Carte judiciaire - La suppression des juridictions de proximité reportée de deux ans
La proposition de loi de Jean-Pierre Sueur, visant à reporter au 1er janvier 2015 la suppression des juridictions de proximité, initialement prévue pour 2013, a été adoptée le 12 décembre 2012 par l'Assemblée nationale, à la suite du Sénat. Cette suppression avait été décidée en 2011, dans la continuité du rapport de la commission sur la répartition des contentieux, présidée par Serge Guinchard. Elle a été actée dans la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles. Les juridictions de proximité ont été créées par la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002. Leur rôle : statuer sur les petits litiges de la vie quotidienne, tant en matière civile que pénale. Le dispositif a été complété par la loi organique du 26 février 2003 relative aux juges de proximité et par la loi du 26 janvier 2005 relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance.
Actuellement, 460 juges de proximité sont en exercice, contre 672 en 2011. Ces juges, qui sont nommés pour sept ans, sont soumis à une formation initiale. Ils exercent leur fonction à temps partiel et perçoivent une indemnité de vacation. Mais d'après les conclusions de la commission Guinchard, ces juridictions ont rendu l'organisation judiciaire plus confuse et moins lisible. "La répartition de principe des compétences civiles entre le tribunal de grande instance, le tribunal d'instance et, depuis peu, le juge de proximité, a perdu de sa pertinence, signalait ainsi le rapport Guinchard, elle est devenue trop complexe et ne correspond plus à la situation actuelle." La commission avait donc proposé d'intégrer les juridictions de proximité dans les tribunaux d'instance et de rattacher les juges de proximité, qui, eux, perdurent, aux tribunaux de grande instance.
60 emplois de juges d'instance nécessaires
La proposition de loi adoptée le 12 décembre ne préconise pas d'arrêter le processus, mais de le reporter de deux ans pour permettre à la justice de s'organiser. Les anciennes compétences des juridictions de proximité doivent être prises en charge par les juges des tribunaux d'instance. "Cette réforme aurait nécessité pour sa mise en œuvre dans de bonnes conditions la création de 60 emplois de juges d'instance afin qu'ils assument la charge de travail aujourd'hui assumée par les juges de proximité, création qui n'a pas été effective", indique ainsi l'exposé des motifs du texte.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013, 142 postes de magistrats sont prévus, dont 50 seront affectés à l'instance. Mais ces juges devant être formés, ils n'entreront en fonction qu'à compter du 1er janvier 2015. C'est pourquoi la proposition de loi préconise de reporter la suppression des juridictions de proximité à cette date. Ce report pourrait aussi permettre de mener une réflexion plus globale sur la réforme de la carte judiciaire. Une réflexion qui fait partie des conclusions du rapport d'information sur le bilan de la réforme de la carte judiciaire de Nicole Borvo Cohen-Seat et Yves Détraigne publié le 11 juillet 2012. Ce rapport fait état d'une "occasion manquée" et d'une méthode "contestable". Il appelle à une réflexion sur la réforme de l'organisation judiciaire pour garantir l'accès à la justice.
Emilie Zapalski
Références : loi n°2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles ; loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice ; Loi organique n°2003-153 du 26 février 2003 relative aux juges de proximité ; loi n°2005-47 du 26 janvier 2005 relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance ; proposition de loi de Jean-Pierre Sueur relative aux juridictions de proximité.