La carte française des aides à finalité régionale 2022-2027 approuvée
La Commission européenne a approuvé la carte française des aides à finalité régionale 2022-2027, qui reste parcellaire. À ce jour, seules les régions ultrapériphériques connaissent précisément leur sort. Pour la métropole, comme en matière de réforme de "géographie prioritaire", il faut encore faire preuve de patience.
La Commission européenne vient d’approuver la proposition française de carte des aides à finalité régionale 2022-2027, notifiée le 15 décembre dernier, dans le cadre des nouvelles lignes directrices arrêtées par Bruxelles en avril dernier (voir notre article du 19 avril 2021). Cette carte doit fixer non seulement les territoires qui peuvent bénéficier des aides publiques à l’investissement et à l’emploi des entreprises, destinées à réduire les disparités entre régions de l’Union européenne, mais aussi "l’intensité maximale de l’aide" (IMA) pour chacun d’eux – entendre le montant maximal de l’aide pouvant être accordée par bénéficiaire, exprimée en pourcentage des coûts (admissibles) des investissements.
Les régions ultrapériphériques fixées
Conformément aux lignes directrices de la Commission, et "dans la continuité de la carte actuelle, en vigueur depuis 2014, les Drom et la collectivité de Saint Martin seront intégralement zonés de droit", indiquait récemment la DGCL (en zone "a", conformément à l’article 107, §3, a) du traité sur le fonctionnement de l’UE). C’est donc sans surprise que l’on retrouve la Guadeloupe (avec une IMA de 50%), la Martinique (IMA 40%), la Guyane (IMA 70%), La Réunion (IMA 50%), Mayotte (IMA 70%) et Saint-Martin (IMA 60%).
Ces taux d’intensité d’aide maximale, applicables aux grandes entreprises, pourront être augmentés de 10 points pour les moyennes entreprises et de 20 points pour les petites entreprises, pour leurs investissements initiaux dont les coûts admissibles n’excèdent pas 50 millions d'euros. Ils restent en outre théoriquement modifiables, à la hausse, en fonction du "plan territorial de transition juste" qui doit être mis en place conformément au règlement établissant le fonds pour une transition juste.
La métropole dans le flou
La France s’étant vu attribuer sur la nouvelle programmation un taux de couverture de sa population nationale de 31,95% (contre 24,17% précédemment), et la couverture de ses zones "a" représentant 3,27% de sa population, subsiste un solde de 28,68% – soit 19.222.231 habitants – pour les zones "c" (toujours en référence à l’article du TFUE précité), toutes "non prédéfinies", i.e. que la France peut désigner "à sa discrétion", à condition toutefois qu’elles respectent certains critères socio-économiques (figurent désormais au rang de ces derniers le fait d’être situé dans un territoire "en transition juste").
À ce stade, la France a fait le choix de constituer à l’égard de la Commission une "réserve" correspondant à la totalité de cette couverture. La carte précise n’est donc pas encore connue, même si des propositions semblent avoir été soumises à consultation (voir pour un exemple dans les Hauts-de-France). Son élaboration est pilotée par la direction générale des collectivités territoriales (DGCL), à partir des travaux menés sur le terrain par les préfets de région, en concertation avec les présidents de conseil régional, sur instruction de la ministre de la Cohésion des territoires du 30 juillet dernier (voir notre article du 20 septembre dernier). Contactée par Localtis, la DGCL précise "qu’une attention particulière a été portée aux territoires suivants : les territoires d’industrie, notamment les 'sites industriels clés en main', les principales zones d’activités (actuelles ou programmées) et les friches ; les territoires les plus émetteurs de gaz à effet de serre et/ou présentant d’importants défis en matière de transition écologique, particulièrement ceux bénéficiant du fonds de transition juste ; les sites automobiles prioritaires identifiés par le ministère de l’économie, des finances et de la relance. À ce jour, la proposition française de zonage AFR devrait, sous réserve de la validation de la Commission européenne, couvrir 1,4 million d’emplois industriels (sur 3 millions d’emplois industriels en France) soit 46% contre 36% pour la période 2014-2021. Par ailleurs, 72% des sites à émission de GES seraient désormais couverts contre 55% pour la période 2014-2021, avec une multiplication par trois de la couverture des émissions pour Auvergne Rhône Alpes et par plus de deux pour les Pays de la Loire et le Centre-Val de Loire". La DGCL confirme par ailleurs que la carte métropolitaine, actuellement en cours d’examen par la Commission, devrait bien entrer en vigueur à la fin de ce premier trimestre. Le dispositif actuel ne sera donc pas prorogé jusqu’au 31 décembre 2023, comme l’indique par erreur le site du site du ministère de la Cohésion des territoires dans une actualité en date du 27 décembre dernier. Cette dernière fait en effet état d’une nouvelle "prorogation d’une année supplémentaire des contrats de villes et de huit dispositifs zonés de soutien du développement économique des territoires", parmi lesquels elle mentionne "les zones d’aide à finalité régionale (AFR)". Cette prolongation avait été décidée dans le cadre de la loi de finances pour 2022 (voir notre article du 10 novembre 2022) afin de donner plus de temps à la refonte de la géographie prioritaire.
Réforme des ZRR aux calendes grecques
Grâce à la circulaire de juillet, on connaît déjà l’enveloppe de chaque région. En outre, le gouvernement ayant choisi de mettre en place un mécanisme permettant à chacune d’elles de conserver a minima ses enveloppes de population actuelles, on sait en outre que les communes figurant déjà dans le zonage "peuvent donc y être maintenues". Pour le détail, il faudra encore faire preuve de patience. Comme en matière de réforme de la "géographie prioritaire", une nouvelle fois repoussée. Par décrets du 19 janvier dernier, les députés Anne Blanc et Jean-Noël Barrot et les sénateurs Frédérique Espagnac et Bernard Delcros ont ainsi été chargés d'une mission temporaire "ayant pour objet de mener une réflexion sur la réforme du zonage des zones de revitalisation rurale". Un thème déjà familier aux deux sénateurs, puisqu’ils ont déjà remis un rapport sur le même sujet il y a trois ans à peine… (voir notre article du 10 octobre 2019). Mais entre la vision critique du député Jean-Noël Barrot (favorable à une refonte complète des ZRR dans une sorte de "droit à la reconversion" des territoires) et celles des sénateurs, avocats des ZRR, il ne sera pas facile d'arrêter une vision commune.