Habitat - Le Conseil national de l'habitat donne sa position sur la délégation des aides à la pierre
"La délégation des aides à la pierre est une réussite." Par ses propos introductifs, le sénateur Dominique Braye, président du groupe de travail Décentralisation du Conseil national de l'habitat (CNH) qui vient de rendre son rapport, donne son satisfecit à la réforme impulsée par la loi du 13 août 2004. Le rapport "Politiques de l'habitat et décentralisation" place les EPCI comme chefs de file des politiques du logement. Une position qui a trouvé un écho favorable dans un deuxième rapport du CNH, rendu le même jour, le 19 avril, "Habitat et territoires". Une clarification des compétences entre chaque niveau de l'Etat aux EPCI s'impose en effet : "les EPCI délégataires doivent être les assembliers des politiques de l'habitat", les départements ont un "rôle solidaire entre les populations et les territoires", les conseils régionaux trouvent leur place "dans le sillage de leurs compétences de développeur et d'aménageur" et l'Etat doit se placer comme "stratège et garant de la cohésion sociale et territoire". Le rapport "Politiques de l'habitat et décentralisation", axé sur les aides à la pierre, donne au préfet un rôle de régulateur des actions entre les différents niveaux territoriaux et appelle de ses voeux une affirmation du rôle des conseils régionaux de l'habitat (CRH). "Les EPCI doivent devenir les chefs de file mais cela ne veut pas dire que l'on doit imposer cette évolution par voie législative ni qu'ils doivent détenir toutes les compétences en matière de logement !", a commenté Dominique Dujols, directrice des relations institutionnelles de l'Union sociale pour l'habitat (USH) et rapporteur du texte.
Pour un financement de l'Etat sur la durée de la convention
Cette "dynamique incontestable" recouvre cependant de profondes différences territoriales et des capacités d'initiatives inégales. Pour le CNH, il reste à faire des efforts pour mieux articuler ce mouvement décentralisateur et les dispositifs centralisés. Le Conseil national de l'habitat n'a pas fait l'impasse sur une des problématiques fortes pour les délégataires: l'articulation entre les objectifs locaux (programme local de l'habitat) et ceux définis au niveau national (plan de cohésion sociale et programme de rénovation urbaine). Sur ce dernier point, le CNH est favorable à ce que les projets de rénovation urbaine soient pensés à l'échelle de l'agglomération (le dispositif actuel repose sur le maire) et reconnaît que la faiblesse de l'investissement du 1% logement demeure une réalité : "Le 1% est encore trop peu décentralisé : une dizaine d'accords locaux sont signés et une quarantaine en cours de réalisation." Quelles sont les conditions de la réussite de la délégation des aides à la pierre ? Le CNH en voit deux : une meilleure pertinence par les préfets dans les choix des candidatures et un engagement financier de l'Etat sur la durée de la convention (il est actuellement annualisé). Pour le CNH, les conditions de la réussite de la délégation ne reposent pas sur la taille des EPCI candidats mais sur "l'antériorité de leur politique et de leurs outils en matière d'habitat ou à défaut sur leur engagement à les définir et enfin sur leurs objectifs de production", a commenté Dominique Dujols. En marge, le groupe de travail tient à mettre en exergue le problème du FSL (fonds de solidarité pour le logement) : le transfert aux départements "se révèle très problématique du fait de l'augmentation importante des charges et de l'insuffisance des transferts de l'Etat".
Pour une territorialisation des aides au parc privé
Le rapport "Politiques de l'habitat et décentralisation" n'oublie pas les partenaires de délégataires et se dit favorable, à l'instar de l'USH, à une concertation renforcée avec les HLM : un partenariat en amont des délégations, une mise en concurrence organisée selon des règles connues et concertées et la signature d'accords collectifs d'attribution. C'est sans doute en matière de logement privé que le CNH fait preuve de la plus grande innovation, reprenant à son compte les attentes d'un certain nombre d'EPCI délégataires avec "la régulation locale des aides fiscales à l'investissement privé afin que les plafonds de loyers et de ressources de ces logements soient cohérents avec les marchés locaux". Et de proposer pour cela deux solutions alternatives : soit le délégataire et le préfet définissent au niveau territorial un périmètre à l'intérieur duquel les aides sont ouvertes aux investisseurs, soit un ajustement des plafonds de ressources à l'intérieur d'un cadre national est possible pour s'adapter aux besoins constatés suivant la solvabilité de la demande locale. Reste le cas particulièrement critique de l'Ile-de-France. Constatant qu'un consensus semble difficile à atteindre, le CNH n'a pas favorable à une délégation à la région, il privilégie l'Etat pour jouer un rôle pivot entre collectivités.
Clémence Villedieu