Médicosocial - La disparition programmée de l'Anesm pose question
Comme Localtis l'indiquait lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (voir notre article ci-dessous du 27 septembre 2017), le rapprochement de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements sociaux et médicosociaux (Anesm) avec la Haute Autorité de santé (HAS) peine à convaincre. Il ne s'agit pas en effet d'un rapprochement, ni même d'une fusion, mais d'une absorption pure et simple de l'Anesm par la HAS.
"Renforcer la complémentarité des approches"
L'exposé des motifs de l'article 51 du PLFSS, qui procède à cette absorption, précise que le transfert des missions de l'Anesm - créée par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médicosociale - au sein de la HAS "permettra de renforcer la complémentarité des approches de la qualité et un partage méthodologique et de favoriser un pilotage transversal plus efficient des secteurs sanitaire, social et médicosocial".
L'étude d'impact qui accompagne le PLFSS expédie rapidement le sort de l'Anesm en s'appuyant sur la mission de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) portant sur le dispositif d'évaluation interne et externe des établissements et services sociaux et médicosociaux (ESSMS) - et cela "même si cette mission n'a pas traité le sujet du devenir de l'Anesm" - pour expliquer que "cette agence n'a pas atteint la taille critique pour exercer ses missions et que sa gouvernance est complexe. Il est par conséquent nécessaire d'intégrer cette agence au sein d'une structure qui puisse assumer ses missions".
Sur le fond, l'idée d'une plus grande transversalité entre les secteurs sanitaire, médicosocial et social apparaît légitime. Le rapprochement entre les deux agences était d'ailleurs dans l'air depuis plusieurs années et certaines fonctions (achats, comptabilité...) avaient déjà été mutualisées en 2015 entre les deux structures.
Une forte disproportion entre les deux agences
En mars 2017, la convention constitutive du GIP de l'Anesm avait été prolongée in extremis d'une année. Le comité d'orientation stratégique de l'agence avait alors adopté un vœu pour que la convention soit renouvelée pour une durée indéterminée, en faisant valoir que l'Anesm "a joué et joue un rôle fondamental et indispensable à la dynamique mise en œuvre et à la réussite de l'amélioration de la qualité dans les ESSMS au service de la bientraitance des personnes accueillies ou accompagnées".
Mais les pouvoirs publics n'ont pas donné suite à cette demande. La convention constitutive arrivait donc à expiration le 1er avril 2018. De son côté, la HAS ne cachait pas son ambition d'absorber l'Anesm, ce qui sera effectif à compter de cette date.
Si la mesure est actée et devrait franchir sans encombre l'étape du Parlement, elle n'en suscite pas moins des réticences. Les deux agences présentent en effet une taille et des moyens très différents (27 salariés à l'Anesm, 400 à la HAS). La crainte est celle d'une "sanitarisation" de l'Anesm, autrement dit le risque que le volet médicosocial devienne le parent pauvre au sein d'une agence entièrement centrée sur le sanitaire et marquée, en outre, par une certaine rigidité et lourdeur dans le fonctionnement.
Préserver la dimension médicosociale au sein de la HAS
A défaut de pouvoir s'opposer à l'absorption de l'Anesm, les professionnels du secteur entendent au moins préserver la dimension médicosociale au sein de la HAS. Le Groupement national des directeurs généraux d'associations du secteur éducatif, social et médicosocial (GNDA) s'inquiète ainsi des conséquences de la disparition de l'Anesm et estime notamment que "le collège assurant la gouvernance de la Haute autorité doit être modifié pour accueillir au moins deux représentants des acteurs du social et du médicosocial".
De son côté, l'Association des directeurs et cadres de direction du secteur social, médicosocial et sanitaire (ADC) estime que "les modalités de cette coopération future restent pour le moins opaques et donc sans visibilité stratégique de positionnement identifié, à ce jour". Elle entend par conséquent rester "vigilante aux évolutions et aux orientations organisationnelles à venir et s'associera à toutes les démarches qui pourront contribuer à faire valoir notre secteur comme une spécificité [...]".