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Transports - Le projet Charles-de-Gaulle Express remis sur les rails pour 2023

Après des années d'atermoiements, une liaison ferroviaire rapide entre Paris et l'aéroport de Roissy va être construite à partir de 2017 pour une mise en service en 2023. Charles-de-Gaulle Express parcourera non stop 32 kilomètres en 20 minutes. Il reliera toute l'année la capitale - depuis la gare de l'Est - à l'aéroport toutes les 15 minutes entre 5h00 et minuit, a annoncé Frédéric Cuvillier le 23 janvier à l'occasion de la cérémonie des voeux d'Aéroports de Paris (ADP) à Roissy. "C'est une ambition absolument nécessaire pour l'image, pour la compétitivité de cet aéroport", a souligné le ministre délégué aux Transports.
Sur les 32 km de parcours, 8 km devront être construits. Ce train rapide constituera une alternative au RER B, qui dessert une série de villes de Seine-Saint-Denis avant d'atteindre l'aéroport et est régulièrement décrié par ses usagers dénonçant vétusté, défaillances techniques récurrentes et insécurité.
Le PDG d'ADP, Augustin de Romanet, a salué "une très grande date pour Charles-de-Gaulle". "Le fait que le ministre ait montré son engagement la rend irréversible", a-t-il ajouté. "Ces nouvelles infrastructures (...) sont nécessaires pour renforcer l'attractivité de l'un des aéroports les plus importants d'Europe et plus largement de la destination France", a-t-on renchéri chez Air France. Même son de cloche du côté du Medef : "Une desserte optimisée de Roissy constitue un enjeu majeur pour l'économie francilienne".
Selon le scénario retenu par le gouvernement, le trajet simple coûtera 24 euros contre un peu moins de 10 euros actuellement en RER. "Ce prix reste dans la moyenne de ce qui se pratique en Europe", a affirmé l'entourage du ministre. A Stockholm, un trajet simple en Arlanda Express coûte 260 couronnes (environ 29 euros). A Londres, le Heathrow Express entre Londres Paddington et Heathrow coûte 21 livres (25,5 euros).
Evoqué dès 1998, CDG Express avait été déclaré d'utilité publique dix ans plus tard avant d'être attribué en concession à Vinci. L'entrée en service était alors programmée pour 2014. Mais Vinci avait jeté l'éponge fin 2011 faute de financements. Il réclamait notamment une participation de l'Etat de 135 millions d'euros.
Cette fois, le gouvernement mise sur un partenariat public-public. Le schéma consiste à créer une filiale constituée de Réseau Ferré de France (RFF) et d'Aéroports de Paris (ADP), le gestionnaire de Roissy. Cette filiale gestionnaire d'infrastructure (GI) se voit confier la conception, la construction, le financement et la maintenance de CDG Express. Pour l'heure, les parties prenantes doivent toutefois s'assurer de la faisabilité juridique auprès de Bruxelles. Ce projet, évalué à 1,7 milliard d'euros, ne recevra aucune subvention de l'Etat, a-t-on assuré dans l'entourage de Frédéric Cuvillier. Le futur exploitant doit encore être choisi probablement à l'issue d'un appel d'offres.

En 2013, Paris-Charles-de-Gaulle, deuxième aéroport d'Europe derrière Heathrow, a accueilli 62 millions de passagers. Sa capacité d'accueil total s'élève à 80 millions. On estime que 7 à 8 millions de passagers empruntent aujourd'hui le RER B pour quitter l'aéroport ou s'y rendre. La construction de cette liaison rapide sera remboursée sur le prix des billets. Et une ressource externe telle qu'un prélèvement d'un euro sur le billet d'avion pourrait également être mise en oeuvre. Air France a mis en garde le 23 janvier sur le fait que "si d'autres sources de financement devaient être trouvées, elles ne devraient pas peser sur les compagnies aériennes qui, dans un contexte de crise, sont soumises à une forte concurrence internationale".

"Il y a enfin un consensus sur l'absolue nécessité de cette liaison", s'est félicitée une source proche d'ADP, détenu à 50,6% par l'Etat. "Le dimensionnement actuel du RER B et l'autoroute A1, déjà à saturation, ne sont pas adaptés pour absorber davantage de trafic passagers", a souligné une source proche de Frédéric Cuvillier. La gare de l'Est a été choisie pour une raison de disponibilité des voies, a ajouté Pierre Mongin, PDG de la RATP, écartée du projet, de même que la SNCF. Mais du côté des élus locaux, il n'est pas sûr que le projet fasse l'unanimité. Pour Stéphane Gatignon, le maire EELV de Sevran (93), c'est une "triple erreur". "Tout d'abord, la question fondamentale aujourd'hui est le RER B et ses dysfonctionnements quotidiens. Aujourd'hui, il faut tout faire tant en investissement qu'en fonctionnement pour assurer un service normal du RER B", a-t-il réagi dans un communiqué ce 24 janvier. "Le projet de Charles-de-Gaulle Express est une absurdité à l'heure du Grand Paris", ajoute-t-il, pointant le fait qu'il traverserait la Seine-Saint-Denis sans desservir son territoire. Enfin, "à 24 euros le billet annoncé, le Charles-de-Gaulle Express continue d'arriver gare de l'Est, loin de tout noeud de transport (...) au moment où nous allons lancer les chantiers du métro du Grand Paris et de ses gares interconnectées avec le RER (...). C'est jeter l'argent par les fenêtres."