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Le thermalisme de montagne cherche à se diversifier grâce au "bien-être"

À l'occasion de son congrès à Pont-de-Salars, l'Anem a dévoilé les résultats d'une étude encourageant le diversification des stations thermales de montagne vers le tourisme lié au "bien-être". Cette étude, qui se veut très opérationnelle, préconise la mise en place d'une stratégie collective nationale pour les stations thermales de montagne. Mais l'hypothèse d'un déremboursement des cures jugées "non effiaces" dans le cadre du PLFSS suscite de vives craintes.

Durement touché par la crise sanitaire, le thermalisme de montagne veut s’offrir une cure de jouvence à travers la notion de "bien-être". C’est en tout cas le pari de l’Association nationale des élus de montagne (Anem) qui, à l’occasion de son 38e congrès qui se tenait à Pont-de-Salars, dans l’Aveyron, les 20 et 21 octobre, a présenté les résultats d’une étude intitulée "La montagne en transition : stations thermales, nouvelle destination bien-être". L’enjeu : diversifier l’offre touristique et s’adresser à une clientèle plus large, tout en épousant les aspirations actuelles pour un tourisme plus vert.

L’étude, réalisée par le cabinet Nomadéis, préconise ainsi la mise en place d’une "stratégie collective nationale pour les stations thermales de montagne". "En plein essor, le tourisme de bien-être apparaît comme un tourisme à la fois respectueux de l’impératif de transition écologique et parfaitement adapté aux stations thermales de montagne, qui disposent des ressources et moyens adaptés pour le développer", souligne les auteurs, qui ont tout d’abord cherché à mieux connaître les 47 stations thermales de montagne (sur les 113 stations thermales françaises). Car, si elles partagent bien une "identité commune", elles ont des profils et des possibilités de développement divers.

Six types de stations

Pour douze d’entre elles, le thermalisme constitue le moteur de l’économie locale. Ce sont souvent des stations de moyenne altitude qui ne se sentent pas à proprement parler comme des stations de montagne. Elles présentent en outre une grande vulnérabilité économique (avec un taux de chômage de 18%), une offre touristique peu structurée. Pour l’heure, la notion de bien-être n’y est pas vraiment mise en avant. Six proposent au contraire une offre touristique principalement axée sur le sport de montagne. Ce sont toutes de petites stations des Pyrénées comme Argelès-Gazost, Cauterets, Saint-Lary, Luz-Saint-Sauver... Quatre proposent une offre vraiment ciblée sur la santé : La Bourboule et Châtel-Guyon dans le Puy-de-Dôme, Capvern (Haute-Pyrénées) et Avène (Hérault). Châtel-Guyon a même été choisie par la région Auvergne-Rhône-Alpes pour être "pilote" du concept de station thermale de "pleine santé".

Sept stations proposent une offre "intégrée" combinant sports et bien-être. Ce dernier est un argument marketing fort pour ces stations qui reposent aussi sur l’économie du ski, comme Ax-les-Thermes en Ariège, le Mont Dore dans le Puy-de-Dôme ou Saint-Gervais-les-Bains dans la vallée de Chamonix. Onze proposent une offre généraliste, avec une grande diversité d’activités, sans qu’elles soient très bien coordonnées entre elles (La Léchère en Savoie, Uriage et Allevard en Isère, Royat dans le Puy-de-Dôme, Ussat en Ariège…). Ce "manque de maturité de l’offre de bien-être" ne leur permet pas de sortir de leur dépendance économique à l’activité thermale et aux casinos. Sept stations, enfin, sont classées "hors typologie", soit parce qu’elles ont perdu leur établissement thermal soit, parce que les informations les concernant sont insuffisantes.

Pour les auteurs de l’étude, quatre type de destination bien-être sont possibles : la destination "déconnexion", qui s’adresse aux clientèles désireuses de se couper des préoccupations du quotidien (exemple des parcours de marche nordique proposés par la station d’Amélie-les-Bains), la destination "détente", qui répond à l’envie de se relaxer sans rechercher une offre thérapeutique (exemple des séjours sports de montagne et détente d’Ax-les-Thermes ou de la "Maison du bien-être" à Bagnères-de-Luchon), la destination "santé", associant soins de qualité et patrimoine naturel (comme les mini-cures de la stations du Mont-Dore axés sur le patrimoine naturel) et, enfin, la destination "ressourcement" attirant des clients désireux de "recharger les batteries" (exemple de la "fête de la nature" de Vals-les-Bains).

La moitié des stations soutenues par le plan Avenir montagnes

Mais cette transition vers une destination de bien-être nécessite une mobilisation collective, soulignent les auteurs. Cette "stratégie collective nationale pour les stations thermales de montagne" consisterait tout d’abord à développer une identité commune "station thermale de montagne" qui pourrait s’incarner dans "une charte du parcours client". Il s’agira ensuite d’approfondir les connaissances sur ces différents types de stations, de creuser le diagnostic pour construire une offre cohérente : études complémentaires visant à mieux connaître la clientèle actuelle ou future, identifier les ressources dont dispose la station... Il faudra aussi mobiliser tous les leviers financiers disponibles aux niveau régional, national ou européen…

"Plusieurs programmes nationaux en lien avec le développement et l’attractivité des territoires soutiennent aujourd’hui les stations thermales de montagne et pourraient servir de levier pour la mise en place des stratégies locales de transition", souligne l’étude, citant le plan Avenir montagnes lancé en mai 2021 ou les programmes de revitalisation Action cœur de ville et surtout Petite villes de demain qui comprend 15 stations thermales. "Plus de la moitié des stations dont on parle sont dans un environnement qui bénéficie déjà d’un dynamique", a indiqué Simone Saillant, directrice Ruralités et Montagne à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), évoquant en particulier le volet ingénierie du plan Avenir montagnes qui bénéficie à 62 territoires, dont 28 des 47 stations thermales de montagne. Le volet investissement de ce même plan (doté de 300 millions d’euros à parité entre l’Etat et les régions), comporte également une enveloppe fléchée sur ces stations, qui a par exemple "largement accompagné le programme" de rénovation des thermes de La Bourboule.

"On voit bien les différences entre les territoires qui ont organisé les synergies entre les offres (…) C’est une condition absolument indispensable pour que les investissements qui se mettent en œuvre, publics ou privés, trouvent leur raison d’être mais aussi leur efficacité", a commenté Michel-François Delannoy, directeur du département Appui aux territoires de la Banque des Territoires (partenaire du plan Avenir montagnes), soulignant l’importance d’une "stratégie territoriale" portée par les élus et des aides à l’ingénierie. L’étude préconise enfin un dialogue et un partage de bonnes pratiques entre les stations, notamment à l’échelle des massifs. "Très concrètement, cette étude va nous permettre d’accompagner les territoires lauréats sur la diversification du thermalisme (…) Elle ne restera pas sur une étagère", a assuré Simone Saillant.

Le remboursement des cures remis en question

L’étude pointe aussi trois risques prédominants pour l’avenir : le niveau d’enneigement, l’augmentation de l’intensité des phénomènes climatiques et la dépendance de la ressource en eau. Mais le premier risque se joue en ce moment au Parlement : un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 voté la semaine dernière en commission des affaires sociales – sur proposition du médecin urgentiste Thomas Mesnier (Horizons, Charente) – a douché les élus. Il conditionnerait le remboursement des cures thermales à l'évaluation de leur "service médical rendu" par la Haute Autorité de santé (HAS). C'est-à-dire à leur efficacité "prouvée scientifiquement".

Un amendement d’une "brutalité assez rare", a réagi Jean-Yves Gouttebel, coordinateur interministériel chargé de la relance du thermalisme et du suivi du plan Avenir montagnes. Reste à connaître son sort lors de l'examen en séance du volet "dépenses" du PLFSS (qui pourrait être écourté par un nouveau recours au 49.3 déjà utilisé pour le volet recettes). "La diversification de l’offre touristique dans les stations thermales, pour en faire des destinations de bien-être, ne doit pas remettre en cause le fondement même de ce qu’elles sont, c’est-à-dire des cures thermales financées par la sécurité sociale et qui ont un but thérapeutique vis-à-vis des curistes", a affirmé Jeanine Dubié, ex-présidente de l’Anem, qui vient de céder sa place à la députée des Hautes-Alpes Pascale Boyer (Renaissance).

 

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