement terrestre (routier, ferroviaire, fluvial) et proposer des mesures en faveur d’un report modal du fret routier vers le fret ferroviaire ou fluvial".

Elle estime enfin que la mise en place de toute aide aux entreprises devrait être précédée d’une réflexion sur le choix de l’instrument le plus adapté, prévoir une évaluation ex post et démontrer que les outils existants sont "inefficaces" pour atteindre l’objectif visé.

 

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