Droit opposable au logement - Le texte est adopté...

En un temps record, moins d'un mois, le Sénat puis l'Assemblée nationale ont adopté le projet de loi portant sur le droit opposable au logement. Il en ressort un texte enrichi dont la première lecture inciterait à penser que le droit opposable à l'hébergement a des chances de devenir une réalité !

Entre les premiers bruits de couloirs portant sur le rapport du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées et l'adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi sur le droit opposable au logement, quatre mois se sont écoulés. Le mouvement animé par l'association Les Enfants de Don Quichotte et relayé en province a accéléré le processus législatif. Le Haut Comité  privilégiait l'expérimentation au niveau des collectivités locales, le gouvernement, dans la première mouture du projet de loi, instaurait quant à lui un droit opposable lié étroitement au contingent préfectoral. En cas de transfert de ce contingent, les collectivités prenaient la relève. Le Sénat, dès la première lecture, a supprimé toute connexion entre le droit opposable au logement ou le droit au logement opposable - les deux terminologies étant régulièrement  utilisées - et le contingent préfectoral. L'Etat est, après le passage au palais du Luxembourg, le seul garant de ce nouveau droit. 

Un prélèvement sur les ressources des collectivités et EPCI

Reste un dispositif à deux niveaux : la médiation avec la commission du même nom, chargée de décider quels sont les demandeurs prioritaires, et le passage devant le juge administratif qui a pour effet, si l'Etat n'a pas rempli ses obligations, de payer une astreinte versée au Fonds d'aménagement urbain. Après le passage en commissions, le Sénat a adopté le 1er février un projet largement amendé, disséquant chacun des articles pour rendre le droit opposable "réalisable".
Une des ses principales interventions a consisté à dissocier droit opposable au logement et droit opposable à l'hébergement : afficher le droit à l'hébergement, renforcer le plan national d'urgence, prévoir des pénalités en cas d'insuffisance du nombre de places créées, donner à la commission une mission propre dans ce domaine et rappeler que les demandeurs de logement de transition, de structures d'accueil, ont eux aussi accès à la procédure devant les juges... Le Sénat a d'ailleurs été suivi dans cette voie par l'Assemblée nationale qui a apporté des modifications complémentaires.  Les députés ont précisé que les associations doivent pouvoir accompagner le demandeur devant la commission de médiation comme devant le juge et que le préfet doit informer le demandeur des mesures d'accompagnement auxquelles il a droit.

Une réponse partielle au besoin de logements

C'est sans doute du côté du droit opposable au logement que les observateurs, et au premier chef, les associations d'élus auraient aimer plus d'assurances.
En tête de file dans le rapport du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, les collectivités locales et  plus précisément les EPCI délégataires des aides à la pierre gardent un rôle à jouer. Un amendement leur ouvre cette expérimentation sur une durée de six ans, en renforçant leurs pouvoirs notamment en matière sociale. De toute façon, avec ou sans cette loi, les communes ou les intercommunalités sont les premières à être sollicitées et concernées par le manque de logement. Les associations d'élus ont toutes tenu à déclarer devant la presse, courant janvier, que l'application du droit opposable au logement ne peut devenir réalité que si l'ensemble de la chaîne du logement et de l'insertion est mobilisée. Le Sénat a entendu la requête et a augmenté les objectifs du plan de cohésion en rallongeant l'enveloppe de la rénovation urbaine. Cependant, les élus, et notamment l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) auraient voulu que l'examen de ce projet de loi soit l'occasion de s'attaquer aux déséquilibres entre territoires afin que le droit opposable au logement ne soit pas une contrainte supérieure pour des collectivités qui ont déjà dépassé leurs engagements.

Un premier geste au Sénat les laissait espérer avec l'adoption de l'amendement 78  du sénateur Pierre Jarlier ouvrant à de nouvelles communes, l'article 55 de la loi SRU.  On attendait donc, et des premières rumeurs le laissaient présager, un nouveau débat musclé au Palais-Bourbon sur cet article 55 comme cela fut le cas, au printemps dernier, lors de l'adoption de la loi portant engagement national pour le logement ...mais le coeur n'y était plus. Fin de la législature, montée en puissance d'autres débats politiques, volonté d'aboutir sur ce texte...quoi qu'il en soit, les députés ont favorisé le compromis. Un signe positif pour que ce nouveau droit opposable devienne réalisable ?

Clémence Villedieu

 

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