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Aménagement numérique - L'Alsace lance son projet de RIP, qui pourrait s'étendre à la grande région

Validé fin 2015, le projet de réseau d'initiative publique (RIP) alsacien Rosace, fortement soutenu par le secteur privé, a été lancé le 21 avril dernier à Strasbourg. Suite à la création de la région Grand Est, Rosace pourrait servir de modèle de RIP régional pour lutter contre la fracture numérique et ouvrir de nouvelles opportunités économiques.

Avec le lancement du réseau d'initiative publique (RIP) alsacien Rosace, un nouveau mouvement en matière de très haut débit public pourrait être lancé. Le 21 avril dernier, Philippe Richert, président de la région Grand Est donnait le départ du réseau à Strasbourg. Avec près de 377.000 prises à construire en tranche ferme, ainsi qu'une tranche conditionnelle d'environ 100.000 prises, le tout, 100% FttH, Rosace apparaît comme le plus grand projet de RIP à ce jour. Pour le mener à bien, une délégation de service public (DSP) sur le modèle concessif – pour 30 ans – a été passée avec le groupement NGE/Altitude Infrastructure pour la conception, l'établissement, l'exploitation, la commercialisation et le financement du réseau. Un "choix courageux" pour Gabrielle Gauthey, directrice des investissements et du développement local de la Caisse des Dépôts, qui a insisté sur l'importance d'avoir des réseaux neutres, ouverts et mutualisés dans les territoires.

Un RIP contre la fracture numérique

Pour Philippe Richert, ce réseau est "le résultat d'une volonté et d'une vision à long terme de l'aménagement du territoire et du développement économique". "Résultat d'une longue maturation", le projet Rosace doit avant tout permettre d'éviter la fracture numérique. D'"apporter à chacun de nos territoires, aux particuliers comme aux entreprises, l'accès au très haut débit, pas un très haut débit transitoire, mais un très haut débit effectif et pérenne via la fibre". Grâce à Rosace, plus de la moitié de la population alsacienne (51%) devrait être couverte par la fibre d'ici 2022, notamment dans les zones les moins denses. Comme l'a expliqué le conseiller régional délégué au numérique François Werner, "la première fracture pour les territoires ruraux, c'est le numérique, avant même les routes et les transports en commun". La faiblesse des débits actuels complique la "vie de tous les jours", alors qu'entreprises et télétravailleurs connaissent "une très grande difficulté pour travailler". "Tout un chacun est pris en compte, et pas seulement la tête de locomotive", a expliqué François Werner, selon qui Rosace permettra de "retrouver une cohérence du territoire", de lui "redonner la possibilité de ré-entreprendre, de repartir vers l'avant".

Rosace au service du développement économique

Misant notamment sur l'industrie du futur, le président de la région Grand Est espère combler l'écart avec l'Allemagne, le Benelux ou encore les pays baltes en matière de numérique grâce à la fibre, "pour que de nouvelles activités économiques et finalement des emplois soient créés". "De toute façon nous n'avons pas le choix, le développement du numérique est une condition sine qua non de la réussite des entreprises", a-t-il ajouté. Une vision partagée par François Werner, pour qui "derrière le projet, il y a un espoir d'emplois directs, un espoir d'emplois induits, et de développement économique global". En creux, une politique d'investissement en berne qu'il s'agit de redynamiser. "Pour nous permettre de rattraper du retard et de nous projeter dans le futur", a précisé le président de la grande région, avant d'avancer le chiffre de 10 milliards d'euros d'investissements dans l'innovation par les Länder allemands, contre 600 millions pour les régions françaises.

100% de la région Grand Est en 100% FttH ?

Porté avec les deux départements alsaciens du Haut-Rhin et Bas-Rhin, le projet pourrait être étendu aux territoires lorrains et ardennais-champenois et totaliser un million de prises. Soutenue par le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, inscrite dans le Pacte pour la ruralité pour la grande région signé le 25 janvier dernier, la construction d'un réseau public 100% FttH via une DSP concessive pour la région Grand Est pourrait être validée d'ici la fin de l'année. Pour un lancement des travaux en 2018. Hormis la Moselle dont le projet de RIP est déjà bien avancé, tous les départements se sont montrés intéressés selon Philippe Richert, qui doit réunir l'ensemble des présidents des conseils départementaux cette semaine. Une dynamique collective sur laquelle François Werner a insisté, précisant que "ça ne se décrète pas d'en haut", "il fallait que l'on engage une discussion avec l'ensemble des autres départements", et par extension des EPCI. Et d'ajouter que "sans le relais de l'Etat, la volonté commune ne pourrait pas aujourd'hui aboutir". En effet, 1,5 milliard d'euros serait potentiellement nécessaire pour couvrir toute la nouvelle région.

Financement, emploi, les partenaires privés fortement mobilisés

Pour Rosace, Philippe Richert a rappelé que près de 600 millions d'euros seront engagés sur la durée de la DSP, dont 450 millions d'euros en tranche ferme, répartis entre investisseurs publics et privés. Le 11 avril dernier, les actionnaires du projet (1) bouclaient leur part du financement de Rosace, à hauteur de 190 millions d'euros (60% des investissements). Contribuant à 40% du projet, les partenaires publics apporteront quant à eux 164 millions d'euros de financements, dont 50% seront pris en charge par l'Etat. A la fin des 30 ans, la collectivité récupérera le réseau en pleine propriété. Faisant de l'emploi local une des priorités, Philippe Richert a signé, en présence de tous les partenaires du réseau, une Charte pour l'emploi avec NGE afin de favoriser l'insertion professionnelle. Comme l'a souligné le président de Rosace Thierry Bodard, 15% des ETP (équivalent temps plein) seront pourvus dans le cadre de ce dispositif, soit 30 personnes environ. Autre point positif, la signature d'une convention pour la venue du premier fournisseur d'accès à internet sur Rosace : Vialis, basé à Colmar. David El Fassy, président d'Altitude Infrastructure, s'est montré confiant pour la commercialisation du réseau, au vu des volumes de prises, "si les grands opérateurs ne viennent pas sur Rosace, ils n'iront sur aucun autre RIP". Avant d'ajouter, "quand bien même ils ne seraient pas convaincus, de nombreux acteurs se développent" et "c'est la marque fibre qui va se vendre toute seule vers les usagers" – dont plus de 40% ont des débits inférieurs à 4 Mo/s.

Ivan Eve / EVS

(1) NGE Concessions (mandataire) (8%), Altitude Infrastructure (8%), Caisse des Dépôts (20%), Fonds Quaero Infrastructure (27%), Fonds Marguerite (37%)

 

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