Insertion - Le Conseil d'Etat précise la prise en compte des revenus pour le droit au RSA
Deux décisions du Conseil d'Etat du 14 juin 2017 apportent de nouvelles précisions sur la prise en compte des revenus des demandeurs dans l'attribution du revenu de solidarité active (RSA). La première porte à la fois sur le caractère familial du RSA et sur le cas particulier des personnes relevant du régime social des indépendants (RSI). La seconde concerne la prise en compte des revenus issus de placements producteurs d'intérêts.
L'appréciation des revenus se fait dans le cadre du foyer
Dans la première affaire (n°398535), Mme A... B... contestait la décision du conseil départemental (alors conseil général) de l'Isère lui refusant le bénéfice du RSA. Le motif avancé par le département pour justifier son refus est que son concubin exerçait une activité professionnelle en qualité de travailleur indépendant et qu'il avait réalisé un chiffre d'affaires de 104.000 euros excédant le niveau, fixé par décret, ouvrant droit au bénéfice de cette prestation (en l'occurrence, 82.200 euros ou 32.900 euros hors taxes, selon qu'il s'agit d'une activité de vente de marchandises ou de services).
La question tient au caractère familial du RSA, qui "complète les revenus du travail ou les supplée pour les foyers dont les membres ne tirent que des ressources limitées de leur travail et des droits qu'ils ont acquis en travaillant ou sont privés d'emploi". Le code de l'action sociale et des familles (CASF) précise aussi que "lorsque, au sein du foyer, un des membres ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin est déjà allocataire au titre des prestations familiales, il est également le bénéficiaire au titre de l'allocation de revenu de solidarité active. Dans le cas contraire, le bénéficiaire est celui qu'ils désignent d'un commun accord".
Le tribunal administratif de Grenoble avait néanmoins donné raison à Mme A... B..., en jugeant que le fait que son concubin exerçait une activité de travailleur indépendant et qu'il avait réalisé un chiffre d'affaires excédant celui prévu par le CASF "n'était pas de nature à exclure la requérante du bénéfice du revenu de solidarité active".
Le Conseil d'Etat estime au contraire que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en ne prenant pas en considération les dits revenus du concubin. En effet, les dispositions du CASF fixant les conditions dans lesquelles un travailleur relevant du RSI peut bénéficier du RSA "doivent nécessairement être comprises comme visant tant le bénéficiaire lui-même que son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin faisant partie du foyer".
Quel sort réserver aux placements productifs d'intérêts ?
Le second arrêt (n°401637) porte sur un autre aspect de la prise en compte des revenus du foyer. En l'espèce, M. B... A... et Mme C... D... contestaient une décision du président du conseil départemental de l'Aude confirmant la récupération d'un indu de RSA. Cet indu avait été calculé en appliquant le taux de 3% - prévu par le CASF - aux sommes détenues par ceux-ci et par leur fils sur plusieurs livrets et plans d'épargne.
En l'espèce, le Conseil d'Etat donne raison aux requérants, en considérant que le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit en jugeant que l'administration était fondée à appliquer ce taux forfaitaire, alors que ces livrets et plans d'épargne étaient productifs d'intérêts, à un taux d'ailleurs inférieur à 3%. En effet, seules peuvent être évaluées sur la base forfaitaire prévue par le CASF les ressources que l'allocataire est supposé pouvoir retirer de biens non productifs de revenu. "Par suite, si les capitaux dont il dispose ont fait l'objet de placements productifs de revenus, seuls ces revenus peuvent être pris en compte, quand bien même le taux d'intérêt de ces placements serait inférieur aux taux d'évaluation du revenu procuré par les capitaux fixé par l'article R.132-1."
Références : Conseil d'Etat, arrêt n°398535 du 14 juin 2017, Mme A... B... / département de l'Isère ; arrêt n°401637 du 14 juin 2017, M. B... A... et Mme C... D... / département de l'Aude.