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Journées nationales de France urbaine : la relation avec l'État au cœur des débats

Après une allocution en début de journée devant les élus des petites villes, le Premier ministre s'est rendu ce 10 septembre aux quatrièmes Journées nationales de France urbaine, à Nantes. Il a apporté avec lui plusieurs annonces, notamment la création d'une enveloppe supplémentaire de 400 millions d'euros en faveur des projets des autorités organisatrices de transports. Abordant le projet de loi "3DS", il a mis l'accent sur le volet consacré à la simplification, faisant l'impasse sur les questions de décentralisation. Alors que la présidente de France urbaine appelait à "plus de souffle" en ce domaine.

Clôturant ce 10 septembre, en milieu de journée, les quatrièmes Journées nationales de France urbaine à Nantes, le Premier ministre a dit "apporter des preuves d'amour" aux élus des grandes villes et de leurs agglomérations, qui venaient d'appeler l'État à leur faire confiance.

Devant les 800 participants réunis depuis la veille à la Cité des congrès du chef-lieu des Pays de la Loire, Jean Castex a confirmé la création "par redéploiement" d'une enveloppe de 350 millions d'euros supplémentaires "pour les CRTE" (à savoir les contrats de relance et de transition écologique) "de tout le monde". Le chef du gouvernement l'avait indiqué trois heures auparavant devant les élus des petites villes de France, réunis eux aussi pour leurs assises annuelles (à Cenon, près de Bordeaux - voir notre article de ce jour). Le président de la République avait été le premier à dévoiler cette décision, le 7 septembre en clôture de la quatrième rencontre nationale Action cœur de ville. Selon l'entourage du Premier ministre, cette enveloppe exceptionnelle abondera en 2022 la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), qui est attribuée par les préfets. 

Projet de loi "3 DS" : adoption avant la fin de la mandature

Par ailleurs, le gouvernement va accroître ses efforts en faveur des projets d'investissement des collectivités en matière de transports publics. "C'est une priorité de l'État qui rencontre la vôtre", a souligné Jean Castex. Concrètement, il a annoncé que l'État va abonder de 400 millions d'euros les fonds consacrés à l'appel à projets "transports collectifs en site propre et pôles d'échanges multimodaux", qui avait été lancé en décembre dernier. Ce dernier disposait déjà d'une somme de 500 millions d'euros. Mais le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) jugeait nécessaire de doubler la mise. France urbaine était aussi de cet avis. Sur ce dossier prioritaire, le Premier ministre a aussi assuré qu'il allait demander à ses services "d'accélérer au maximum ces procédures pour que les lauréats puissent être désignés dans les meilleurs délais".

Parmi les quelques annonces du Premier ministre, il faut aussi retenir celles qui concernent le calendrier du projet de loi de décentralisation, appelé "3 DS" par les sénateurs, auquel les élus de France urbaine sont attachés. Si la discussion parlementaire de la réforme a pris du retard, elle ne devrait pas remettre en cause son adoption finale. La loi "sera bien examinée, et je l'espère, votée d'ici la fin de la présente mandature", a dit Jean Castex. Juste avant, il avait indiqué qu'après son adoption en première lecture par le Sénat en juillet dernier, le texte "va arriver dans quelques semaines à l'Assemblée nationale". Évoquant ce texte, il a surtout insisté sur ses apports en matière de différenciation et de simplification, appelant les élus à transmettre des propositions dans ce dernier domaine.

Au-delà de ces quelques annonces, le Premier ministre - qui la plupart du temps était détaché du texte de l'allocution qu'il avait préparée - a souligné la nécessité pour l'État et les collectivités locales de travailler "main dans la main" aux politiques relevant de leurs responsabilités communes. Remerciant "du fond du cœur" les élus des grandes villes et de leurs intercommunalités pour leur mobilisation au service de la lutte contre la pandémie, il a mis en avant l'importance de l'"action de proximité" pour réussir "les derniers kilomètres de la vaccination." Au passage, il a assuré aux élus de France urbaine que "les charges" engagées par les villes et leurs intercommunalités pour la vaccination seront "prises en compte dans les soutiens de l'État". "Il faut travailler ensemble, tout le temps", a insisté l'hôte de Matignon. Qui a égrené les sujets d'intérêt commun : la transition écologique, la politique de la ville, la politique de lutte contre la pauvreté, le logement ("un domaine sur lequel il faut que nous repartions à l'offensive"), la sécurité (qui est "d'abord l'affaire de l'État", mais aussi "l'affaire de tous"), ou encore la formation et l'emploi des jeunes ("des préoccupations très fortes de l'État").

"Nouvelle étape de la décentralisation"

Un tel discours fait écho à la volonté manifestée par les élus de France urbaine d'être "écoutés" et d'avoir la "confiance" du gouvernement. Mais il laisse de côté, pour le moment, bon nombre des revendications que la présidente de l'association, la maire de Nantes, Johanna Rolland, avait présentées en accueillant Jean Castex. D'abord et avant tout une "nouvelle étape de décentralisation", qui est d'ailleurs au cœur des propositions d'un certain nombre de candidats, ou supposés candidats à l'élection présidentielle. Le "souffle" décentralisateur dont la France a besoin n'est pas présent dans le projet de loi 3DS, a critiqué la présidente de France urbaine. Sur ce texte, elle a aussi mis en garde contre la tentative opérée par les sénateurs de détricoter les compétences des communautés et métropoles au profit des communes. L'association se battra, lors de la discussion à l'Assemblée nationale, pour que ces amendements sénatoriaux disparaissent du texte. Dans ce combat, elle a reçu le soutien de l'Assemblée des communautés de France, dont le président, Sébastien Martin, était présent à Nantes.

La présidente de Nantes métropole s'est aussi montrée inquiète sur les finances des communes de plus de 100.000 habitants. Davantage exposées à la crise sanitaire, celles-ci ont vu leur épargne nette "s'effondrer de plus de 80% entre 2019 et 2020", a-t-elle indiqué. En revendiquant "une réelle compensation des pertes tarifaires" de "nos grands établissements". Elle a à ce chapitre également pointé la menace qu'un rapport de l'inspection générale des finances fait peser sur la dynamique des recettes liées à l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) appliquée aux antennes mobiles. Cette ressource dynamique créée lors de la suppression de la taxe professionnelle en 2010 doit être maintenue, a plaidé Johanna Rolland, à quelques jours de la présentation du projet de loi de finances pour 2022. L'édile a insisté sur le besoin de stabilité dont les budgets locaux ont besoin, car les grandes villes "ne sont pas de petites embarcations légères".

Élection présidentielle

La présidente de France urbaine a encore souhaité que l'État apporte un soutien financier à une expérimentation que "32 collectivités volontaires" vont engager durant deux ans pour lutter contre la pauvreté des jeunes. Les territoires urbains prendront en charge "l'accompagnement professionnel et humain de ces jeunes", a-t-elle précisé.

Au-delà, l'association attend du gouvernement qu'il mette en œuvre l'accord de méthode qu'elle a signé avec lui le 17 mai dernier. L'enjeu pour les territoires urbains se chiffre à pas moins de 10 milliards d'euros, dont 6,5 milliards d'euros qui doivent provenir du plan de relance. "Il est urgent que cet accord de méthode puisse s'inscrire dans le projet de loi de finances pour 2022, comme dans les décrets d'application de la première loi de finances rectificative [pour 2021]", a lancé Johanna Rolland.

Au-delà de la discussion au cours de l'automne du prochain projet de loi de finances, l'une des futures échéances majeures sera, pour les élus urbains, l'élection présidentielle du mois d'avril 2022. Un scrutin synonyme de débats et de propositions, auxquels l'association veut apporter sa pierre. C'est à cette fin qu'un groupe de travail piloté par Nathalie Appéré, maire de Rennes, et Martine Vassal, présidente d'Aix-Marseille Provence Métropole, a travaillé à de premières propositions. L'idée maîtresse est de "partir des préoccupations des habitants". Nathalie Appéré a aussi promu une "nouvelle manière de penser la décentralisation", "qui ne part pas des compétences ou de l'illusion d'un jardin à la française et d'une organisation territoriale qui serait parfaite". Évoquant aussi longuement l'enjeu de la transition écologique, "qui doit irriguer toutes les politiques publiques locales", les élus ont insisté sur l'importance de "ne laisser personne au bord du chemin" dans les solutions qui seront mises en œuvre.

 

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