Aménagement urbain - Le Predit se penche sur le problème de l'étalement urbain
Comment canaliser l'étalement urbain ? C'est la question que pose le dernier "Le point sur", publié par la Documentation française, qui a été présenté le 9 juin au Salon européen de la mobilité. Ecrit par Marc Wiel, chercheur au Programme interministériel de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (Predit), cet ouvrage pose d'abord les bases de cet enjeu qui "pose la question des limites de la ville" et de la délicate mesure du phénomène de péri-urbanisation. Si l'Insee dispose certes de données et de cartes permettant de le cerner, il manque encore des éléments pour pouvoir comparer les agglomérations entre elles à l'échelle européenne. En effet, "cela supposerait de s'accorder sur la notion d'agglomération" et sur un indicateur de degré de péri-urbanisation qui, déjà, est lui-même plus fort dans certaines villes françaises (Amiens, Caen, Le Mans) et plus modéré ailleurs (Bordeaux, Dunkerque).
Le deuxième chapitre décrypte les raisons de l'étalement urbain. L'abondance foncière, l'extension des transports et "une certaine idéalisation de la ruralité" sont passées au crible. Résultant d'un ajustement entre l'offre et la demande, cet étalement urbain serait motivé, côté demande, par une forte attractivité résidentielle et, côté offre, par le comportement des institutions locales, notamment, qui a lui-même influencé la disponibilité foncière et l'ouverture-fermeture de l'urbanisation.
Le dernier chapitre se concentre sur les conditions de mobilité, et sur cette "mobilité facilitée" qui est comme une "condition permissive" de l'étalement urbain. Bien sûr, cet étalement n'est jamais tout noir ou tout blanc mais présente "à la fois des avantages et des inconvénients". Exemple : les politiques de régulation des flux et de la vitesse engagées dans des villes comme Nantes ou Grenoble interfèrent nécessairement dans la maîtrise de cet enjeu. "Permis de conduire et permis de construire sont en effet d'intimes complices", pointe l'ouvrage.
Mais le chercheur ne s'en tient pas là et éclaire son analyse à la lumière de facteurs sociaux (accessibilité, emploi et services) et de critères environnementaux (consommation d'espace, impact sur les espèces, production de CO2). Face à la complexité des enjeux posés, il penche en faveur d'un "principe de précaution qui devrait inciter à chercher l'organisation urbaine permettant toujours d'interagir même si un renchérissement élevé de la mobilité devient inévitable". Selon lui, la ville compacte n'est pas une nécessité, mais il faut assurément plus de cohérence entre habitat et emploi. "La première contrainte qui reste à desserrer est le taux d'effort des ménages pour le logement", ajoute-il. Un taux "qui ne peut que croître", mais dont les objectifs et résultats sont "l'affaire des collectivités locales". En bref, il n'y a nul besoin de trouver un bouc émissaire à ce problème. Mieux vaut se poser la question de "savoir comment donner les moyens financiers de contrer les effets néfastes de la compétition pour le sol". Enfin, il reste à mieux comprendre comment la mobilité "contribue à la formation des prix de l'immobilier" et "pour quelles raisons les structures communales et intercommunales ont encore une réticence à canaliser l'étalement urbain".
Morgan Boëdec / Victoires-Editions