À Kédange-sur-Canner, les défunts peuvent reposer au pied d'un arbre (57)

Se faire inhumer au pied d'un arbre ? Ce n'est pas encore courant en France mais c'est une tradition chez certains voisins européens comme l'Allemagne. Non loin de là, à Kédange-sur-Canner, à 20 minutes de Thionville, le conseil municipal a choisi de proposer cette solution. « Ce projet part d'abord de la nécessité d'étendre notre cimetière existant, qui n'a plus la capacité suffisante pour les années à venir », indique le maire, Jean Kieffer.

Une forêt cinéraire

« Nous réalisons un cimetière forestier pour contribuer et agir pour la biodiversité, souligne l'élu. Nous sommes aussi voisins de la Sarre et du Luxembourg où les cimetières forestiers sont courants, avec une autre approche de la mort ». Le maire constatait aussi que certaines tombes étaient moins entretenues et un intérêt croissant des nouvelles générations pour la crémation. Plutôt que d'utiliser un bout de forêt communale à cet usage, « nous avons peu de surfaces boisées et elles sont trop éloignées du centre bourg », le conseil municipal a choisi de créer une nouvelle forêt, en prolongement du cimetière existant.

Le nouveau cimetière forestier se déploiera sur 2 000 m2 avec une capacité totale de 80 places, sur un terrain cédé à la commune à l'euro symbolique par un privé. La commune a sollicité l'organisme public départemental Moselle Agence Technique pour concevoir le projet et être accompagnée dans la passation des marchés publics. « Même si nous n'en avions pas l’obligation, nous avons réalisé une étude hydrogéologique pour nous prémunir de tout recours », souligne l'élu. Le cimetière sera clôturé et accessible aux personnes à mobilité réduite. Seules les cendres pourront y être déposées, dans des urnes biodégradables : « L'objectif est à terme une disparition totale des restes, qui retournent à la nature. »

L'arbre, un allié

Les 16 arbres, au pied desquels seront enterrées les urnes, ont été plantés en décembre 2021 : « Ils sont déjà grands, âgés de 7-8 ans : des chênes, des tilleuls, des merisiers », précise l'élu. Une haie existante est conservée et des plantes couvre-sol seront installées. « À terme, ce sera bien une forêt ; elle contribuera à la lutte contre le réchauffement climatique. » En tant que commune-nature 3 libellules (distinction de la région Grand Est), Kédange-sur-Canner pratique déjà le zéro phyto sur l’ensemble de ses espaces publics. Avec la création de ce nouvel espace forestier, elle anticipe un travail d'entretien supplémentaire plus conséquent que sur le cimetière conventionnel.

Un accueil enthousiaste

Avant même d'ouvrir ce cimetière, la commune a déjà plusieurs demandes d'intention d'inhumer. « Je pensais qu'il y aurait peut-être des barrières au sein de la population, mais c'est plutôt l'enthousiasme qui domine », se réjouit l'élu. Les demandes proviennent aussi de particuliers extérieurs à la commune. Il reste à finaliser le règlement d'inhumation : « La présence des défunts sera signalée sur de petits panneaux en matériaux naturels », indique l'élu. Le prix de la concession n'est pas non plus fixé : « Nous ne souhaitons pas que le choix entre cimetière forestier et existant se fasse sur un seul critère financier. »

Déclaration des droits de l'arbre

Ce projet de cimetière fait partie des projets importants du mandat. Il sera suivi de la création d'une nouvelle réserve de biodiversité de 6 000 m2, plantée d'arbres fruitiers. Les engagements concrets de la mairie pour protéger et replanter des arbres sont nombreux. Le conseil municipal a aussi souhaité adopter symboliquement la Déclaration des droits de l'arbre, incité par un juriste local, fondateur de l'association la Voix de l'Arbre. « Dans une succession, les arbres sont considérés comme des biens mobiliers, au même titre qu'une commode, souligne le maire. Il faut faire évoluer ce statut, ne pas les considérer comme des objets anodins, et tout faire pour mieux les protéger. »