La rénovation des logements se fera-t-elle aux dépens des recettes fiscales locales ?
C'est en tout cas ce que redoute l'Association des maires de France (AMF). Qui l'a fait savoir ce 5 décembre dans un communiqué, en lien avec deux dispositions figurant dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024.
L'AMF constate d'une part que "les travaux de rénovation lourde des logements sociaux, dans le parc ancien, ouvriront le droit à de nouvelles exonérations de taxe foncière de longue durée". L'article 6 du PLF prévoit en effet une nouvelle exonération de taxe foncière de 25 ans pour les logements sociaux achevés depuis au moins 40 ans, à condition que ces travaux permettent une amélioration sensible de la performance énergétique et environnementale et le respect d’un certain nombre de normes. Sous ces conditions, cette exonération serait de droit et ne serait pas compensée aux communes et aux intercommunalités. Une disposition qui s'inscrit dans le cadre du projet "seconde vie" de l'habitat social et concerne donc des rénovations ambitieuses et coûteuses.
Le Sénat a certes adopté un amendement proposant de transformer cette exonération de TFPB en dégrèvement. Ceci afin d’"assurer la compensation à l’euro près du coût du dispositif pour les collectivités" puisque "dans le cas d’un dégrèvement d’impôts locaux, le manque à gagner pour les collectivités est en effet intégralement compensé et pris en charge par l’État". Sauf que cet amendement a été adopté contre l'avis du gouvernement… et risque donc de passer à la trappe dès le retour du PLF en seconde lecture à l'Assemblée et un probable nouveau 49.3.
Autre disposition du PLF pointée par l'AMF, cette fois pour le parc privé : la possibilité pour les propriétaires réalisant des travaux améliorant la performance énergétique de leur logement de disposer de nouvelles exonérations de taxe foncière de courte durée, sur décision de la collectivité (article 27 sexies). Lors du passage du PLF à l'Assemblée, le gouvernement avait de surcroît transformé ces exonérations facultatives de TFPB en exonérations de droit (tout en laissant la faculté aux collectivités concernées de les limiter ou de les supprimer). Le Sénat a toutefois réintroduit le caractère facultatif, sans cette fois que le gouvernement s'y oppose.
Pour l'association, "l’effet pervers de ce type de mesure est connu" : "Plus le parc de logements d’une commune est vieillissant, plus il est composé d’habitat social, plus la commune est pénalisée financièrement par ces exonérations". Or, poursuit l'AMF, "on ne peut pas en même temps espérer massifier le nombre de rénovations et sanctionner financièrement les communes qui portent ces programmes de rénovation. Les communes qui s’engagent dans ces programmes devraient au contraire y être incitées financièrement". Le gouvernement serait donc en train de toucher à la taxe foncière "sans en mesurer pleinement les conséquences". Et aurait, ironise l'AMF, "trouvé la parade" pour "financer sa politique du logement en crise sans rien dépenser".