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Entrepreneuriat social - La France, championne du microcrédit en Europe ?

D'ici 2017, la France sera le premier pays bénéficiaire du concours du Fonds européen d'investissement pour les projets de création d'entreprises portés par les chômeurs démunis ou les salariés en reconversion.

Lancement d’un site de vente en ligne, création d’un restaurant, d’une brasserie artisanale ou d’une école de surf… Loin d’être l’apanage des pays émergents, le microcrédit devient une roue de secours précieuse en Europe.
La France n’est pas le pays le plus exposé à la crise (voir ci-contre), mais elle devient un vivier de micro-entrepreneurs, dont les sources de financement viennent de plus en plus de l’UE.

La France dans le peloton de tête

Situé à Luxembourg, le Fonds européen d’investissement (FEI) a appuyé les structures de microcrédit françaises (Adie, Crea-sol, Initiative France…) à hauteur de 28 millions d’euros entre 2011 et juin 2014. Le montant des contrats signés atteindra au minimum 68 millions d’euros en 2017, soit l’activité la plus importante devant la Roumanie (64 millions) et l’Espagne (59 millions).
Si la conjoncture dégradée favorise la reconversion des chômeurs, la France se démarque par l’existence d’opérateurs de poids bien installés dans le paysage.
L’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie), qui affiche 25 années d’expérience au compteur, se pose comme le leader du microcrédit en Europe et son activité s’étend au-delà des frontières de l’Hexagone.
En 2010, l’Adie a par exemple signé un contrat de joint-venture avec BNP Paribas Fortis et le Fonds européen d’investissement afin de lancer MicroStart, une entreprise belge de microfinance à vocation sociale.
"La microfinance n’est pas une affaire de PME. C’est une affaire de pauvreté", tranche le fondateur de MicroStart, Patrick Sapy, présent aux Open Days à Bruxelles le 7 octobre.
Au sein de sa structure, 29% des personnes suivies sont au chômage et 15% bénéficient d’aides sociales. Au total, 80% des inscrits vivent sous le seuil de pauvreté.
Pour ces exclus du circuit des banques, MicroStart offre donc une ultime bouée… de taille modeste. Le montant moyen accordé des prêts oscille autour de 5.000 euros. Dans l’écrasante majorité des cas (93%), les remboursements se font dans les temps. La part des impayés se limite à 2%. Mais le taux d’intérêt appliqué, qui atteint 8% à 9%, semble excessif.
"Pour les gens coupés du marché, l’accès est plus important que le taux d’intérêt", justifie Patrick Sapy, qui y voit aussi un moyen de couvrir une bonne partie des coûts de sa structure.
MicroStart bénéficie néanmoins de l’appui de fonds publics européens, tels que le Feder et le Fonds social européen, afin d’assurer une offre de formation aux demandeurs de microcrédit. La réglementation européenne donne la possibilité de les mettre au service de la microfinance, en les plaçant par exemple comme garanties.
"Mais, en région, les responsables se soucient plus de les utiliser comme subventions pour former les gens. Ils ne s’intéressent pas aux produits financiers", observe-t-il.
Un constat partagé par la filiale de la Banque européenne d’investissement, où l’on estime que "très peu de projets" impliquant les fonds structurels sont "liés à la microfinance".

Interruption de l’apport de fonds propres

Entre 2014 et 2020, grâce au programme européen Progress, 193 millions d’euros, dont 50 millions d’euros de garanties, seront mis à disposition de l’entrepreneuriat social et du microcrédit. Le FEI souhaite se concentrer sur l’octroi de prêts et de garanties, quitte à éclipser l’apport de fonds propres aux micro-entreprises, faute de trouver les relais nationaux adéquats pour réaliser les opérations.
Un appel à propositions devrait être publié d’ici la fin de l’année pour déployer l’instrument de garantie. Le lancement des prêts, plafonnés par l’UE à 25.000 euros par micro-entrepreneur, interviendra dans un second temps, au deuxième trimestre 2015.