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CPER - La mobilité et l'enseignement : les grands gagnants de la "revoyure" des contrats de plan

La phase de revoyure des contrats de plan Etat-région (CPER) est bientôt terminée et se déroule sans problème, d'après Régions de France. Dans ce cadre, l'Etat a remis sur la table plusieurs dizaines de millions d'euros principalement sur la mobilité et l'enseignement supérieur. Mais la vraie révision, programmée à mi-parcours, c'est-à-dire en 2017, interviendra quand la France devra ramener son déficit public à 3% du PIB. Une étape-clé qui fait craindre un désengagement de l'Etat.

La signature des avenants aux contrats de plan Etat-région (CPER) se sera déroulée sans anicroche. "La démarche est en train de se terminer, assure ainsi Régions de France, il n'y a pas de situation de blocage." "Les avenants ont été signés dans les régions Centre-Val de Loire, Grand Est, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Normandie notamment, précise de son côté le Commissariat général à l'égalité des territoires (Cget). Les négociations sont finalisées dans l'ensemble des régions. La plupart des avenants ont été approuvés à l'occasion des sessions de novembre et de décembre des assemblées régionales. Ils seront donc signés début 2017."
Cette clause de revoyure avait été prévue dès le départ dans le cadre de la signature des CPER en 2015. Le but était de prendre en compte les nouveaux périmètres des régions et leurs nouvelles compétences issuse de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notr). "La clause de revoyure est faite en conformité avec les engagements de Manuel Valls dans le cadre de l'Acte II de la plateforme Etat-régions signée en juin 2016", affirme-t-on à Régions de France. Dans le cadre de cette plateforme, l'Etat s'était ainsi engagé à fournir un effort financier supplémentaire, notamment en matière de mobilité et d'enseignement supérieur. Si le montant total des rallonges accordées par l'Etat n'est pas affiché - Régions de France ne souhaitant pas provoquer de surenchères -, l'association se dit "plutôt satisfaite" des négociations. "Certaines régions ont négocié des augmentations importantes, signale-t-elle, l'Etat a lâché quelques dizaines de millions d'euros."

L'attribution de nouvelles enveloppes dans le cadre de la révision s'est faite "sur la base de l'analyse des opérations contractualisées en tenant compte des spécificités de chacune des régions : certains plans de financement ont ainsi été revus et complétés", précise le CGET. Quelques opérations nouvelles ont été ajoutées pour tenir compte des engagements pris par le gouvernement (contournement ferroviaire de la raffinerie de Donges en Loire-Atlantique par exemple) et d'une évolution des priorités de certains exécutifs régionaux élus l'an dernier. "La révision a également permis, dans les nouvelles régions fusionnées, de mutualiser certaines lignes de financement prévues dans les CPER initiaux, et d'introduire des opérations importantes pour la cohésion de la nouvelle région", poursuit le CGET. Initialement, les contrats représentaient 30 milliards d'euros, avec 27 milliards d'euros supplémentaires issus des fonds structurels européens. L'Etat devait mobiliser 14,3 milliards d'euros, les régions 15,2 milliards et les collectivités infrarégionales 900 millions.

Principales révisions sur la mobilité et l'enseignement supérieur

Sept thématiques principales sont abordées dans les CPER : la mobilité multimodale, l'enseignement supérieur, la recherche et l'innovation, la transition écologique et énergétique, le numérique, l'innovation, les filières d'avenir, l'usine du futur, les territoires, et l'emploi. Auxquelles s'ajoute le volet territorial. La révision des contrats de plan porte principalement sur les volets mobilités et enseignement supérieur. Les partenaires régionaux ont ainsi respecté l'orientation qui avait été donnée par le Premier ministre", souligne le CGET. Dans les négociations pour la révision, côté enseignement supérieur, les petits couacs de départ se sont vite tassés, avec un déblocage rapide par l'Etat des budgets qui se faisaient attendre. Ces crédits supplémentaires sont aussi venus soutenir des projets culturels (monuments historiques, musées...) et des opérations d'aménagement : Ile de Nantes, canal du Midi par exemple.

Certaines régions ont profité de la revoyure pour orienter les fonds vers des thématiques particulières. Ainsi en Bretagne, la rallonge de 38 millions d'euros, financée à parité par l'Etat et la région, signée le 1er octobre 2016, sera destinée en grande partie (28 millions d'euros) à la revitalisation des centres-bourgs et des petites villes bretonnes qui souffrent de la désertification. En région Auvergne-Rhône-Alpes, une petite partie de la rallonge accordée par l'Etat (3 millions sur 31,7 millions) dans le cadre de l'avenant signé le 24 novembre est réservée pour l'investissement dans le thermalisme. 3,6 millions d'euros seront aussi engagés dans la rénovation du Centre de ressources d'expertise et de performance sportive (Creps) de Vallon-Pont-d'Arc. Mais la majeure partie (25 millions d'euros) est toutefois destinée à la mobilité (modernisation des petites lignes de chemin de fer et développement du réseau routier).
La région Nouvelle-Aquitaine a obtenu 27 millions d'euros supplémentaires de la part de l'Etat, principalement orientés vers la mobilité : mise à 2X2 voies de la RN141 sur les sections Exideuil-Roumazières-Chasseneuil en Charente et modernisation de la ligne ferroviaire Nantes-Bordeaux notamment.

En Normandie, la région a décidé de financer à elle seule, à hauteur de 4 millions d'euros, la réalisation d'études relatives au contournement sud de Gournay-en-Bray dans le cadre de l'adoption,  le 15 décembre, des avenants aux CPER normands. Le financement du projet de diffuseur de pépinières sur la RN 814-Boulevard périphérique de Caen a été revu à la baisse : l'Etat, le département du Calvados et Caen-la-Mer ont diminué leur contribution respective d'un million d'euros. Le coût de cette opération est désormais fixé à 8 millions d'euros. D'autre part, le coût de la reconversion du site Pétroplus a dû être réévalué suite à l'accélération du calendrier de réalisation. Le plan de financement est actualisé par déploiement et contribution complémentaire de la région, de la métropole et du grand port maritime de Rouen (7 millions dont 3 millions par redéploiement pour l'Etat, 4 millions dont un million par redéploiement de la région, 1,5 million de la métropole, 7,5 millions des autres financeurs dont le grand port maritime de Rouen). Enfin, le coût de la création d'un espace de restauration et de la vie étudiante sur la partie sud du campus du Havre a été réévalué. Ce coût est désormais fixé à 4 millions d'euros, le complément d'un million est pris en charge à parité par le Crous et la région. Au total, en ajoutant les plans de financement inchangés pour d'autres opérations, ces ajustements nécessitent pour la région de mobiliser des moyens financiers supplémentaires de 2,5 millions d'euros. La participation totale de la nouvelle région aux deux ex-CPER normands s'élève désormais à près de 565 millions.

Des crédits supplémentaires pour "répondre à l'urgence"

Dans la région Grand Est, l'avenant au CPER, signé le 2 décembre, prévoit une contribution supplémentaire de 80 millions d'euros qui s'ajoutent aux 2 milliards de crédits programmés. La région y contribue à hauteur de 50 millions d'euros et l'Etat à près de 30 millions. Cette somme est affectée au volet mobilité multimodale. Elle ne servira pas à financer de nouveaux projets mais plutôt à "répondre à l'urgence", comme l'explique François Charlier, adjoint au directeur général des services de la région Grand Est. Les projets concernés sont les suivants : l'achèvement de l'autoroute A304 dans les Ardennes, un des trois projets autoroutiers majeurs pour le territoire régional, la modernisation de la ligne Charleville-Givet, et la remise à niveau de lignes ferroviaires régionales de voyageurs.

"L'infrastructure est en très mauvais état et cela se dégrade très vite, détaille François Charlier, mais ce n'est qu'un pas." Le coût global pour la région atteindrait 350 millions d'euros. L'avenant prévoit, pour la remise à niveau, une enveloppe de 65 millions d'euros (20,7 millions de l'Etat, 35 millions de la région et 9,3 millions de SNCF Réseau) pour traiter les cas les plus urgents où les travaux devront intervenir avant 2020. Outre le volet mobilité, la revoyure a permis de redéfinir le programme immobilier de l'Urca (université de Reims Champagne-Ardenne) sur le campus de Reims. La région assurera désormais la maîtrise d'ouvrage globale de l'opération immobilière. "Nous prenons la maîtrise d'ouvrage car sinon cela ne bouge jamais. Ce projet est inscrit depuis 20 ans à la région !", signale François Charlier. 78,2 millions d'euros sont prévus pour ce projet, dont 14,3 millions de la part de l'Etat et 47,9 millions de la région. Mais ces modifications ne représentent que des ajustements et "maintenant nous allons nous lancer techniquement dans la véritable révision pour 2017, avec une revue des projets et une évaluation des CPER des régions qui ont fusionné", explique François Charlier.

2017, l'heure de vérité ?

Pour Régions de France, la révision des CPER à mi-parcours correspond aussi à une étape-clé. Au-delà de la revoyure actuelle, une véritable révision des CPER est ainsi prévue à mi-parcours, soit en 2017. Une date qui correspond aux échéances fixées par la Commission européenne en matière d'ajustement structurel budgétaire : la France devra ramener son déficit public à 3% du PIB. Régions de France craint qu'il manque quelques milliards d'euros pour rentrer dans les clous. "L'heure de vérité est bien fixée à l'automne 2017, avec l'ajustement structurel budgétaire de la France, l'Etat pourrait profiter de la révision des CPER pour revoir à la baisse un certain nombre d'engagements, retarder des opérations ou les étaler sur plusieurs années", craint l'association.