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Sport - La proposition de loi sur l'éthique dans le sport adoptée au pas de course

Pour cause de calendrier, la proposition de loi Collin a été votée conforme par les députés. Exit, donc, deux amendements intéressant les élus locaux. L'un sur la question des subventions des collectivités aux clubs professionnels, l'autre sur l'encadrement du pouvoir délégué aux fédérations sportives en matière de normes d'équipements et d'installations.

C'est sans modification que l'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs, déjà votée au Sénat le 30 mai 2011. Sans modification et sans tarder. Les débats étaient en effet prévus pour durer deux jours, les 18 et 19 janvier. Or, dans la nuit du 18 janvier, le texte était définitivement adopté par les députés. Une précipitation due à l'encombrement des travaux parlementaires avant les prochaines échéances électorales. "J'aurais aimé, comme beaucoup d'entre vous, enrichir ce texte d'autres dispositions. Cependant, compte tenu du calendrier législatif, il ne sera pas possible d'obtenir un deuxième vote au Sénat d'ici la fin de la législature", a justifié David Douillet, ministre des Sports, pour demander un vote conforme aux députés. Les dizaines d'amendements déposés dans les jours précédents ont donc été retirés ou rejetés. Parmi ces propositions, deux intéressaient très directement les collectivités territoriales et faisaient écho à des préoccupations régulièrement mises en avant par celles-ci, ce qui aurait pu leur valoir un meilleur sort : la question des subventions aux clubs professionnels et celles des normes fédérales.
Un amendement du député de Paris Jean-François Lamour (UMP) proposait ainsi que les chartes éthiques établies par chaque fédération sportive (objet de l'article 1er de la proposition de loi) puissent contenir des dispositions relatives "au montant maximal, relatif et absolu, des aides en investissement et en fonctionnement versées aux sociétés sportives par les collectivités territoriales" (lire notre article du 13 janvier ci-contre). "Par mon amendement […], j'ai tenu à relever la grave disproportion entre le budget des clubs professionnels et les subventions qui leur sont versées par les collectivités territoriales. Mon avis est qu'un club prêt à salarier un joueur plusieurs centaines de milliers d'euros par mois n'a pas besoin de bénéficier d'argent venant de la collectivité", a expliqué Jean-François Lamour, avant d'aller plus loin : "Les investissements nécessaires à la construction d'équipements dédiés au sport professionnel semblent également de moins en moins compatibles avec une bonne gestion de la collectivité." "Certains [amendements] auraient mérité de figurer dans le texte, comme celui de Jean-François Lamour […]. Cet amendement est intéressant, même si des limitations existent déjà et que ce n'est pas aux fédérations d'imposer des limites aux collectivités", a commenté David Douillet. L'amendement a été retiré mais le sujet reste d'actualité…

L'amendement AMGVF sur les normes rejeté

L'amendement défendu par Valérie Fourneyron, députée-maire (PS) de Rouen et par ailleurs chargée du sport à l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) a, lui, bien été maintenu avant d'être rejeté par les députés. L'association avait annoncé le dépôt d'un amendement dans le cadre de l'examen de cette proposition de loi (lire notre article du 18 juillet 2011 ci-contre) pour mieux encadrer le pouvoir délégué aux fédérations sportives en matière de normes d'équipements et d'installations. Son texte prévoyait que "lorsqu'il s'avère qu'un projet de règlement, soumis à la Commission d'examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs [Cerfres, NDLR], a des conséquences financières pour les propriétaires ou pour les maîtres d'ouvrage, l'approbation du ministre chargé des Sports est requis avant son entrée en vigueur". Dans l'exposé des motifs, les députés dépositaires de l'amendement expliquaient qu'"alors que l'on sait que la maîtrise de leurs charges budgétaires est une priorité partagée par l'ensemble des collectivités, force est de constater que ce souci se trouve contrarié par les exigences croissantes des fédérations sportives, dont la tendance 'réglementariste' s'avère grandissante". Ils ajoutaient que leur amendement avait "pour objectif de stopper la pression des fédérations sportives, dont les objectifs poursuivis (valorisation commerciale des événements, notamment) s'avèrent de plus en plus éloignés des objectifs de sécurité, de salubrité et d'hygiène ayant justifié les prérogatives de puissance publique qui leur ont été confiées". Selon eux toujours, "cet amendement traduit le voeu exprimé, à l'unanimité des élus présents, lors de la séance du 8 novembre 2011 du Comité des finances locales, selon lequel, nonobstant le rôle positif de la Cerfres, il est indispensable de modifier le Code du sport afin que la puissance publique puisse retrouver ses prérogatives en cas d'incidence financière" (lire ci-contre notre article du 10 novembre 2011).
Finalement votée conforme par l'Assemblée nationale, la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs contient 32 articles répartis en quatre titres : respect des valeurs du sport (où l'on trouve des dispositions renforçant le rôle des fédérations à l'égard des clubs, ce qui touchera indirectement les collectivités territoriales) ; développement du sport/formation et droits des sportifs ; protection de la santé des sportifs et lutte contre le dopage ; dispositions diverses. "Ce n'est certes pas la grande loi d'orientation sur le sport que nous aurions pu souhaiter", a commenté Michèle Tabarot, présidente de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée. Mais il fallait apparemment faire vite. "Etre utile pour un député, ce n'est pas forcément amender", a ainsi admis Eric Berdoati, rapporteur du texte, en parfait coéquipier de David Douillet.

Jean Damien Lesay

Référence : proposition de loi d'Yvon Collin visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs, adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 18 janvier 2012.