Industrie : retour sur l'investissement colossal de Novo Nordisk à Chartres

Un an après l'annonce d'un investissement colossal de 2,1 milliards d'euros en fonds propres, le chantier du site de Novo Nordisk à Chartres avance grâce à une bonne entente avec les entreprises du secteur qui ont accepté de se déplacer. La métropole, désormais labellisée Territoire d'industrie, soigne son attractivité. Parmi les enjeux pour elle, après le foncier : la formation et le logement des 500 salariés amenés à rejoindre le groupe d'ici trois ans.

Chartres est connue pour sa cathédrale mais c'est aussi une terre d'industrie. Depuis un an, la métropole a intégré le club des 183 Territoires d'industrie pour la période 2023-2027. À peu près à la même période, le groupe pharmaceutique danois Novo Nordisk, présent sur place depuis les années 1960, a annoncé vouloir investir sur le site l'un des plus gros montants jamais enregistrés dans le secteur de la santé en France : 2,1 milliards d'euros en fonds propres, avec 500 emplois à la clé d'ici trois ans. Un investissement qui avait valu la visite d'Emmanuel Macron le 23 novembre 2023.

Le laboratoire spécialisé dans les traitements contre le diabète voit grand. Il compte ainsi doubler ses capacités de production pour répondre à une demande mondiale en pleine expansion. Selon la Fédération internationale du diabète, le nombre de personnes souffrant de cette maladie chronique dans le monde devrait passer de 537 à 783 millions entre 2021 et 2045. "La malbouffe et la sédentarité conduisent à une pandémie effroyable", lâche David Dester, vice-président projet au sein du laboratoire, cheville ouvrière du chantier, devant une quinzaine d'élus ayant bravé les frimas de ce mois de décembre, dans le cadre des sixièmes Rencontres cœur de ville (voir notre article du 11 décembre), pour mesurer l'étendue des travaux. Car tous ces maires sont confrontés à la question du foncier qui se fait de plus en plus rare pour accueillir de tels projets. Nouveaux bâtiments de produits finis, magasins logistiques, bâtiment de production stérile, extension d'un laboratoire, plateforme d'"utilité verte" avec panneaux solaires sur tous les bâtiments, nouveaux parkings, bureaux et restaurant d'entreprise : au terme des travaux, le site de Chartres devrait passer de 110.000m2 à 230.000 m2

Pousser les murs

"On va doubler la superficie actuelle du site de production, ce n'est pas facile, on n'a pas beaucoup d'avance en termes de foncier, alors il nous a fallu réfléchir à des choses innovantes", expose David Ester, devant les locaux du centre technique municipal, un local cédé par la métropole qui va permettre d'accueillir les véhicules des collaborateurs pendant les travaux afin de libérer un immense parking qui va servir à une extension.

La clé de la réussite de ce projet réside dans l'entente cordiale entre les acteurs économiques du territoire. Car il a fallu pousser les murs, faire de la place et inciter les entreprises présentes sur l'emprise à se déplacer. C'est le cas de la Quincaillerie beauceronne ou du japonais Asahi Diamond (spécialiste de la découpe de matériaux durs) qui était sur le point de fermer et a saisi l'opportunité pour se relancer dans un site flambant neuf situé à quelques centaines de mètres de là. Ou encore de Puig, emblème de la Cosmetic Valley, qui fabrique notamment les parfums de Paco Rabane. L'entreprise espagnole, qui loue les relations étroites nouées avec les autorités locales au fil du temps, va se déplacer dans le "jardin d'entreprises", la zone d'activités de 260 hectares située un peu plus à l'est de l'agglomération, à cheval sur Nogent-le-Phaye et Gellainville, qui concentre déjà quelque 8.000 emplois. L'opération déjà programmée a surtout connu un coup d'accélérateur. La signature officielle doit avoir lieu cette semaine. "Il faut se féliciter de l'écoute qu'ont eue les entreprises", se réjouit Didier Garnier, vice-président délégué de Chartres métropole, qui reconnaît que "ça a discuté gros sous". 

Attractivité

De son côté, la métropole n'a pas lésiné sur les moyens pour rendre le territoire attractif. En septembre 2025, une des lignes du nouveau bus à haut niveau de service (BHNS) reliera la gare et l'hôpital de Chartres en desservant l'usine de Novo Nordisk. Par ailleurs, une centrale de cogénération biomasse alimente un réseau de chaleur et produit de l'électricité redistribuée au réseau local. 

De son côté, Novo Nordisk se veut exemplaire en matière environnementale et promet de baisser sa consommation d'eau et d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2030. Elle possède déjà sa propre chaudière biomasse. De quoi séduire les futurs candidats au recrutement. Novo Nordisk va avoir besoin d'opérateurs, de techniciens de maintenance, de coordinateurs qualité, d'ingénieurs, de chefs de projets… Pour l'accompagner, l'agglomération travaille déjà à un campus de formation dédié à la pharmacie et à la cosmétique, les deux filières ayant un tronc commun. Et elle va devoir s'atteler à la question du logement. "Il faut servir la cause des industriels, il va falloir que les communes dans un rayon de 10 km soient en capacité d'accueillir de nombreuses familles", souligne David Garnier. Même si "la loi ZAN vient un peu perturber les choses", glisse-t-il.