Indicateurs financiers : quelles évolutions avec la réforme de la fiscalité locale ?
Selon une étude de la DGCL, la réforme de la fiscalité locale pourrait avoir des conséquences notables sur les indicateurs financiers utilisés pour le calcul des dotations et fonds de péréquation des communes et de leurs groupements. Le dossier est au menu des travaux du Comité des finances locales.
Si rien n’est fait, les indicateurs financiers – tels que les potentiels fiscal et financier – vont connaître des variations significatives à partir de 2022, laissant de fait présager des modifications substantielles de la répartition des dotations et des fonds de péréquation. C’est la conséquence possible de l’entrée en vigueur en 2021 de la réforme de la fiscalité locale, inscrite dans la loi de finances pour 2020. Un scénario que décrit la direction générale des collectivités locales (DGCL) dans une étude ayant vocation – notamment du fait de ses limites méthodologiques – à "dégager des grandes tendances". Celle-ci a été présentée le 28 janvier lors de la première réunion d’un groupe de travail que le Comité des finances locales (CFL) a mis en place sur la question.
Selon le document que Localtis s’est procuré, le potentiel financier – c’est-à-dire le principal instrument utilisé pour la détermination des montants des dotations et dispositifs de péréquation – baisserait pour la plupart des communes. En cause : l’affectation à celles-ci du produit de taxe foncière sur les propriétés bâties des départements (en remplacement de leurs recettes de taxe d’habitation) et la mise en place du coefficient correcteur (désormais couramment dénommé "coco") visant à garantir une compensation "à l'euro près". L'importance de la réduction serait étroitement corrélée à la taille des communes. Ainsi, 91% des communes de moins de 500 habitants enregistreraient une baisse de leur potentiel financier, cette réduction s'élevant en moyenne à 14% pour celles-ci. Les tendances s'inverseraient pour les communes les plus peuplées. Ainsi, le potentiel financier croîtrait (en moyenne de 2%) pour une majorité (57%) des communes de 75.000 à 100.000 habitants. La raison tient notamment au "coco", qui est plus élevé pour les grandes communes (une majorité d’entre elles sont en effet en situation de "sous-compensation", c'est-à-dire que les recettes transférées ne suffisent pas à compenser le produit de la taxe d'habitation perdu).
Paris apparaîtrait moins riche
Pour sa part, le potentiel fiscal des EPCI à fiscalité propre – qui a pour objet de mesurer et de comparer l’ensemble de leur richesse fiscale – baisserait en moyenne de 3% (de 419 à 406 euros par habitant). Mais cet indicateur, qui est essentiellement utilisé dans la répartition de la dotation d’intercommunalité, connaîtrait des évolutions différentes selon le régime juridique des structures : 63% des communautés d'agglomération enregistreraient une baisse de leur potentiel fiscal, contre seulement 12% des communautés urbaines et métropoles. Enfin, parmi les communautés de communes, seule une petite majorité verrait leur potentiel fiscal baisser.
Une baisse moyenne, également d’environ 3%, serait observée pour le potentiel fiscal et financier agrégé, lequel mesure la richesse potentielle d’un EPCI et de ses communes membres. Celui-ci passerait, ainsi, de 629 à 610 euros par habitant. Ce critère utilisé pour le fonctionnement du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) connaîtrait une baisse plus prononcée pour les petites intercommunalités et leurs communes (- 10,3%). Qui s’atténuerait au fur et à mesure que grandit la taille du territoire (- 1,9% pour les ensembles intercommunaux de 200.000 à 300.000 habitants). La ville de Paris ferait toutefois exception à la règle : son potentiel financier agrégé baisserait de 12,6%. Considérée comme moins riche, la capitale verrait donc, sans doute, sa contribution au Fpic fortement diminuer. Pour rappel, en 2019, celle-ci atteignait 192 millions d’euros (sur le milliard d’euros qu’a représenté le dispositif).
Délibération en juillet prochain
Au cours de la deuxième réunion du groupe de travail, ce 4 février, la DGCL a présenté des simulations des effets de la réforme de la fiscalité locale sur d’autres indicateurs financiers : l’effort fiscal et le coefficient d’intégration fiscale, pour le bloc communal, ainsi que le potentiel fiscal et financier, pour les départements.
Les séances suivantes, prévues à partir de fin avril, devraient fournir l’occasion de présenter les variations des dotations et fonds de péréquation dans l’éventualité où les indicateurs ne seraient pas rénovés. Un scénario peu probable, car le groupe de travail du CFL devrait dégager des pistes d’évolution des indicateurs et des dotations, en en simulant les effets. Elles devraient figurer dans une délibération que l’instance prendrait au mois de juillet prochain. Les préconisations des élus locaux pourraient ainsi être introduites dans le projet de loi de finances pour 2021, qui sera présenté fin septembre. S’ils s’avèrent nécessaires, des ajustements pourront être prévus dans le projet de loi de finances pour 2022, précise la DGCL.
La création de ce groupe de travail est une initiative propre au CFL, précise son président André Laignel, qui compte associer à ses travaux les présidents et rapporteurs des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi que des représentants des délégations aux collectivités des deux chambres. On saura d'ailleurs que côté Assemblée, les députés Joël Giraud et Christine Pires Beaune ont été désignés co-rapporteurs d'un "groupe de suivi des travaux du CFL" sur cette rénovation des indicateurs financiers.
L'objectif de ces travaux est bien "qu'il soit mis fin à certaines injustices", a résumé André Laignel ce 4 février devant la presse à l'issue de la séance plénière du CFL qui avait lieu dans la foulée de la réunion du groupe de travail. Une séance plénière quant à elle consacrée à la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et à l'examen de deux projets de décrets, dont l'un lié aux dotations de péréquation. Localtis y reviendra dans sa prochaine édition. André Laignel a profité de l'occasion pour indiquer que le CFL siégera jusqu'au 14 juillet dans sa composition actuelle, avec élection le 15 juillet.