Impact économique du coronavirus : mise en place d’une cellule État-région-Bpifrance
La crise liée au coronavirus et à son impact économique est l'occasion pour Bercy et les régions de réaffirmer le rôle "contracyclique" que doit jouer Bpifrance en termes de soutien aux entreprises.
Alors que l’impact économique de l’épidémie Covid-19 s’apparente à un saut dans l’inconnu, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a accueilli une délégation de présidents de région, jeudi 5 mars, pour resserrer les liens entre leurs services respectifs. Les participants à la réunion (dont les trois présidents de région Xavier Bertrand, Valérie Pécresse et Christelle Morançais) ont décidé de mettre en place une "task force" État-région-Bpifrance pour "assurer un suivi serré de la situation et accélérer les mesures de soutien à la trésorerie des entreprises (allègement des conditions d’accès à la garantie des prêts de trésorerie), en lien avec l’ensemble des acteurs du secteur bancaire et les grands donneurs d’ordre (sous-traitance) qui ont aussi un rôle majeur à jouer dans cette situation", selon un communiqué de Régions de France.
Bpifrance invitée à jouer son rôle "contracyclique"
L’implication de Bpifrance – dont le directeur n’était pas présent à la réunion – n’est pas anodine. L’objectif est de lui redonner pleinement le rôle de banque publique "contracyclique" qu’elle aurait un peu perdu de vue au fil des ans en intervenant tous azimuts (ce que la Cour des comptes a déjà signalé à plusieurs reprises, invitant à clarifier son positionnement stratégique). Concrètement, dans chaque région, les représentant des services de l’État, de la région et de Bpifrance se réuniront à intervalles rapprochés pour faire le point sur les problèmes de trésorerie qui leurs seront remontés. Ils regarderont ensemble les modalités d’intervention de Bpifrance en assouplissant ses critères d’intervention. Mardi, Bruno Le Maire avait demandé à la banque publique d’investissement d’augmenter sa garantie pour les prêts bancaires liés à la trésorerie.
Etat et régions entendent aussi faciliter la reconnaissance du "cas de force majeure dans les marchés publics" et, "dans un souci de solidarité, de ne pas appliquer de pénalités aux entreprises confrontées à des difficultés d’approvisionnement et de continuité de leurs activités effectivement imputables à l’épidémie de Covid-19". L’ensemble des mesures exceptionnelles auxquelles les entreprises impactées sont éligibles – comme le recours au chômage partiel - ont été récapitulées par la direction générale des entreprises le 2 mars.
Anticiper un passage au "stade 3"
Les participants à la réunion ont aussi évoqué les conséquences d’un passage au "stade 3" jugé inéluctable, jeudi, par le professeur Jean-François Delfraissy, spécialiste des maladies infectieuses. Ce stade prévu par le plan national de lutte pandémie grippale de 2011 vise non plus à "freiner la propagation du virus" (comme c’est le cas du stade 2 actuel) mais à "atténuer les effets de la vague épidémique", tout d’abord en évitant la saturation du système de santé et en instaurant des "mesures barrières" pour éviter la contagion. Ces dernières seront mises en place de manière progressive et au cas par cas, sachant qu’elles auront un impact direct sur la vie quotidienne : suspension éventuelle de certains transports en commun, restrictions des grands rassemblements (ce qui est déjà le cas pour les rassemblements en milieu confiné de plus de 5.000 personnes) et des activités collectives, fermetures de classe ou d’écoles de manière isolée (comme actuellement) voire au niveau territorial ou national, selon la gravité… Mais pour les autorités françaises, il s’agit d’éviter autant que possible les mesures de confinement total, comme en Italie, où il a été décidé de fermer toutes les écoles et universités jusqu’au 15 mars. À cet égard, État et régions entendent "coopérer sur la diffusion et le déploiement de bonnes pratiques pour assurer la continuité de l’activité économique et prévenir tout blocage généralisé du pays (télétravail, télémédecine, enseignement à distance), en cas d’aggravation de la crise sanitaire".
Ce rapprochement entre les services de Bercy et les régions n’empêchent pas ces dernières de prendre leurs propres initiatives. Ainsi de la région Grand Est qui a décidé de débloquer une enveloppe de 15 millions d’euros pour mettre en place un "prêt rebond" à effet immédiat, "pour soutenir les entreprises en difficultés conjoncturelles" liées à la crise. La région voit plus loin et a également décidé de lancer un "Pacte de relocalisation" pour "encourager, aider et accompagner les entreprises qui souhaitent rapatrier une partie de leur chaîne d’approvisionnement en région, en France ou en Europe plutôt qu’en Asie". C’est également le sens du message que Bruno Le Maire entend faire passer dans le cadre du "pacte productif". À toute chose, malheur peut être bon.