Aménagement numérique - Le gouvernement publie les grandes lignes de sa feuille de route
Mieux contrôler les déploiements de fibre optique par les opérateurs, sécuriser l'action des collectivités : l'exécutif a finalement choisi de conforter le modèle actuel du plan France THD et souhaite renforcer son exigence envers les acteurs privés. En revanche, le grand plan d'investissement offre peu de visibilité sur les moyens accordés à l'aménagement numérique.
Jacques Mézard et son secrétaire d'État Julien Denormandie, Mounir Mahjoubi le secrétaire d'État au numérique et Benjamin Griveaux, secrétaire d'État à l'Économie, ont publié conjointement le 27 septembre, les grandes lignes de la feuille de route du gouvernement sur l'aménagement numérique ; le même jour, Julien Denormandie a accordé un entretien au Monde pour détailler l'esprit de cette feuille de route. Comme anticipé par l'Arcep, l'exécutif est prêt à faire un geste sur le coût des licences mobiles pour renforcer les contraintes de couverture. Mais surtout, le gouvernement souhaite faire prendre des engagements contraignants aux opérateurs sur le déploiement de la fibre optique en zone d'initiative privée, en réaction aux relatifs retards accumulés par SFR et Orange. Une revendication de longue date de l'Avicca, association représentative des collectivités engagées dans le très haut débit. Les opérateurs auraient donné leur accord tacite, alors qu'un tel droit de regard sur leur stratégie d'investissement a longtemps fait figure de ligne rouge à ne pas franchir.
Le projet de loi de Patrick Chaize "dans la philosophie" du gouvernement
Face à la tempête déclenchée par SFR sur la zone d'initiative publique, avec son intention de concurrencer les réseaux subventionnés par les collectivités, des changements sensibles devraient également intervenir. Julien Denormandie dit "partager la philosophie" de la proposition de loi que prépare Patrick Chaize, sénateur de l'Ain et président de l'Avicca, pour conforter les investissements publics dans la fibre. Patrick Chaize entend s'appuyer sur plusieurs dispositions juridiques à même d'empêcher un opérateur tiers, tel que SFR, de déployer un réseau concurrent à un RIP. Les réseaux de télécommunications à très haut débit pourraient épouser le statut de service public local, au même titre que l'eau ou l'électricité. Les collectivités pourraient également se voir reconnaître le statut d'autorité organisatrice des réseaux très haut débit sur leur périmètre, pour exercer un contrôle plus strict sur les autorisations de voirie permettant à un opérateur de déployer un réseau en propre. L'Avicca se dit confiante et, si l'exécutif ne s'exprime pas sur la forme de la proposition de loi pour l'instant, les collectivités semblent avoir le champ libre pour se défendre. Un point qui tient à cœur de l'Avicca : les déclarations de SFR auraient retardé certains projets de RIP, qui face à la tempête auraient préféré mieux sécuriser leur projet sur le terrain juridique, quitte à perdre du temps. Le gouvernement va aussi continuer à examiner les changements de réglementation qui permettraient d'accélerer les déploiements (par exemple sur le génie civil).
Les financements en pointillés
Le principal point d'interrogation reste celui des financements. Durant l'été, Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, avait déclaré au Sénat que la finalisation du plan France THD au-delà de 2022, bénéficierait de 1,3 à 1,8 milliard d'euros de crédits au titre du futur grand plan d'investissement. Or, dans sa version présentée ce lundi (voir notre article du 25 septembre), le plan se contente de sécuriser 300 millions d'euros pour boucler le financement de la phase actuelle du plan. D'autres perspectives sont évoquées, mais leur évaluation est renvoyée à plus tard, nécessitant un travail de "concertation avec les collectivités".
Prochaine étape : une nouvelle réunion entre les opérateurs et le gouvernement, dans deux mois. L'exécutif compte notamment avancer sur la transparence de l'avancement des déploiements de réseaux.