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Remaniement - Gouvernement Valls : une "équipe" encore en pointillé

Marylise Lebranchu continuera à s'occuper de décentralisation et de fonction publique. Sylvia Pinel hérite de l'Egalité des territoires et du Logement mais la Ville échoue chez Najat Vallaud-Belkacem. Ségolène Royal vante son expérience régionale en investissant le ministère de l'Ecologie. Au-delà de ces quelques points saillants, on attend la nomination des secrétaires d'Etat, ainsi que les décrets d'attribution, pour mieux identifier les nouveaux interlocuteurs gouvernementaux des pouvoirs locaux.

Dix-sept membres, deux entrants, beaucoup de partants pour le moment, un savant jeu de chaises musicales… tels étaient à grands traits, ce mercredi 2 avril, les tout premiers constats pour quiconque se livrait au "jeu des différences" entre le gouvernement Ayrault et le gouvernement Valls.
C'est en fin de matinée que le secrétaire général de l'Elysée, Pierre-René Lemas, a dévoilé la composition de ce gouvernement post-remaniement. Ou plutôt d'une partie de ce gouvernement, les secrétaires d'Etat ne devant être nommés que dans les jours à venir, voire la semaine prochaine. Or beaucoup de choses vont dépendre de ces nominations-là : le périmètre exact des divers portefeuilles ministériels (on attendra aussi comme toujours pour cela la parution des décrets d'attribution), sans doute le poids des uns et des autres… et l'éventuel réapparition d'une partie des nombreux ex-ministres ou ministres délégués pour l'heure écartés de cette "équipe" que l'entourage présidentiel a définie comme "resserrée, strictement paritaire, alliant expérience et jeunesse".
Certaines pointures du gouvernement Ayrault ne feront évidemment pas leur retour comme secrétaires d'Etat. Outre Cécile Duflot dont le départ était connu au moins depuis la veille, on pense principalement à Pierre Moscovici et à Vincent Peillon. Le retour de ceux qui ont échoué aux municipales, comme Marie-Arlette Carlotti, semble également peu probable. Tout comme celui de ministres déléguées ayant pu apparaître comme bien nombreuses pour un seul et même ministère (on pense aux trois ex-ministres déléguées de Marisol Touraine). En revanche, mercredi après-midi, d'aucuns misaient encore sur Fleur Pellerin comme secrétaire d'Etat en charge du numérique sous la houlette d'Arnaud Montebourg, le "nouveau" ministre de l'Economie, du Redressement productif et du Numérique. Et d'autres se disaient que Valérie Fourneyron pourrait bien garder une petite casquette "sports" comme secrétaire d'Etat même si Najat Vallaud-Belkacem s'est vu attribuer un étonnant portefeuille englobant, pêle-mêle, Droits des femmes, Ville, Jeunesse et Sports.

Un "oubli" pour la Santé ?

La nouveauté la plus spectaculaire a certainement été la nomination de Ségolène Royal au poste de ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, l'autre arrivée étant celle de François Rebsamen, ministre du Travail, de l'Emploi et du Dialogue social.
Huit ministres conservent leur portefeuille, avec parfois quelques ajustements. Les collectivités retiendront avant tout le fait que Marylise Lebranchu reste exactement à sa place, en tant que ministre de la Décentralisation, de la Réforme de l'Etat et de la Fonction publique. Et ce, alors que l'on pouvait imaginer que l'inflexion esquissée en début d'année par le chef de l'Etat sur le dossier de la décentralisation l'aurait fragilisée. On ne sait pas encore, en revanche, si elle pourra s'appuyer sur un secrétaire d'Etat comme elle l'avait fait jusqu'ici avec Anne-Marie Escoffier.
De même, Aurélie Filippetti reste à la Culture, Stéphane Le Foll à l'Agriculture (il devient en plus porte-parole du gouvernement), Christiane Taubira à la Justice, Laurent Fabius aux Affaires étrangères, Marisol Touraine aux Affaires sociales… avec, pour cette dernière, un point d'interrogation lié à l'absence du mot "Santé" dans l'intitulé.
La santé "est bien dans le périmètre" du ministère qui "reste inchangé", a précisé l'entourage de Marisol Touraine, sans préciser si la Santé bénéficierait ou non d'un secrétariat d'Etat dédié. Au moment où François Hollande a fait de la Sécurité sociale, et de la santé en particulier, l'un des piliers de son pacte de solidarité, cette omission inédite a en tout cas tout de suite fait réagir. Le Conseil de l'Ordre des médecins, par exemple, espère "une réparation de cet oubli".
Côté chaises musicales, Benoît Hamon - dont on avait suivi deux textes de loi, celui sur la consommation et celui sur l'économie sociale et solidaire - se voit promu ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, tandis que Bernard Cazeneuve passe du ministère du Budget au ministère de l'Intérieur, que Michel Sapin devient ministre des Finances et des Comptes publics ou que George-Pau Langevin quitte la Réussite éducative pour l'Outre-mer

2014, "année de l'égalité des territoires"... sans la Ville ?

Autre déménagement important pour les collectivités, en plus de la reconduction de Marylise Lebranchu : Sylvia Pinel, ministre déléguée chargée de l'artisanat, du commerce et du tourisme dans la précédente équipe, se voit confier le ministère du Logement et de l'Egalité des territoires que Cécile Duflot avait investi depuis deux ans (on notera juste une inversion des deux termes).
Vice-présidente du Parti radical de gauche, Sylvia Pinel est députée de Tarn-et-Garonne depuis 2007 et conseillère régionale de Midi-Pyrénées depuis 2010. Cette juriste de 36 ans, qui avait suscité certaines frictions, notamment sur le sujet des auto-entrepreneurs, décroche contre toute attente ce gros ministère du Logement au moment où il va falloir, entre autres, faire appliquer la loi Alur fraîchement publiée… et tenter d'améliorer les chiffres de construction de logements.
Lui confiant dès ce 2 avril les clés du ministère, Cécile Duflot a déclaré : "Le besoin de justice et d'égalité de notre pays est énorme, sa soif de réformes également (…). Pendant presque deux ans, j'ai mis toute mon énergie à m'attaquer aux racines de la crise du logement, qui touche encore des millions de personnes." Elle a symboliquement remis un exemplaire papier de la loi Alur, en soulignant que beaucoup reste à faire pour sa mise en pratique. Sylvia Pinel a pour sa part assuré vouloir "faire de 2014 l'année de l'égalité des territoires, une priorité absolue pour résorber les inégalités. Les résultats aux élections municipales nous y invitent encore plus fortement".
On relèvera toutefois un changement – une incohérence ? Alors que François Lamy, l'ancien ministre délégué en charge de la politique de la ville, relevait du ministère de Cécile Duflot, en écho à la volonté affichée de ne pas opposer urbain et rural… la politique de la ville a maintenant filé chez Najat Vallaud-Belkacem (voir notre autre article de ce jour). En outre, rien ne dit laquelle des deux sera, comme l'était Cécile Duflot, en charge du Grand Paris. Sachant que le sort institutionnel de la métropole francilienne est maintenant inscrit dans la loi Mapam, on pourrait aussi imaginer que Marylise Lebranchu assure le pilotage de l'ensemble des dossiers Grand Paris. Y compris le Grand Paris des transports ?

Quel ordre du jour pour le Parlement ?

D'ailleurs… Où sont passés les transports dans le nouveau gouvernement ? Ils n'apparaissent dans aucun intitulé des 16 ministères pourvus mercredi. Les membres de l'ancien cabinet de Frédéric Cuvillier renvoyaient à la publication des décrets d'attribution. Et si le commerce extérieur était revendiqué par deux ministères (le Quai d'Orsay et Bercy...), personne n'a pour l'heure revendiqué les transports (la mer et la pêche non plus). Certes, depuis 2007, le secteur des transports est rattaché au ministère de l'Ecologie… et a donc des chances d'être aiguillé vers Ségolène Royal.
Pour l'heure, la nouvelle ministre de l'Ecologie et de l'Energie a assuré, lors de la passation de pouvoirs avec Philippe Martin, vouloir faire de la France "l'une des premières puissances écologiques d'Europe". "Le défi écologique, la croissance verte est un formidable levier pour l'emploi, le pouvoir d'achat et le bien-être", a déclaré la nouvelle ministre, qui a rappelé qu'elle avait déjà occupé ce poste "il y a 22 ans jour pour jour" et énuméré ses actions en faveur du développement durable lors de ses divers mandats, en insistant particulièrement sur son bagage en tant que présidente de région (il a même été dit qu'elle souhaiterait pouvoir cumuler son mandat régional et sa fonction ministérielle...).
Apparemment, l'arrivée de Ségolène Royal a plutôt rassuré les défenseurs de l'environnement, qui saluent notamment "son expérience de terrain incontestable en Poitou-Charentes". Et qui, à l'instar de France Nature Environnement, se réjouissent du rang protocolaire accordé à la nouvelle ministre, en numéro 3 du gouvernement. Un petit message est venu aussi, d'un élu poitevin, en la personne de Jean-Pierre Raffarin, qui "forme des voeux de succès pour l'ancienne présidente de Poitou-Charentes" tout comme "pour le sénateur François Rebsamen". Et l'ancien Premier ministre UMP de lancer au passage : "François Rebsamen, on aurait préféré qu'il soit en charge de la décentralisation sur lequel il avait quelques idées".
Une chose est sûre : le changement de gouvernement bouleverse l'ordre du jour du Parlement. Le tout risquant d'être compliqué par l'absence d'un ministre chargé des relations avec le Parlement, fonction exercée jusqu'alors par Alain Vidalies. Le plus probable, selon une source parlementaire, est que la tâche soit confiée à l'un des futurs secrétaires d'Etat.
Manuel Valls devrait prononcer son discours de politique générale à l'Assemblée mardi prochain. Initialement, les députés devaient se retrouver ce jour-là, après cinq semaines de pause, pour "une semaine de contrôle", consacrée à des débats sans vote entre élus et ministres, un exercice largement prématuré avec un nouveau gouvernement. Tout cet ordre du jour a été supprimé. Le nouveau programme sera fixé mardi par la Conférence des présidents, tant au Sénat qu'à l'Assemblée.

 

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