Le département des Yvelines aura le FttH sans financement public, ailleurs la 4G se positionne
Alors que le Premier ministre, Edouard Philippe, a réitéré lors du discours de politique générale l'intention de rendre le très haut débit accessible à tous d'ici 2022, le département des Yvelines annonce avoir trouvé un opérateur en mesure d'apporter la fibre optique à ses zones rurales sans contribution des deniers publics, et ce dès 2020. Cette première interroge, mais les Yvelines ne sont pas représentatives de la plupart des territoires ruraux français. Ailleurs, le coût des raccordements est tel que le gouvernement envisage de laisser une place plus importante au très haut débit hertzien. On en saura plus le 7 juillet au soir, après une réunion programmée entre plusieurs membres du gouvernement et les principaux opérateurs de l'internet fixe.
En février dernier, TDF avait réalisé une entrée remarquée sur le marché des réseaux d'initiative publique, en étant sélectionné par le département du Val d'Oise. L'entreprise s'était alors engagée à raccorder 86.000 foyers au FttH d'ici la fin de l'année 2019, avec un taux de subvention de la part des collectivités locales particulièrement bas et des engagements en faveur de l'emploi valdoisien. Une stratégie très favorable aux deniers publics, sans doute nécessaire à TDF pour se démarquer des opérateurs établis et se faire une place sur le marché. L'entreprise spécialiste des points hauts double maintenant la mise et va plus loin : elle vient de s'engager auprès du département des Yvelines pour déployer le FttH sur fonds propres, dans un ensemble de communes rurales qui était plutôt appelé à être desservi via un réseau d'initiative publique (RIP). Le syndicat mixte Yvelines numériques avait lancé un appel à manifestation d'engagement d'investissement (AMEI) plutôt que de recourir aux procédures nécessaires à la mise en place d'une DSP. Il indique avoir reçu trois candidatures d'opérateurs. TDF va racheter les réseaux de fibre optique dédiés aux entreprises déjà gérés par Yvelines numériques, pour déployer le FttH plus aisément. A terme, plus de 100.000 locaux sont concernés, pour 120 millions d'euros d'investissement.
Le problème du coût du THD en zone rurale
Si la viabilité de ce projet ne pourra être évaluée que sur le long terme, en examinant les délais réels de déploiement puis les performances de commercialisation du réseau, on sait d'ores et déjà que ce modèle reste très spécifique au département des Yvelines. Les coûts de déploiement et le potentiel commercial sont, dans la plupart des territoires, bien différents. En mai dernier, Patrick Chaize, président de l'Avicca, évoquait la préoccupation croissante des départements pour une meilleure péréquation des coûts de déploiement. Selon la densité du territoire et son environnement naturel, le coût à la prise FttH varie du simple au double. Le sénateur de l'Ain évoquait, aussi, son plaidoyer pour une nouvelle fiscalité des télécoms, réorientée vers ces investissements. Déjà évoqué plusieurs fois depuis le nouveau mandat présidentiel, le dossier du plan France Très Haut Débit devrait être pris à bras le corps par le gouvernement à partir du vendredi 7 juillet, où une réunion entre opérateurs et ministres est annoncée. Le gouvernement souhaiterait, tout à la fois, presser les opérateurs à déployer plus vite dans leurs zones, et trouver des solutions nouvelles pour les territoires les plus enclavés. Mais les pistes les plus probables ne sont pas les plus chères à l'Avicca.
Les acteurs de la 4G prêts pour le feu vert de Macron ?
Si les collectivités et certains acteurs influents dans l'Etat plaident pour le tout FttH, technologie la plus viable sur le long terme, le président Macron semble pencher pour une solution mixte accordant une large place à la 4G. Le 4 juillet, la Firip (Fédération des industriels des RIP) et l'Idate présentaient, en lien avec le Cnes, une étude évaluant le potentiel du satellite et de la 4G pour compenser les zones blanches de l'internet fixe. Les opérateurs et les industriels avaient la mine des grands jours : la conjoncture politique semble enfin leur sourire. Nomotech, dont l'expérimentation de RIP 4G en Seine-et-Marne est mise en avant par la Firip, table sur le déploiement de 400 sites 4G en France d'ici 2020, spécialement dédiés à l'internet fixe. Le directeur de l'Agence du numérique, Antoine Darodes, qui assistait à la présentation de l'étude, n'a pas caché son scepticisme envers la capacité des technologies radio à constituer la solution principale aux retards de déploiement du FttH partout en France. Le précédent du WiMax a laissé des traces et l'internet par satellite ne s'est jamais imposé, la faute notamment au manque d'opérateurs identifiés pour "booster" la commercialisation. Il n'est cependant pas certain que l'exécutif entende ces réserves : la 4G, performante sur les réseaux mobiles, pourrait bien se faire une place croissante au service de l'internet fixe en territoires ruraux.