Ecole maternelle - Le gouvernement répond à une partie des revendications des Atsem
Deux décrets parus le 3 mars élargissent les missions et les possibilités d'évolution professionnelle des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), permettant d'améliorer la reconnaissance de ces personnels qui étaient en grève il y a un an. Pour un certain nombre d'entre eux toutefois, le compte n'y est pas. Les représentants des maires ont veillé à ce que les Atsem ne deviennent pas des "supplétifs de l'Education nationale".
Deux décrets concernant les quelque 50.000 assistants territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) - lesquels sont quasi exclusivement des femmes - sont parus samedi 3 mars au Journal officiel. Très attendus par les personnels concernés, ces textes "visent à ouvrir des perspectives et revaloriser les carrières" des Atsem, a fait valoir un tweet du ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Mais beaucoup d'Atsem, qui étaient en grève en décembre 2016 et février 2017, considèrent qu'ils ne vont pas assez loin.
Avec cette réforme lancée à la fin du quinquennat de François Hollande et finalisée par le nouvel exécutif, les missions éducatives des Atsem, qui ont pris une place de plus en plus importante ces dernières années - notamment avec la réforme des rythmes scolaires - sont mieux reconnues. Leurs missions sont en effet complétées, afin de prévoir qu'"ils peuvent participer à la mise en œuvre des activités pédagogiques prévues par les enseignants et sous la responsabilité de ces derniers". Au passage, on soulignera combien l'Association des maires de France (AMF) a été attentive à la rédaction de cette phrase. Elle avait été vent debout l'été dernier lorsque les ministères avaient suggéré d'écrire que les Atsem "concourent à la mise en œuvre des activités pédagogiques prévues par les enseignants et sous la responsabilité de ces derniers". François Deluga, président de la commission de l'AMF consacrée à la fonction publique territoriale et aux ressources humaines, a mis les points sur les i : "La pédagogie relève des enseignants. Si l'Etat veut que les Atsem deviennent des supplétifs de l'Education nationale, c'est hors de question", expliquait-il en septembre à Localtis. L'AMF s'est aussi battue, avec succès, pour que "la sécurité" ne figure pas dans les missions des Atsem. En revanche, celles-ci continuent de mentionner "la mise en état de propreté des locaux et du matériel servant directement à ces enfants". Ce qui pour une partie des Atsem et certains de leurs syndicats, notamment la CGT, ne devrait plus avoir lieu d'être, cette mission devant, selon eux, être uniquement assurée par des adjoints techniques territoriaux.
La catégorie B... après réussite à un concours
Il est clair que la nouvelle définition des missions des Atsem confirme la polyvalence de ces personnels. Une caractéristique qui sera sans doute appréciée par les communes et les intercommunalités, qui disposeront toujours d'une grande latitude pour l'organisation de leur travail. Sur le terrain, en effet, les missions demandées aux Atsem peuvent connaître d'importantes variations, au-delà de leur mission commune d'assistance à l'accueil des enfants dans la classe.
Par ailleurs, la réforme permet aux Atsem de devenir agents de maîtrise. Ces personnels de la filière technique relèvent certes de la catégorie C, mais ils sont mieux rémunérés. Dans ce but, deux possibilités sont offertes aux Atsem. D'abord, la promotion interne après avis de la commission administrative paritaire. Cette voie est ouverte à celles et ceux qui ont réalisé au moins neuf années dans le cadre d'emplois des Atsem. La deuxième voie est celle d'un examen professionnel que pourront passer les Atsem ayant sept années de services.
En intégrant le cadre d'emplois des agents de maîtrise, les personnels "pourront être chargés de la coordination" des Atsem ou des adjoints techniques territoriaux. Le décret ouvre ainsi la voie à la reconnaissance des missions d'encadrement que certains Atsem exercent déjà et donne la possibilité à celles et ceux qui le souhaiteraient, d'évoluer professionnellement vers ce type de fonctions. On notera que cette orientation est ouverte y compris aux agents des écoles maternelles qui ne sont pas titulaires du CAP Petite enfance.
Par ailleurs, les Atsem pourront intégrer le cadre d'emplois de catégorie B des animateurs territoriaux, s'ils réussissent un concours interne spécial. Ils pourront le passer s'ils justifient d'au moins quatre ans de services effectifs dans un emploi d'Atsem, au 1er janvier de l'année au titre de laquelle le concours est organisé. L'épreuve d'admissibilité de ce concours consistera en la rédaction en un temps limité de trois heures d'une note à partir des éléments d'un dossier portant sur "l'animation périscolaire". Les candidats déclarés admissibles auront un entretien d'une vingtaine de minutes avec un jury qui jaugera leur motivation et leur aptitude à exercer les fonctions d'animateur.
Une charte entre l'Etat et les maires
Comme le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) l'avait souhaité dans son rapport de février 2017, les Atsem pourront ainsi accéder à la catégorie B. Mais, contrairement aux revendications de certains syndicats, cette évolution sera conditionnée à la réussite à un concours et elle s'effectuera en quittant la filière sociale. C'est d'ailleurs ces perspectives de carrière dans la filière animation qui ont irrité plusieurs Atsem et leur collectif, Atsem de France, qui se sont exprimés sur Twitter. "Nous ne sommes pas animateur, nous n’avons jamais souhaité l’être", a ainsi tweeté ce dernier. Lors de l'examen des projets de décrets par le CSFPT, le 15 novembre dernier, plusieurs syndicats étaient déjà remontés. Toutefois, quelques-uns (la CFDT et la FA-FPT) considéraient qu'ils apportaient des améliorations pour les Atsem.
Préconisée par un rapport des inspections de l'Etat, une "charte d'engagement pour une meilleure reconnaissance des compétences professionnelles des Atsem" doit compléter les dispositions réglementaires de ce 3 mars. Cette charte, qui n'aura pas de valeur juridique, est actuellement préparée par les ministères de l'Intérieur et de l'Education nationale, en concertation avec l'AMF et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). Elle doit préciser les missions des Atsem, en particulier durant les heures scolaires, afin de lever les difficultés qui peuvent naître de l'existence d'une double hiérarchie (la collectivité ou l'établissement public et l'Education nationale). L'objectif est aussi, selon l'AMF, de "faciliter les évolutions", notamment via la validation des acquis de l'expérience (VAE), lorsque c'est la volonté des employeurs locaux. Le projet auquel les ministères s'attellent depuis l'été dernier, a pris du retard : l'AMF n'a aucune connaissance de la date à laquelle la charte, qui semble toutefois être en voie de finalisation, sera signée.
Références :
décret n° 2018-152 du 1er mars 2018 portant diverses dispositions statutaires relatives aux agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles ;
décret n° 2018-153 du 1er mars 2018 modifiant le décret n° 2004-248 du 18 mars 2004 fixant les conditions d'accès et les modalités d'organisation des concours pour le recrutement des agents de maîtrise territoriaux et le décret n° 2011-559 du 20 mai 2011 fixant les modalités d'organisation des concours pour le recrutement des animateurs territoriaux.