Grenelle 2 - La prévention des risques et des pollutions se précise
Durant l'examen les 2 et 3 février du titre III du projet de loi Grenelle 2 relatif à l'énergie et au climat, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a adopté de nombreux amendements (voir notre article ci-contre). Ce à quoi s'ajoute un remaniement de l'article 27 en vue d'étendre au secteur agricole l'application des certificats d'économies d'énergie, et ce en cohésion avec l'objectif d'optimisation de la performance énergétiques des installations agricoles, tel qu'il a été réaffirmé dans le cadre du plan de relance de l'économie. "De par les ressources en biomasse qu'il peut mobiliser, ce secteur a un fort potentiel de production d'énergie thermique", ont justifié les défenseurs de cet amendement.
Par ailleurs, le rapporteur et député de la Loire-Atlantique Serge Poignant a fait rétablir une précédente version du texte en modifiant l'article 30 sur la procédure de classement des réseaux urbains de chaleur. Cet article visant à l'alléger, il a fait supprimer la nécessité préalable d'enquête publique. Charge donc à la collectivité de structurer la concertation et de décider ou non du classement du réseau. Sur un autre enjeu à suivre de près, la possibilité à terme d'injecter du bio-méthane dans le réseau de gaz naturel, des membres de cette commission ont choisi de préparer le terrain et complété l'article 35 afin de prévoir une obligation d'achat en vue de soutenir et d'encadrer à terme cette pratique.
Préserver l'eau des phytos
Un amendement à l'article 38 clarifie dans les départements d'outre-mer le rôle des offices de l'eau qui leur sont rattachés. Au même titre que les agences de l'eau, ces offices reverseront désormais une part de la redevance pouvant être imposée sur les pollutions diffuses à l'Onema en vue de financer le plan Ecophyto 2018. Pour encourager les particuliers à réduire l'usage des pesticides, les députés centristes proposent d'aller plus que loin que ce que préconisent les sénateurs et ont dans ce sens amendé l'article 40 pour mieux encadrer la publicité sur ces produits. Serge Poignant a aussi fait préciser les zones prioritairement concernées par l'interdiction d'application de ces produits, à savoir celles "fréquentées par le grand public ou des groupes de personnes vulnérables", notamment les parcs, jardins publics, terrains de sport, enceintes scolaires, etc. Un amendement présenté par le gouvernement renforce les étapes d'évaluation des risques propres au recours à certains macro-organismes dans le cadre de la lutte biologique.
Plus de lisibilité et un nouveau périmètre pour les PPRT
Lors de l'examen en fin de semaine dernière du titre V du projet de loi par la commission du développement durable, des amendements ont été adoptés sur les volets relatifs à la santé et aux déchets (voir notre article ci-contre). Mais d'autres l'ont été sur un volet intéressant tout autant les collectivités, celui de la gestion et de la prévention des risques. Un article a ainsi été ajouté à l'article 81 pour imposer, lors d'une modification d'un site Seveso, la tenue d'une réunion publique à l'occasion de l'enquête publique réalisée. A deux reprises, le gouvernement a amendé le texte au sujet des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Le périmètre des installations concernées par l'établissement de ces plans a été réduit et, selon le gouvernement, ainsi clarifié. Seules seraient désormais concernées les installations antérieures à la date de publication de la loi risques du 30 juillet 2003, "pour autant que leurs caractéristiques à cette date, mais aussi au moment des décisions de prescription et d'approbation du PPRT justifient la réalisation d'un tel plan". Durant sa phase d'élaboration, dans un intérêt administratif mais aussi de lisibilité pour les acteurs locaux, il a été choisi de mieux intégrer les étapes d'approbation des mesures entre autres foncières qu'il comporte. Des travaux pouvant être prescrits par les autorités publiques dans le cadre d'un tel plan, un crédit d'impôt est proposé au contribuable au titre des dépenses effectuées pour réduire la vulnérabilité de son habitation. Le plafond de dépense est fixé à 30.000 euros et le crédit d'impôt à 40% du montant des dépenses. Adopté à l'unanimité, cet amendement vise à réduire le lot d'injustices observées à proximité des installations industrielles concernées, où les particuliers sont contraints de réaliser des travaux avec une faible aide de l'Etat.
Dans les zones où il est prévu un droit de délaissement, il a été opté qu'une copropriété peut faire jouer ce droit si elle en décide aux deux tiers des voix, cette décision ouvrant la possibilité pour le préfet d'entamer une démarche d'expropriation de l'ensemble de la copropriété.
Concernant les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), la commission a ratifié l'ordonnance gouvernementale visant à créer un régime faisant polémique et dit "d'autorisation simplifiée".
Affiner les outils de prévention des risques
Sur amendement à l'article 81 du texte, le gouvernement complète un chapitre du Code de l'environnement portant sur l'évaluation et la gestion des risques d'inondation. Il précise en la matière le contenu de la stratégie nationale et le processus de sélection des "territoires à risque". Les collectivités sont bien sûr concernées puisqu'elles et leurs groupements "concourent à la gestion de ces risques". L'amendement renforce ainsi l'articulation entre les plans de gestion des risques "mis à jour tous les six ans" et les stratégies locales qui doivent les décliner. Ces stratégies sont "élaborées conjointement par les parties intéressées", au premier rang desquelles figurent les collectivités pour les volets d'évaluation préliminaire des risques et pour les cartes à établir. La compatibilité de ces plans avec, entre autres, les schémas de cohérence territoriale (Scot) et les plans locaux d'urbanisme sont précisées par l'article.
Enfin, en appui aux communes et maîtres d'ouvrages rencontrant des difficultés à boucler les diagnostics de risques parasismiques (en premier lieu dans les écoles primaires publiques), le niveau de financement couvert par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs a été légèrement augmenté sur amendement du gouvernement.
Morgan Boëdec / Victoires-Editions