Environnement - Le tri mécano-biologique des déchets fait débat
Discrètement mais sûrement, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) le répète : elle ne compte plus accorder de subventions aux nouveaux projets d'installations de tri mécano-biologique (TMB) des déchets. L'annonce intervient alors même que dans certains départements, les Deux-Sèvres ou la Vendée par exemple, des unités de TMB sont ou vont être créées, souvent avec l'appui du conseil général. En 2008, on en recensait huit en France mais une trentaine sont visées d'ici 2013. Des associations environnementales s'opposent pourtant à leur généralisation, en brandissant un argument choc : si le compost généré en bout de chaîne par ces installations permet bien de réduire les volumes de déchets organiques à traiter, il se révélerait d'une piètre qualité.
En Alsace, un élu tel que Dany Dietmann, maire de Manspach (Haut-Rhin), va plus loin en ajoutant que ce compost produit est généralement inutilisable du fait de sa saturation en métaux lourds. Selon lui, certains voisins européens fermeraient dans ce sens un par un leurs sites de TMB. Explication : ce procédé de tri par criblage permet de séparer les déchets organiques des fractions non-organiques, mais sans pour autant éliminer suffisamment de particules fines et de polluants pour obtenir un compost normé. Dès lors, même des organismes de certification comme Ecocert s'opposent à l'utilisation de ce "compost" en agriculture biologique.
Quant à l'Ademe, elle rappelle que le risque encouru par les collectivités qui investissent dans ce type de dispositif est qu'in fine, le compost produit soit de si mauvaise qualité qu'il nécessite d'être stocké ou incinéré. L'Ademe s'appuie à ce sujet sur une étude que vient de publier le bureau d'études économiques Bipe. Celle-ci porte sur 65 sites de TMB existant en Allemagne, en Angleterre, en Belgique, en Catalogne et en France. Dans le cas français, le document note que "l'encadrement réglementaire des unités existantes reste à compléter et l'exigence de qualité du compost produit à renforcer". La complexité de traitement en jeu dans ces centres y est nettement soulignée. En supprimant les aides jusque-là accordées aux collectivités qui souhaitaient s'en doter, l'Ademe prend ainsi parti et vise, selon Marc Chevery, chef du département déchets de l'agence, à "ne plus susciter un engouement excessif pour cette filière".
Morgan Boëdec / Victoires-Editions