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Citoyens - Laïcité et vivre-ensemble : comment font les maires des petites villes ?

Repas servis dans les cantines, crèche de Noël, port de signes religieux dans les services publics, carrés confessionnels dans les cimetières... sur toutes ces questions, l'Association des petites villes de France a interrogé 180 édiles. Elle livre son diagnostic.

Repas "sans porc" à la cantine, port du voile par des agents publics, demandes de certains usagers guidées par des motifs religieux… la question de la laïcité suscite régulièrement des débats très médiatisés. Pourtant, les problèmes ne sont pas si fréquents et le principe est appliqué de manière "apaisée", en tout cas dans les petites villes. C'est la conclusion à laquelle l'Association des petites villes de France (APVF) parvient dans une enquête qu'elle remettra à la ministre de l'Education nationale lors de ses assises qui auront lieu les 18 et 19 juin à Paimpol.
Réalisée à partir des réponses de 180 maires de petites villes, l'étude révèle que les problèmes de laïcité demeurent limités dans ces communes. Ainsi, seuls 11% des élus interrogés déclarent avoir été saisis de "problématiques liées au port de signes religieux dans des établissements publics". Sur la question du port de signes religieux par les agents municipaux, seuls 4% des élus des petites villes ont pu constater une infraction à la règle de neutralité. La même proportion d'élus déclare avoir été confrontée à "des demandes d'adaptation de l'emploi du temps des agents en raison de motifs religieux". Le principe de laïcité semble avoir été "acquis et compris" par les agents publics, en déduit l'APVF.

Cantines : une majorité des petites villes offrent du choix

La très grande majorité des élus est attachée au principe de neutralité confessionnelle et s'emploie à le faire respecter par les élèves (plus de 82%), comme par les agents (86%). S'agissant du port de signe religieux par des parents ou des adultes accompagnant les enfants dans le cadre de sorties scolaires, près de 33% des élus déclarent accepter cette possibilité. Ils ne font qu'utiliser la liberté que leur laisse la réglementation dans ce domaine.
A l'inverse, 8% des élus ont accepté que la collectivité mette une salle à la disposition gratuite d'une association pour l'exercice d'un culte, alors qu'ils auraient dû exiger un paiement. En outre, la proportion des élus qui font installer une crèche de Noël dans l'enceinte de la mairie (une attitude sur laquelle la jurisprudence est partagée) tombe à 5%.
Une part non négligeable d'élus se montre sensible aux souhaits exprimés par des usagers pour des motifs confessionnels. C'est le cas pour les repas pris par les élèves à la cantine. Ainsi, la majorité des petites villes proposent une alternative à un plat (le porc le plus souvent) dès que sa consommation est prohibée par des pratiques confessionnelles. Sur cette question d'ailleurs, malgré les débats de ce début d'année, les élus semblent s'être fait une religion : ils ne reviendront pas sur la pratique de la collectivité. Pourtant, les cantines scolaires n'ont aucune obligation de proposer un plat de substitution quand le menu prévoit un aliment dont la consommation est proscrite par certaines religions.

Education à la laïcité : les élus veulent agir

Autre question sur laquelle les édiles se montrent sensibles aux demandes des usagers : la création de carrés confessionnels. 57% des maires des petites villes ont déjà répondu favorablement à ce type de demande. Il est vrai que les gouvernements successifs ont encouragé cette pratique par voie de circulaire.
Les élus des petites villes sont soucieux de favoriser l'apprentissage par les plus jeunes de la laïcité et des valeurs qui s'y rattachent. Ils le sont davantage encore depuis les attentats de janvier dernier. 47% d'entre eux souhaitent ainsi organiser, dans le cadre des activités périscolaires, une ou des séances visant à lutter contre le racisme et l'antisémitisme et 50% ont le désir d'organiser des temps pédagogiques pour expliquer la notion de liberté d'expression.
Signe que la laïcité n'est pas un terrain en friche, l'APVF dit avoir constaté "l'émergence de nombreuses initiatives permettant de renforcer le tissu social local". Elle en décrit quelques-unes en complément de son enquête, comme le conseil du vivre-ensemble à Valbonne Sophia Antipolis ou le conseil de la laïcité et du vivre-ensemble créé par la ville de Saint-Jean-de-la-Ruelle. Mais ces initiatives demeurent minoritaires : seulement 10% des petites villes de l'échantillon ont mis en place une instance de concertation dédiée à la laïcité ou au vivre-ensemble.