Le Sénat avance ses propositions contre la "violence endémique" des établissements scolaires
Un rapport du Sénat dénonce le climat de violence qui règne dans les écoles, collèges et lycées, et en particulier les atteintes à la laïcité, y compris dans les zones rurales. Il prône, entre autres, le recours aux polices municipales ou à la vidéo pour protéger les établissements.
Comme l'actualité nous le rappelle ces jours-ci à Cachan, où des lycéens se sont livrés à des échauffourées, il existe une "violence endémique dans les établissements scolaires", estime la mission de contrôle du Sénat créée afin de faire la lumière sur les pressions, menaces ou agressions dont les enseignants, mais aussi les agents des collectivités territoriales, peuvent être l'objet à l'école. "Les insultes, menaces, pressions et agressions constituent désormais le quotidien des enseignants ainsi que de l'ensemble du personnel administratif", écrivent Laurent Lafon, sénateur du Val-de-Marne, et François-Noël Buffet, sénateur du Rhône, dans l'essentiel de leur rapport, mis en ligne le 6 mars 2024. Ils ajoutent que "tous les territoires, aussi bien ruraux qu'urbains, favorisés ou populaires, sont concernés".
À l'appui de ces affirmations, les sénateurs rappellent qu'au cours des années scolaires 2021-2022 et 2022-2023, si 53% des enseignants en REP (réseaux d'éducation prioritaire) ont observé au moins une contestation d'enseignements, ils étaient 38% dans les banlieues dites "populaires" et 32% dans les villes-centres, mais également 25% dans les banlieues dites "aisées" et 23% dans les communes rurales.
Laïcité mal comprise
"Loin d'être perçue comme un outil d'émancipation, pointent encore les rapporteurs, la laïcité est comprise par un nombre croissant et désormais majoritaire d'élèves comme une interdiction et un principe conçu contre les religions." Plus inquiétants encore, ils notent "une rupture générationnelle" : "Un certain nombre de jeunes enseignants s'interrogent sur son utilité et l'opportunité de conditions spécifiques d'application dans le cadre scolaire."
Les enseignants sont pourtant en première ligne face aux atteintes à la laïcité, comme les assassinats de Samuel Paty, en 2020, et de Dominique Bernard, en 2023, l'ont tragiquement démontré. Et s'il existe des outils sur les plans administratif, policier et judiciaire pour prévenir les agressions auxquelles sont de plus en plus exposés les agents du personnel éducatif, "la protection effective du personnel nécessite d'aller plus loin".
Préparer les agents aux situations de conflit
Les rapporteurs avancent ainsi trente-huit propositions. Afin d'améliorer la formation du personnel éducatif et de mieux lui permettre de faire face aux contestations d'enseignement et à la gestion des conflits, une recommandation invite par exemple à "mieux préparer les agents de l'Éducation nationale et des collectivités territoriales (y compris le personnel d'accueil) aux situations de tension et de conflit en favorisant la mise en place d'une culture partagée de la sécurité".
Au chapitre de la sécurité des établissements scolaires et de leurs abords, on relève plusieurs mesures intéressant les collectivités : la généralisation de la coopération entre les communes et les collèges et lycées pour permettre le déploiement de la police municipale aux abords des établissements, la mise en place de caméras de vidéoprotection filmant l'extérieur de l'établissement scolaire, y compris sans l'accord du conseil d'administration, et aussi la volonté de garantir l'effectivité de la réalisation du diagnostic de sécurité des établissements scolaires, en lien avec le référent "sécurité" et les collectivités territoriales. D'autres préconisations visent à améliorer le recours à la protection fonctionnelle du personnel ou, enfin, à fluidifier le parcours judiciaire pour les agents victimes.