Lancement du "Printemps du numérique de centre-ville" pour aider les commerçants
Avec la crise sanitaire, le numérique est devenu incontournable pour les commerçants. Pour tenter de les aider à monter en puissance, Centre-Ville en mouvement lance le "Printemps du numérique en centre-ville", du 14 avril au 14 mai 2021. Durant cette période, l'association d'élus locaux et de parlementaires va questionner plus d'une quarantaine d'acteurs du centre-ville et du commerce pour aboutir à un livre blanc recensant les idées et propositions sur le sujet.
Du 14 avril au 14 mai 2021, Centre-Ville en mouvement va interroger plus d'une quarantaine d'acteurs du centre-ville et du commerce (fédérations, acteurs locaux, entreprises, collectivités) autour de la question du numérique pour les commerçants. Ces auditions donneront lieu à un livre blanc qui sera remis au gouvernement. Ce "Printemps du numérique en centre-ville" a été lancé le 14 avril 2021 dans le cadre d'un webinaire. Le principal enjeu : mieux intégrer le numérique dans les pratiques des commerçants de centre-ville, la crise sanitaire ayant évidemment confirmé le pouvoir de ce canal digital pour rester visible, développer son offre et ses parts de marché malgré les fermetures.
"Les contraintes imposées par la crise sanitaire ont montré à quel point la numérisation était totalement inégale sur les territoires et qu'il fallait produire un effort collectif de mise à niveau pour que la numérisation ne reste pas l'apanage de quelques grandes entreprises ou secteurs d'activité ; l'évolution des comportements de consommation est une tendance de fond, le confinement a mis en lumière la nécessité pour les commerçants d'être présents en ligne", a affirmé Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance, chargé des petites et moyennes entreprises, en ouverture de la conférence. En soulignant qu'il ne fallait pas opposer présence numérique et physique mais "penser la vente en ligne en complémentarité avec la présence physique en particulier dans les centres-villes".
No digital, no business !
Ces changements dans les modes de consommation ont été analysés par Jean Viard, directeur de recherche associé Science Po/CNRS. "Nous étions déjà à la fin de la société industrielle, là nous basculons dans une société numérique et écologique, nous sommes devenus compétents en numérique, même à l'intérieur des familles ; les commerçants étaient en retard, mais ils ont progressé", a résumé le sociologue.
Tous les acteurs s'accordent sur l'idée qu'il faut rattraper ce retard. "La numérisation des commerces est désormais incontournable, voire vitale, et le traditionnel 'no parking, no business' est devenu aujourd'hui 'no digital, no business' ", comme l'a souligné Vincent Ravat, directeur général de Mercialys, société experte dans la gestion, la transformation et la valorisation des centres commerciaux. "Cette transition n'est pas récente, elle s'annonce depuis plusieurs années, et on peut dire qu'on s'y est tous mis un peu trop tard, à commencer par les commerçants et notamment les indépendants", a-t-il ajouté, poursuivant : "La numérisation c'est un outil mais un outil qui n'a de sens en soi que s'il est intégré à une stratégie d'ensemble, à une nouvelle manière d'appréhender l'activité qui doit se concevoir comme si, en plus de la boutique en physique, en dur, on devait en gérer une seconde en ligne, avec sa propre visibilité, sa signalétique, son référencement produit adéquat et ses animations commerciales."
Et c'est bien là que les choses changent. S'ils poussaient auparavant les commerçants à se doter d'un site internet marchand ou à rejoindre des plateformes marchandes, les acteurs du centre-ville considèrent aujourd'hui qu'il leur faut aussi une stratégie, des compétences pour alimenter et animer ces pages, et des moyens financiers et humains. "Il faut créer du contenu sinon il n'y a pas de trafic", a insisté Renaud Sorre-Larregain, président de l'Observatoire du centre-ville : "Il faut donc un accompagnement des commerçants pour créer ce contenu. Dans les réseaux de franchise, il y a souvent un conseiller dédié à ces tâches pour dix magasins. C'est comme un tabouret avec trois pieds : la plateforme, le contenu et la communication (notification, marketing digital…). Si on n'a pas une vision d'ensemble, ça peut être de l'argent gaspillé."
L'aide numérique de 500 euros élargie à toutes les TPE
Plusieurs dispositifs sont en place pour aider les commerçants dans ce sens. Le gouvernement réserve notamment une enveloppe de 120 millions d'euros à la numérisation des TPE dans le cadre du plan de relance. Annoncée fin janvier 2021, une aide de 500 euros est ainsi prévue pour ces entreprises. Initialement réservée aux TPE fermées administrativement lors du second confinement et aux hôtels, et face à des sollicitations peu nombreuses, l'aide a été étendue le 12 avril à toutes les entreprises de moins de onze salariés, tous secteurs d'activité confondus et ce, jusqu'au 30 juin 2021. Ainsi, sur justification d'une ou plusieurs factures de dépenses de numérisation (site e-commerce, contenus en ligne, service de paiement en ligne, visibilité internet…) à hauteur de 450 euros et datées entre le 30 octobre 2020 et le 30 juin 2021, ces TPE peuvent bénéficier de cette aide.
"Est-ce qu'on pourra mutualiser ces sommes par exemple dans des fédérations de commerçants ? Est-ce que cet apport suffira pour avoir une vraie visibilité en ligne et couvrir les besoins de formation ?", a questionné Nadjoua Belhadef, adjointe au maire de Dijon, en charge du commerce et de l'artisanat. La ville n'a, comme d'autres collectivités, pas attendu le plan de relance et cette aide numérique pour aider les commerçants. Dijon a notamment créé une plateforme "Shop in Dijon" avec la fédération des commerçants locaux.
Le numérique pour gérer les stocks et les flux dans l'espace public
D'autres collectivités ont fait part de leurs initiatives, comme la ville de Cannes qui a recruté un community manager qui se déplace chez les commerçants pour les aider dans leur digitalisation, voire même les accompagner dans le remplissage des dossiers de financement. Pour sa part, Bayonne a mis en place durant la crise sanitaire un local dédié à tous les producteurs locaux, qui ont mutualisé les transports de marchandises, soulevant aussi la question de la logistique et du dernier kilomètre.
Mais au-delà de la visibilité et du chiffre d'affaires complémentaire qu'il peut générer, Alain Griset voit dans le numérique d'autres usages : une meilleure gestion des stocks, une analyse plus fine des marges, une amélioration des flux dans les espaces publics pour améliorer aussi l'expérience client… "Et l'exploitation de la trace numérique du visiteur dans une ville peut permettre d'affiner les stratégies d'implantations des services et des activités commerciales", a précisé le ministre, concluant que "collectivement, il y a encore pas mal de travail pour utiliser tous les atouts du numérique".
Le rapport de Centre-Ville en mouvement est prévu à l'issue du Printemps du numérique. Viendront ensuite les Universités d'été du centre-ville et du commerce, prévues les 6 et 7 juillet 2021.