Le plan d’action pour la préservation des sols forestiers soumis à consultation
Prévu par les assises de la forêt et du bois conclues il y a trois ans, le plan d’action pour la préservation des sols forestiers a été dévoilé ce 25 février. Il est soumis à consultation publique jusqu’au 6 avril prochain.

© Ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche et Adobe stock
Initié par les assises de la forêt et du bois conclues en mars 2002 (fiche action n° 2.3 ; voir notre article du 17 mars 2022), prévu par la stratégie Biodiversité 2030 (mesure 26, action 4) adoptée fin 2023 (voir notre article du 27 novembre 2023), le plan d’action pour la préservation des sols forestiers à horizon 2030 vient d’être soumis à consultation publique, jusqu’au 6 avril prochain. Il a notamment pour finalité de contribuer à l’atteinte des objectifs de la stratégie nationale bas carbone et du plan national d’adaptation au changement climatique, comme l’a souligné Agnès Pannier-Runacher, qui le présentait ce 25 février au salon de l’agriculture. "Tout cela doit être parfaitement aligné pour éviter les incohérences entre nos différents modes d’action", a insisté la ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche.
Quatre objectifs
Conservation de l’intégrité physique des sols forestiers, maintien de leur fertilité, sécurisation du puits de carbone qu’ils représentent, préservation de la biodiversité ou encore présentation de leur rôle régulateur dans le cycle de l’eau sont autant d’ambitions affichées par ce plan. Pour y parvenir, quatre objectifs concrets y sont fixés : "maintenir, créer et respecter les cloisonnements ou pistes d’exploitation et promouvoir des méthodes de débardage à faible impact ; raisonner le travail du sol avant plantation ; maintenir sur place le feuillage et les souches, limiter et adapter la récolte de menus bois ; garantir la pérennité du couvert forestier en assurant sa reconstitution, et en favorisant le couvert continu notamment en zone de pente".
Cinq axes
Seize actions y sont détaillées, lesquelles s’articulent autour de cinq axes :
- "connaître et surveiller les sols". Dans ce cadre, un appel à projets de "recherche-action" sur les sols forestiers sera notamment lancé par l’Ademe, pour lequel l’implication des collectivités territoriales est notamment souhaitée ;
- "mobiliser le bois avec des pratiques et équipements à faibles impacts", comme le débardage par câble ou au cheval, sans pour autant nier que "la mécanisation fait partie aujourd’hui de la gestion sylvicole". "La préparation mécanisée du terrain contribue à assurer la bonne reprise des plants et à améliorer leur croissance initiale ainsi qu’à lutter contre les espèces les plus concurrentielles, en alternative à l’utilisation des phytocides", est-il observé ;
- "former et sensibiliser sur la gestion durable des sols forestiers" ;
- "accompagner économiquement les pratiques sylvicoles et les investissements matériels les plus vertueux". Le plan n’hésite pas en la matière à froisser quelque peu le principe de libre administration des collectivités territoriales, puisqu’il dispose que "dans le cadre des discussions sur les dispositifs d’aides relatifs à la planification écologique, que cela soit via des dispositifs d’État, [d’]établissement public ou des collectivités territoriales, l’enjeu sol[,] même s’il ne constitue pas l’objet premier du dispositif d’aide visé, sera pris en compte". Les collectivités devraient également être sollicitées "pour accompagner la mobilisation de fonds privés avec des paiements pour services environnementaux forestiers pour les systèmes permettant une meilleure préservation des sols" ;
- "encadrer les facteurs de pressions dans les textes de planification forestière, les règlementations et les cahiers des charges". Un travail qui sera notamment conduit via la transposition de la directive dite RED 3 sur les énergies renouvelables (voir notre article du 7 novembre 2023), mais aussi via les documents cadres de planification forestière, et notamment les schémas régionaux d’aménagement élaborés par l’ONF pour les forêts des collectivités.
Suivi et financement du plan
Le suivi du plan, comme son élaboration, a été confiée à l’Ademe. Une évaluation à mi-parcours, en 2027, est prévue afin "d’affiner ou d’établir de nouvelles actions". Le Conseil supérieur de la forêt et du bois examinera également "le bon déroulement du plan".
Le document reste en revanche peu disert sur son financement. "En plus des engagements financiers déjà déployés en faveur de la filière forêt-bois (France 2030, fonds vert, fonds pérenne renouvellement forestier), les crédits de la planification écologique, les crédits du programme Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et les crédits du programme Paysage, eau et biodiversité, dans le budget de l’État et ses opérateurs, permettront de contribuer aux objectifs du plan d’action », est-il seulement indiqué, sans qu’aucun montant ne soit dévoilé.
Une attention renforcée pour les sols
La question de la préservation des sols en général, et des sols forestiers en particulier, se fait depuis quelques années plus prégnante (voir notre article du 15 décembre 2023), notamment en lien avec le changement climatique (sans compter la prise en compte de la perte de biodiversité, alors que "les sols constituent un réservoir de biodiversité inestimable", ou de la désormais inévitable question de leur artificialisation).
D’une part via le versant adaptation. "Nos sols sont mis à mal par les conséquences du dérèglement climatique", souligne Agnès Pannier-Runacher. Stress hydrique, températures extrêmes, feux de forêt ou/et érosion hydrique sont autant de phénomènes qui les affectent directement. Les pressions issues des activités humaines resteraient toutefois la principale source de leur dégradation, souligne le plan : tassement du sol par les engins d’exploitation, acidification et baisse de fertilité chimique induites par certaines pratiques, comme le changement d’essences, la récolte du menu bois…
D’autre part, et peut-être plus encore, via le versant atténuation, les sols à l’échelle mondiale constituant "le plus grand réservoir de carbone terrestre". En particulier les sols forestiers, qui, en France, contiennent "2,5 fois plus de carbone organique que les sols cultivés", enseigne le document. Des sols qui "sont ceux dont l’augmentation des stocks est la plus importante en France aujourd’hui", est-il également souligné.
Rappelons qu’un projet de directive européenne relative à la surveillance et à la résilience des sols, présentée en 2023 (voir notre article du 6 juillet 2023), est toujours en discussion.