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Accès aux soins - Incertitudes sur l'avenir du bouclier sanitaire

Depuis une dizaine de jours, les déclarations contradictoires se multiplient sur la mise en oeuvre éventuelle d'un "bouclier sanitaire", sur le modèle du bouclier fiscal mis en place l'an dernier.
Ce dispositif, fortement porté par le haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté, a vocation à constituer une contrepartie à la mise en place des franchises médicales. Il aurait en effet pour conséquence de plafonner la part laissée à la charge des personnes aux revenus très modestes. Selon Martin Hirsch, cette part ne devrait pas excéder "sans doute 3% à 5% du revenu fiscal des ménages".
L'idée a été confortée par le rapport remis en septembre 2007 par Raoul Briet, ancien directeur de la sécurité sociale, et Bertrand Fragonard, ancien directeur de la Caisse nationale d'allocations familiales. Ce document concluait à la faisabilité d'un bouclier sanitaire, sous réserve de la prise en compte d'un certain nombre de difficultés techniques. Lors de la remise du rapport, le gouvernement s'était montré ouvert à l'idée, tout en restant prudent sur les travaux préalables nécessaires, les difficultés à surmonter et les délais indispensables à sa mise en oeuvre (pas avant 2010). Dans un communiqué commun, Martin Hirsch et Roselyne Bachelot, la ministre de la Santé, avaient ainsi indiqué que "le sujet du bouclier sanitaire trouvera toute sa place dans la concertation qu'entend mener le gouvernement, à la suite des orientations du président de la République, sur la place de la solidarité et de la responsabilité individuelle". En décembre 2007, le rapport de la Haute Autorité de santé (HAS) sur les affections de longue durée s'était également prononcé en faveur de l'instauration d'un tel dispositif. Malgré cette convergence, la perspective d'une mise en place d'un bouclier sanitaire semble aujourd'hui s'éloigner, révélant des tensions au sein du gouvernement.
Lors de sa brève intervention à l'issue de la conférence avec les partenaires sociaux, le 6 février, Nicolas Sarkozy n'a pas évoqué la question. Dès le lendemain, le ministre du Budget et des Comptes publics indiquait dans une interview au quotidien médical Le Généraliste être "assez réservé sur le concept, parce que le risque existe que l'on change de système". La crainte est que le bouclier sanitaire remette en cause le principe même des franchises médicales. Eric Woerth reconnaissait toutefois qu'"il y a un travail à réaliser sur le reste à charge". Ces propos n'ont pas manqué de faire réagir Martin Hirsch. Celui-ci vient en effet d'indiquer que l'idée d'un bouclier sanitaire "n'est pas morte" et que "le débat est ouvert". Il a en particulier souligné que ce projet est "en pleine cohérence avec la réforme des minima sociaux" et la création du revenu de solidarité active (RSA). Pour sa part, Roselyne Bachelot semble rejoindre plutôt la position du Budget, en se montrant nettement plus réservée qu'en septembre dernier.
En attendant un arbitrage sur ce dossier, la question de l'accès aux soins reste posée. Elle a certes été largement résolue pour les bénéficiaires de la CMU, dispensés de l'application des franchises médicales. Mais elle reste entière pour les personnes à faibles revenus, mais qui disposent néanmoins de ressources supérieures au plafond de la CMU.

 

Jean-Noël Escudié / PCA