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Environnement - Le Réseau Action Climat-France propose de "relocaliser les responsabilités énergétiques"

En plein débat sur la transition énergétique, le Réseau Action Climat-France (RAC-F) vient de publier une étude détaillée sur la répartition des rôles entre Etat et collectivités en matière d'énergie et sur la manière dont elle pourrait évoluer pour "permettre aux collectivités et à leurs citoyens de se réapproprier les questions énergétiques et climatiques". Réalisée avec la participation du Comité de liaison des énergies renouvelables (Cler), de WWF, de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB), de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), de 4D et d'Helio International, elle commence par dresser un état des lieux qui pointe la "difficile transversalité des politiques locales climat-énergie" du fait d'"un fonctionnement encore trop souvent sectoriel" et d'"un éparpillement de compétences liées entre elles".
L'étude dénonce aussi "le manque de cohérence des politiques climat-énergie" en raison de "politiques publiques contradictoires entre les différents échelons territoriaux" - elle cite à cet égard l'exemple des transports et de l'énergie - et de "politiques sectorielles non cohérentes avec les enjeux climat-énergie". En outre, l'efficacité des politiques climat-énergie bute sur la question des moyens, souligne l'étude. Selon elle, les collectivités n'ont qu'un "faible pouvoir décisionnel" pour pouvoir adopter des règlements allant au-delà des normes nationales et la compétence "énergie" créée par la loi Pope en 2005 ne confère pas aux autorités organisatrices de la distribution des moyens de suivi et de contrôle de leurs concessionnaires et encore moins la possibilité de créer une entreprise locale de distribution (ELD). "95% des communes (celles qui ne disposent pas d'une ELD) se retrouvent donc privées d'un moyen d'action pourtant essentiel", déplore le RAC-F qui regrette aussi qu'"une grande partie de l'action climat-énergie des collectivités ne bénéficie pas de ressources dédiées". L'étude juge aussi l'organisation territoriale actuelle "peu adaptée aux enjeux climat-énergie".
Résultat : "La majorité des pouvoirs et moyens d'action relatifs à l'énergie et au climat est concentrée au niveau de l'Etat - et pour la distribution de l'énergie, des opérateurs historiques. Cette concentration fait obstacle à la diffusion d'une culture de responsabilité vis-à-vis de l'usage et de la production d'énergie, pourtant indispensable à l'atteinte du Facteur 4". Malgré tout, souligne l'étude, "de plus en plus de collectivités souhaitent agir et s'engagent dans des plans Climat-Energie territoriaux ou équivalent. Plusieurs développent, parfois dans la douleur, des initiatives innovantes : flotte de bus alimentée par les déchets à Lille, sociétés de tiers-financement de la rénovation énergétique (SPL Oser en Rhône-Alpes, SEM Énergies Posit'if en Ile-de-France…), fonds énergie-climat alimenté par des CEE à Besançon, Atelier Climat à Nantes Métropole…"

Plus de pouvoirs aux intercommunalités et aux régions

Pour "disposer d'un cadre qui facilite le développement de politiques climat-énergie ambitieuses au lieu de le freiner", le RAC-F avance donc toute une série de propositions. La première consiste à "renforcer l'intercommunalité et la région", deux échelons jugés "fondamentaux" pour la gouvernance climat-énergie. L'intercommunalité doit ainsi se concevoir à l'échelle d'un "bassin de vie" et le bloc de compétences climat–énergie intercommunal doit notamment comprendre l'urbanisme, la mobilité durable, l'habitat, l'énergie et l'environnement (déchets, eau, biodiversité et espaces verts locaux…), détaille l'étude. Quant à la région, elle doit être "seule responsable de l'élaboration du SRADDT [schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire] et du SRCAE [schéma régional climat air énergie] (comprenant le schéma éolien), en concertation avec l'Etat, les autres collectivités territoriales et les principaux acteurs de son territoire et en cohérence avec les objectifs nationaux et européens contraignants". Ces schémas régionaux doivent en outre être opposables aux documents d'urbanisme ainsi qu'aux projets énergétiques, préconise le RAC-F. La région devrait aussi être "chef de file en matière d'intermodalité", soutient-il. Il faudrait aussi couvrir l'ensemble du territoire par des plans climat énergie territoriaux (PCET) d'ici 3 ans, estime-t-il. Ces PCET, qui ont vocation à être portés "à l'échelle de la région et du bassin de vie", devront aussi comprendre obligatoirement "un volet d'animation territoriale". Le RAC-F propose aussi de "donner aux collectivités les capacités politiques et réglementaires d'agir", en assouplissant par exemple le droit à l'expérimentation et en rétablissant leur autorité sur la gestion de leurs réseaux de distribution de l'électricité et du gaz. Sur le plan financier, il estime que "l'une des premières étapes pour une collectivité doit être de procéder à un balayage de l'ensemble de ses politiques et projets et des aides qu'elle attribue afin de supprimer ceux qui sont contraires à l'objectif de transition énergétique". Outre une réforme de la fiscalité foncière et immobilière qui permettrait une taxation annuelle "sur la base de valeurs en lien avec les prix de marché", il propose de développer les émissions d'"obligations vertes" ("green bonds") pour financer les investissements dans l'environnement et de permettre aux collectivités de moduler les incitations financières en fonction de la politique locale, qu'il s'agisse de dépénaliser et de décentraliser le stationnement payant ou de territorialiser les aides au logement. Le RAC-F suggère aussi de faciliter le développement dans chaque région de sociétés de services d'efficacité énergétique (SSEE) et de lancer "dès maintenant la création d'un fonds pérenne pour la rénovation énergétique". Enfin, pour "renforcer les missions d'observation, de suivi et d'évaluation", il propose notamment de doter chaque bassin de vie d'"un économe de flux ou conseiller en énergie partagé", de mettre en place dans chaque région un observatoire du foncier et de généraliser les observatoires régionaux de l'énergie et des émissions de gaz à effet de serre.

 

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