La nouvelle Arcom face au défi de la régulation des plateformes
En place depuis le 1er janvier 2022, la nouvelle Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) voit ses missions élargies à la régulation des plateformes numériques et des réseaux sociaux. Une tâche qui s’ajoute aux missions historiques du CSA et de l’Hadopi que la nouvelle autorité devra assurer à effectif constant.
Adieu le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi). Ces deux structures ont fusionné le 1er janvier 2022 pour devenir l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) comme l’a prévu la loi relative à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique du 25 octobre 2021. Comme l’affiche son site internet cette nouvelle autorité administrative indépendante a vocation à être "le garant de la liberté de communication, et de veiller à ce que les médias audiovisuels et numériques soient pluralistes et respectueux de toutes et tous".
Des missions élargies à tous les contenus numériques
En pratique, la nouvelle autorité reprend les anciennes missions du CSA et de l’Hadopi : la régulation économique des médias audiovisuels, la gestion des fréquences de la TNT (dont les télévisions locales), la lutte contre le piratage (avec les mails d’avertissement de la fameuse riposte graduée), la promotion de l’offre légale, le contrôle du pluralisme dans les médias et l’élaboration de statistiques sur ses domaines de compétence. Mais la nouvelle entité voit désormais son champ d’action considérablement étendu car "en trois ans, sept textes de loi ont élargi nos attributions pour mieux épouser les enjeux audiovisuels de son temps, en tenant compte des plates-formes de streaming et des grands acteurs du numérique" explique au journal le Monde Roch-Olivier Maistre, l’ancien président du CSA désormais à la tête de ce super régulateur des contenus numériques.
Un nouveau modèle de régulation à inventer
L’Arcom se voit en effet confier la régulation des plateformes internet, telles que "les plateformes de partage de vidéo, les réseaux sociaux, les moteurs de recherche, les agrégateurs et les magasins d’application". Cette régulation d’Apple, Facebook, Google, Netflix, Twitter et autres TikTok – et plus généralement de tout site comptabilisant plus de 5 millions de visites uniques par mois – ciblera plus particulièrement la lutte contre les fausses informations et la haine en ligne. Des enjeux pour lesquels il faudra inventer "un nouveau modèle basé sur un régime de responsabilité", concède le nouveau président de l’Arcom. En d’autres termes, pas question d’intervenir pour chaque contenu litigieux comme pour les chaines audiovisuelles, les plateformes étant soumises à des "obligations de moyens" tels que des mécanismes de signalement, des possibilités de recours et la tenue de statistiques sur leurs actions. Et si elles ne les respectent pas, la nouvelle autorité pourra leur infliger une amende pouvant aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires mondial ou encore 20 millions d’euros. Ces missions de lutte contre la haine en ligne devraient cependant être transférées à Bruxelles d’ici deux ans avec l’entrée en vigueur du Digital Service Act, un règlement européen au programme de la présidence française de l’Union européenne.
Pas de moyens supplémentaires
Pour exercer ces nouvelles missions, l’Arcom devra pour le moment se contenter de l’addition des personnels du CSA et de l’Hadopi, soit 355 salariés avec un budget de 46,6 millions d’euros. Des moyens que son président espère augmenter à l’occasion de la loi de finances pour 2023 avec "une dizaine d’embauches supplémentaires". Le collège de la nouvelle autorité est aussi renforcé, passant de sept sièges à neuf avec l’arrivée de deux membres issus du Conseil d’État et de la Cour de cassation. Les modalités d’actions de l’Arcom vont également évoluer avec la mise à jour de listes de sites portant atteinte "de manière grave et répétée au droit d'auteur et aux droits voisins", l’autorité n’ayant plus à saisir la justice pour les bloquer. Cette liste noire sera transmise aux fournisseurs d’accès à internet et aux moteurs de recherche qui auront obligation de les bloquer ou les déréférencer. En 2022, la nouvelle autorité va cependant être très occupée par une des missions historiques du CSA : la régulation des temps de paroles des candidats à l’élection présidentielle.