Territoires - L'agriculture s'invite dans le projet de loi Montagne
C'est ce vendredi 23 septembre que les amendements au projet de loi "de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne" doivent être déposés avant le début de son examen, le 27 septembre, par la commission des affaires économiques de l'Assemblée. Or, lors de son audition par cette même commission, le 21 septembre, le ministre de l'Aménagement du territoire, des Collectivités territoriales et de la Ruralité, Jean-Michel Baylet, s'est montré ouvert à de premières améliorations.
Après les vives critiques formulées par le Cese qui, la semaine dernière, relevait de grandes lacunes (voir ci-contre notre article), Jean-Michel Baylet a tout d'abord tenu à rappeler devant les députés que le texte "ne résume pas à lui seul la politique du gouvernement en faveur de la montagne" et qu'il s'inscrit dans une feuille de route de 2015 dont nombre de mesures sont du domaine réglementaire. Le projet de loi "vient compléter la loi de 1985 qui reste en vigueur", a-t-il aussi souligné.
Répondant à la députée Annie Genevard (LR, Doubs), co-rapporteur du texte avec Bernadette Laclais (PS, Savoie)*, qui regrettait l'absence de mesures spécifiques à l'agriculture, le ministre a assuré être "prêt à inscrire dans la loi la réaffirmation du principe de compensation de handicap". La députée du Doubs faisait remarquer que, si la compensation du handicap était au cœur de la loi de 1985, on est progressivement passé à "l'idée de la valorisation de ce que la montagne apporte à la nation", délaissant un peu ce principe de base. "On ne peut pas oublier la compensation du handicap", a-t-elle martelé, évoquant notamment les surcoûts liés aux bâtiments d'élevage. Ce à quoi le ministre a répliqué que l'indemnisation compensatoire de handicap naturel (ICHN) allait augmenter de 300 millions d'euros entre 2014-2020. "La montagne est la grande gagnante de la réforme de la PAC", a-t-il assuré.
La compensation de handicap en question
Le ministre a aussi été interpellé sur la question des services et de l'école. "Je suis prêt à introduire une disposition spécifique à l'article 3" (qui précise les politiques publiques devant être adaptées à la "spécificité de la montagne", ndlr), a-t-il déclaré. Il s'agirait d'introduire une spécificité montagne dans les conventions de ruralité. Le ministère de l'Aménagement du territoire travaillerait avec celui de l'Education nationale en vue d'une circulaire sur le sujet. "Nous verrons comment l'intégrer" au projet de loi, a-t-il précisé.
Concernant la rénovation des résidences de tourisme, Jean-Michel Baylet a indiqué qu'une disposition figurerait dans le projet de loi de finances qui sera présenté la semaine prochaine en conseil des ministres "pour que le niveau d'aide fiscale soit suffisamment incitatif". "Il est acté que le Censi-Bouvard [qui permet de bénéficier d'une réduction d'impôt de 11% en cas d'acquisition d'une résidence de service type résidence de tourisme, ndlr] évoluera", a-t-il déclaré, se refusant à en dire plus vis-à-à-vis de Bercy.
Un décret pour les agriculteurs pluriactifs
Le ministre espère toujours une adoption avant la fin de l'année ; ses services travaillent déjà aux décrets d'application, a-t-il dit. Du côté de la Haute Assemblée, le texte est déjà dans les esprits. "Je me réjouis d'un Acte II de la loi Montagne", s'est ainsi réjoui le sénateur du Cantal Bernard Delcros (UDI), le 21 septembre, à l'occasion de la présentation de son rapport sur l'avenir du Fnadt (sur le sujet lire notre article du 22 septembre 2016). Mais "la montagne ne peut pas se résumer à quelques stations bien connues". "Il faut renforcer les mesures en faveur de la moyenne montagne, notamment dans le domaine de l'agriculture", a-t-il développé, dans le droit fil du Cese et des députés. "L'agriculture n'a pas pris le virage au bon moment, elle est parfois sur un modèle agricole banalisé, sans valeur ajoutée, avec un coût de production supérieur à d'autres régions", estime le sénateur. Il faut selon lui promouvoir des "productions et filières donnant davantage de valeur ajoutée".
Preuve en tout cas que la loi n'est pas faite pour tout régler, un décret sera pris "dans les prochains jours" pour améliorer les conditions de vie des agriculteurs de montagne qui ont une autre activité pendant la saison hivernale. C'est ce qu'a annoncé le ministère de l'Agriculture, le 22 septembre. Les agriculteurs de montagne associés à un Gaec pourront ainsi exercer une autre activité dans la limite de 700 heures contre 536 actuellement.
Michel Tendil
* Les deux députées sont les auteurs du rapport sur "l'Acte II de la loi Montagne" remis au Premier ministre le 3 septembre, rapport qui a en partie inspiré le projet de loi.