Handicap / fonction publique : la Cour des comptes pointe les excédents du FIPHFP
La question des réserves du fonds en charge de l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) refait surface. Dans un rapport rendu public ce 6 mars, la Cour des comptes appelle l'établissement à consommer rapidement cet excédent – qui atteignait plus de 340 millions d'euros à fin 2023. Celui-ci n'est "pas justifié", soulignent les magistrats.
Menacé d'impasse financière – avec des exercices déficitaires entre 2017 et 2019 – le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) a connu un redressement de son résultat à partir de 2020, à la faveur notamment d'une augmentation conséquente des contributions versées par les employeurs de l'État au titre de l'obligation d'emploi de personnes en situation de handicap.
En enregistrant un excédent de 51 millions d'euros en 2021, suivi d'un autre excédent de 50 millions d'euros en 2022, l'établissement public administratif créé en 2006 pour faciliter l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap dans les trois versants de la fonction publique, a vu ses réserves progresser "sensiblement". Elles ont atteint 343 millions d'euros à la fin de 2023. Clairement, de telles réserves ne sont "pas justifiées", pour les magistrats. Les mesures mises en place dans la période de déficits et destinées à réduire les dépenses du fonds "peuvent être suspendues pour conduire à une consommation plus rapide", préconise par conséquent la Cour. Qui, plus globalement, pousse à la définition rapide par le FIPHFP d'une "stratégie d'emploi" de ses excédents. Leur maintien au sein du FIPHFP "devrait être subordonné à une démonstration plus claire de l’utilité des financements de celui-ci pour le maintien dans l’emploi et plus fondamentalement pour le recrutement", juge la Rue Cambon.
Développer une stratégie pour les partenariats
Dans sa réponse, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) "indique souhaiter que les excédents soient utilisés au profit d’autres actions en faveur de l’insertion dans l’emploi des personnes handicapées et qu’elle y veillera aux côtés des autres tutelles". "Les excédents constatés ces dernières années (…) n'ont pas une nature structurelle et sont en cours de diminution", rétorquent la présidente du comité national du FIPHFP, Françoise Descamps-Crosnier, et la directrice de l'établissement, Marine Neuville. "Il convient donc, poursuivent-elles, de les affecter en priorité à des dépenses d'intervention ponctuelles ou à des partenariats structurants limités dans le temps (…) plutôt qu'à des dépenses de fonctionnement pérennes."
Devenus le premier mode d'intervention du FIPHFP (44% de la dépense totale), les partenariats (en particulier avec l'Agefiph et Pôle emploi) doivent faire l'objet d'une "véritable stratégie d'action", estime la Cour. Qui appelle l'établissement public à plutôt faire le choix d'augmenter le volume des actions qu'il conçoit "en propre". "Elles doivent devenir largement prépondérantes pour conforter l’intérêt de l'existence" de l'établissement public, souligne-t-elle.
Simplifications
Seconde modalité d'intervention du FIPHFP, les conventions passées avec les employeurs sont perçues par ces derniers comme "d'une trop grande lourdeur", selon la Cour, qui se fonde sur les résultats d'une enquête d'octobre 2021 auprès des bénéficiaires du fonds. Le FIPHFP "doit se donner les moyens d'alléger les exigences procédurales pesant sur les employeurs qui s'engagent dans cette démarche et simplifier en particulier les renouvellements", préconise la Cour. Qui attend, de même, un effort de simplification des modalités de demande des aides figurant au catalogue du fonds.
En outre, la Cour préconise une plus grande évaluation par le FIPHFP de l'efficacité de ses différents types d'action. "L’impact final de son action est aujourd’hui trop peu étudié et ne permet pas de valider l’utilité de ses financements ni de les prioriser en fonction de leurs résultats", regrettent les magistrats.
En 2022, le taux d’emploi direct de personnes en situation de handicap dans la fonction publique s'élevait à 5,45 %. Mais les différences étaient significatives selon les versants : 4,36 % dans la fonction publique d’État, contre 5,53 % dans la fonction publique hospitalière et 6,72 % dans la territoriale. Au total, cela représentait 260.000 agents publics bénéficiaires de l'obligation d'emploi.