La chaleur renouvelable ne veut plus être considérée comme "un monde à part"
Préparant le terrain de la Semaine de la chaleur renouvelable, qui se tient début décembre, les acteurs de la filière des réseaux de chaleur et de froid ont dévoilé le 15 novembre les chiffres de leur enquête nationale. Si l'heure n'est plus à l'inquiétude et que l'optimisme revient, du chemin reste encore à faire pour développer la chaleur renouvelable.
"L'heure n'est plus à l'inquiétude mais à l'optimisme", a tenté de rassurer après des années sombres Pascal Roger, président de la Fédération des services énergie environnement (Fedene), lors de la présentation annuelle de l'enquête sur les réseaux de chaleur et de froid. Celle-ci dénombre 781 réseaux de chaleur qui livrent en France 25,4 TWh de chaleur dans plus de 40.000 bâtiments raccordés. Soit 2,42 millions d’équivalents logements et 14.000 bâtiments de plus qu'en 2012. "Ils sont mieux isolés, moins énergivores. Nos réseaux irriguent la ville au fur et à mesure qu'elle devient moins émissive", retrace Thierry Franck de Préaumont, président du Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine (SNCU). Le verdissement de leur mix énergétique a été souligné à travers un chiffre marquant : il y a dix ans, les énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) n'alimentaient qu'à hauteur d'un quart ces réseaux ; aujourd'hui, la barre des 57% d'EnR&R utilisées par ces réseaux est franchie.
"Passer à la pratique"
Reste que plus on tarde à capitaliser ces acquis et à développer de nouveaux réseaux, plus le décrochage de la filière par rapport à la trajectoire prévue paraît difficile à corriger. "L'intention de développer ces réseaux est désormais partagée par le gouvernement, il faut passer à la pratique. Même si, à l'approche des municipales, on ne s'attend pas à des miracles", commentent ces acteurs d'une filière certes vertueuse mais dont la rentabilité s'est trouvée mise en péril face au gaz et suite à la baisse du prix des énergies fossiles. Pour mieux valoriser ses atouts et sortir son image de l'ornière d'une infrastructure technique et méconnue des usagers, la filière n'agit plus seule et multiplie les actions menées en commun avec les réseaux d'élus locaux.
Le coeur de cible reste inchangé : ce sont les 469 villes de plus de 10.000 habitants qui sont dépourvues de réseau. Pour les convertir, l'argument de la contribution à la transition énergétique ne suffit plus, "la stabilité dans la durée du prix de la chaleur livrée - autour de 70 euros HT/MWh - et la moindre volatilité de coût par rapport à d'autres énergies, sont à mettre en avant", avance Pascal Roger. La pertinence de cette solution dans le logement social n'est en outre plus à prouver, nos réseaux sont "un outil au service du développement social", ajoute-il.
"Desserrer la bride"
Le déploiement des mesures annoncées le mois dernier par le groupe de travail ministériel sur les réseaux de chaleur et de froid (voir notre article du 8 octobre) fera l'objet d'un point d'étape lors des quinzièmes rencontres mettant à l'honneur ces réseaux, dans le cadre de la Semaine de la chaleur renouvelable qui se tient du 3 au 5 décembre. Une mesure attise particulièrement la vigilance de la filière, à savoir la possibilité d’attribuer des certificats d’économies d’énergie (CEE) pour des raccordements réalisés sur des réseaux aidés par le fonds Chaleur. "C'est le bon moment pour desserrer la bride et libérer la capacité en combinant ces deux aides, ce qui est impossible actuellement. La chaleur renouvelable n'est pas un monde à part. Nous réclamons une équité de traitement face aux dispositifs de soutien", conclut Pascal Roger.