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Habitat - Le logement intergénérationnel fait l'unanimité mais peine à décoller

A défaut de représenter un mode d'habitat significatif, le logement intergénérationnel a le vent en poupe. Dans son récent rapport sur la place des seniors dans la cité, le Conseil économique et social en faisait un axe majeur d'intégration des personnes âgées. Il était également présent dans les réflexions des 7e Rencontres nationales de l'Odas (Observatoire de l'action sociale décentralisée) à Marseille, les 2 et 3 juillet, présenté comme l'un des vecteurs de création du lien social en période de crise. L'Union sociale pour l'habitat (USH) l'a placé au coeur du cinquième axe de son programme pour le nouveau Parlement européen, consistant à anticiper l'impact des changements démographiques et de l'évolution des modes de vie. Dernier signe en date de cet engouement pour le logement intergénérationnel : la tenue à Paris, du 3 au 5 juillet, du "First World Homeshare Congress" (premier congrès mondial du logement partagé). Cette manifestation était organisée par l'association britannique Homeshare International, présente dans plusieurs pays occidentaux et qui s'est donné pour mission de promouvoir le logement intergénérationnel. Les participants, originaires de plusieurs pays (Australie, Allemagne, Espagne, Etats-Unis, France, Irlande, Italie, Portugal, Royaume-Uni...), se sont efforcés de cerner les atouts, les conditions de réussite mais aussi les freins au développement du logement intergénérationnel.

La question ne laisse pas indifférents les pouvoirs publics et les collectivités territoriales. Intervenant le 20 juin à Limoges devant l'assemblée générale de l'Union nationale des associations familiales (Unaf), Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la Famille et de la Solidarité, a insisté sur la nécessité, face au vieillissement de la population, de "diversifier les modèles d'accueil des personnes âgées". Elle a fait part de son intention de mettre sur pied, dès cet été, des "ateliers" destinés "à promouvoir la culture de l'intergénérationnel" et associant des architectes, des psychologues, des publicitaires... La secrétaire d'Etat a insisté notamment sur les perspectives de la "colocation intergénérationnelle", associant une personne âgée et un étudiant. Pour justifier cette nécessité, Nadine Morano a rappelé que "la proportion de personnes âgées de 65 ans et plus était de 15,4% fin 1996, tandis qu'à l'horizon 2020, cette part atteindra 33% de la population générale".

Seul bémol à cette unanimité et à cet engouement : le logement intergénérationnel ne parvient pas à décoller malgré la multiplication des initiatives et le soutien de l'Etat et des collectivités. A défaut de chiffres nationaux, les expériences en cours montrent que ce mode d'habitat reste encore très marginal. En cause : le manque criant de candidatures du côté des personnes âgées, alors que les étudiants se montrent plutôt intéressés. Faute d'information, cette solution pour rompre l'isolement des personnes âgées reste largement méconnue des intéressés ou suscite une certaine méfiance. Le développement de la formule passe donc nécessairement par un important effort de communication, mais aussi par un accompagnement public ou associatif qui sécurise les personnes âgées candidates. Sur ce point, il n'est pas sûr que la récente multiplication de sites internet privés de mise en relation autour du logement intergénérationnel soit de nature à apporter les garanties souhaitées.

 

Jean-Noël Escudié / PCA