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Le gouvernement saisit le Cese sur la création d'un service public de la petite enfance

Après l'avoir évoqué lors de la Conférence des familles, Adrien Taquet vient de saisir officiellement le Cese sur le projet de création d'un service public de la petite enfance. Le Cese mentionne d'emblée l'instauration d'un droit opposable à la garde d'enfants, idée qui figure aussi dans le rapport Damon-Heydemann. Le sujet avait déjà été abordé lors des deux précédents quinquennats... Le Cese doit remettre son rapport en mars 2022. Beaucoup de questions se posent dont, évidemment, celle d'une offre suffisante.

Lors de la récente Conférence des familles (voir notre article du 1er octobre 2021), Adrien Taquet avait évoqué la possibilité d'instaurer un service public de la petite enfance. La démarche vient de franchir une étape importante. Le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles est en effet revenu sur ce sujet lors de la séance de questions orales du 7 décembre à l'Assemblée nationale, en faisant "une annonce importante" : "J'ai proposé au Premier ministre – qui a accepté – que le Conseil économique, social et environnemental (Cese) soit saisi pour identifier les mesures nécessaires à la création d'un service public de la petite enfance, défini comme le droit garanti pour chaque parent qui le souhaite à une solution d'accueil du jeune enfant à un coût similaire, quel que soit le mode d'accueil."

Des propositions à remettre en mars 2022

Dans un communiqué du 8 décembre, Thierry Beaudet, le président du Cese confirme cette saisine, afin d'"identifier les mesures nécessaires pour mettre en place un service public de la petite enfance". Cette mission de préfiguration confiée au Cese – qui rendra son rapport en mars 2022 –, et la définition donnée à ce service public de la petite enfance, rappellent plusieurs initiatives inabouties depuis quinze ans et soulèvent un certain nombre de questions. La définition du service public de la petite enfance correspond en effet à celle du droit opposable à un mode de garde, les deux notions étant d'ailleurs souvent utilisées comme des synonymes. Le communiqué du Cese lève d'ailleurs toute ambiguïté sur ce point en précisant que sa saisine s'inscrit "dans la continuité [...] du rapport Heydemann-Damon, qui appelait notamment à la création d'un droit opposable à la garde d'enfants". Ce rapport, intitulé "Renforcer le modèle français de conciliation entre vie des enfants, vie des parents et vie des entreprises", remis à Élisabeth Borne et Adrien Taquet lors de la Conférence des familles, plaide en effet pour "construire un droit opposable à un mode d'accueil". Il considère que "la réalisation d'un tel schéma suppose, en tout cas, un système volontariste de garantie pour les parents, qu'il soit baptisé 'droit opposable' à un mode de garde ou service public de la petite enfance (SPPE)".

Une annonce en 2017, une autre en 2012...

Or, l'annonce de l'instauration d'un droit opposable à un mode de garde – sur le modèle du droit au logement opposable (Dalo) – a déjà été faite par Nicolas Sarkozy dans les premières semaines de son quinquennat, en 2007, avec une entrée en vigueur programmée pour 2008 (voir notre article du 2 août 2007). La mesure s'appuyait alors sur des travaux de préfiguration du Centre d'analyse stratégique, commandés par le précédent gouvernement de Dominique de Villepin. Prudent, le CAS indiquait toutefois qu'une telle disposition ne pourrait "s'envisager que s'il y a suffisamment d'offres", donc pas avant "cinq ou dix ans". Une position qui rejoint d'ailleurs celle du tout récent rapport Heydemann-Damon, pour lequel "le droit opposable à un mode de garde nécessite une offre publique ou conventionnée suffisante".

Le service public de la petite enfance refait surface en 2012, lors de la campagne présidentielle. Le candidat François Hollande intègre en effet cette proposition à son programme, de même que l'abrogation du "décret Morano" (décret du 7 juin 2010 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans) assouplissant les règles d'encadrement des modes de garde pour en accroître la capacité. Aucune des deux mesures annoncées ne sera finalement mise en œuvre. La situation n'est donc pas sans rappeler la mise en place de la branche autonomie de la Sécurité – ou cinquième branche –, annoncée elle aussi en 2007 et qui est seulement en train de se concrétiser.

La question de l'harmonisation des coûts et celle des compétences

Au-delà de la question d'une offre de solutions de garde suffisante pour mettre en œuvre un droit de garde opposable – mais après tout le Dalo a bien été instauré alors qu'il n'existe toujours pas, quinze ans après, une offre de logements suffisante pour loger rapidement ses bénéficiaires – l'annonce d'Adrien Taquet et la saisine du Cese soulèvent une autre question, tout aussi complexe : celle d'"une solution d'accueil du jeune enfant à un coût similaire, quel que soit le mode d'accueil", selon la formule employée par Adrien Taquet devant l'Assemblée nationale. A ce stade, ce dernier s'est contenté d'indiquer que la réponse "passe notamment par l'harmonisation du système, qui est particulièrement éclaté, complexe et illisible, du point de vue des parents".

Il a rappelé le travail entrepris en matière d'unification et d'harmonisation du secteur autour de la notion de qualité d'accueil, en particulier avec la charte nationale de la qualité d'accueil adoptée en 2016 et récemment intégrée à la loi, mais cela ne règle pas la question des coûts. Sur ce point, Adrien Taquet reconnaît que "le travail doit encore être poursuivi, notamment en matière d'égalité financière d'accès à un mode d'accueil, d'organisation et de partage des responsabilités dans le champ de la petite enfance". Avec à la clé un autre sujet important et qui concerne très directement les collectivités territoriales : "La question de la compétence devra être posée, mais je n'ai pas la réponse aujourd'hui."

 

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