Délégations de service public - Le transfert du droit à déduction de la TVA : une procédure en voie d'extinction
Le transfert du droit à déduction de la TVA a été utilisé par les collectivités et leurs groupements qui ont réalisé sous leur maîtrise d'ouvrage ou acquis en propre un investissement (un équipement sportif, un réseau de distribution d'eau, des matériels roulants…) et ont confié son exploitation à un délégataire. Il leur a permis de récupérer la TVA qu'ils avaient dû payer du fait de la réalisation ou de l'acquisition de l'équipement. "Sur la base de l'article 210 de l'annexe II au code général des impôts, la collectivité établissait à l'attention de son délégataire une attestation mentionnant le montant de la taxe qui a grevé l'investissement, explique Jean-Claude Chocque, avocat spécialiste en droit fiscal au cabinet Adamas. Ensuite, le délégataire procédait à la déduction de la taxe à partir des recettes tirées de l'exploitation du service et rétrocédait à la collectivité la somme en question, selon des clauses définies par voie contractuelle entre les deux parties."
Le dispositif était bien rodé. "La relation entre le délégataire et le délégant était fluide, ce que prouve d'ailleurs la rareté des contentieux sur le sujet", constate-t-on à la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR). Mais, cette procédure n'est pas prévue par le droit européen. Une faiblesse de taille qui, le 25 septembre 2014, a conduit la Commission européenne à exiger de la France qu'elle se mette en conformité.
Evolution en douceur
En réponse, Bercy a préparé un projet de décret que le Comité des finances locales a examiné le 30 septembre dernier. Lorsque l'autorité délégante confiera à un délégataire la charge d'exploiter un investissement qu'elle a réalisé sous sa maîtrise d'ouvrage, la redevance versée par le délégataire sera nécessairement assujettie à la TVA. Dès lors, la collectivité exercera une activité économique qui justifiera la récupération de la taxe grevant les dépenses qu’elle aura engagées.
L'article 210 de l'annexe II au code général des impôts sera supprimé. Toutefois, seuls les contrats nouvellement signés ou renouvelés à compter du 1er janvier 2016 seront obligés de se conformer aux nouvelles règles. Ainsi, l'équilibre économique des délégations de service public en cours d'exécution sera préservé. La notice accompagnant le projet de décret en conclut que l'impact du changement de réglementation "sera marginal". Et la FNCCR salue d'ailleurs cette évolution en douceur.
Si le décret n'est pas révolutionnaire, c'est aussi parce que l'administration fiscale a déjà fait un pas en direction de Bruxelles. En effet, depuis le 1er janvier 2014, la procédure de transfert du droit à déduction de la TVA n'est possible, pour les nouveaux contrats, que dans certaines situations précises. Elle demeure applicable "lorsque la redevance due par le délégataire est symbolique, ou lorsque celle-ci participe du financement de missions régaliennes assurées par la collectivité, comme la sécurité ou le contrôle de l'équipement géré par le délégataire", indique Jean-Claude Chocque. "Aujourd'hui, dans la majorité des cas, les collectivités récupèrent déjà par la voie fiscale la TVA qui a grevé les investissements qu'elles ont réalisés, c'est-à-dire qu'elles assujettissent à la TVA la redevance que leur verse le délégataire."