Gouvernance / compétences : les intercommunalités aspirent au statu quo

Alors qu'avant la dissolution de l'Assemblée nationale, l'exécutif avait inscrit à l'agenda une réforme de la décentralisation, une enquête d'Intercommunalités de France fait état de la volonté exprimée par une large majorité d'intercommunalités à fiscalité propre de la stabilisation du cadre existant. Et cela tant en ce qui concerne la gouvernance, que l'exercice des compétences intercommunales. Par ailleurs, les intercommunalités interrogées se prononcent négativement sur plusieurs propositions du rapport Woerth qui les concernent.

87% des 147 intercommunalités (communautés de communes et d'agglomération, communautés urbaines, métropoles) interrogées par l'association qui représente l'échelon intercommunal, considèrent qu'"il n’y a pas lieu aujourd’hui de légiférer davantage sur la gouvernance intercommunale". Elles sont "nombreuses à souligner que la loi leur impose déjà un grand nombre d’obligations dans leurs relations avec les communes membres, alors que la gouvernance est avant tout une affaire locale", indique l'association dans une note qu'elle a publiée le 12 juillet.

La dernière réforme des outils de gouvernance de l'intercommunalité remonte à 2019. Cette année-là, la loi Engagement et proximité a consacré l'existence de plusieurs dispositifs qui relevaient jusqu’alors de pratiques locales (pactes de gouvernance, conférences des maires, commissions associant les maires…). Mais, cinq ans après, deux tiers des intercommunalités répondantes jugent ces dispositifs en général d’un "apport réduit, voire inexistant". Seul, un quart des entités sondées estiment que cela "a été d’un apport effectif et a facilité leurs gouvernances".

Maires bien impliqués dans la gouvernance

À 60%, les intercommunalités interrogées soulignent que les maires étaient déjà très présents dans leur gouvernance auparavant et que leur implication ne s’explique pas par les dispositifs prévus par la loi de décembre 2019. À noter que 11% des répondants dressent le constat qu'en dépit de la loi Engagement et Proximité, les maires restent insuffisamment associés à la gouvernance de leur intercommunalité.

La loi Engagement et Proximité a rendu obligatoire l'instauration d'une conférence des maires lorsque le bureau de l'intercommunalité ne comprend pas l’ensemble des maires. Ce lieu d'échanges permet le plus souvent "d’informer et d’organiser des débats autour des grands projets communautaires" et ne "constitue le réel lieu de décision" que dans 16% des cas.

La loi oblige les intercommunalités à organiser un débat sur l'opportunité d'élaborer un pacte de gouvernance. 59% des répondants ont adopté ce document, qui définit par exemple le rôle des instances et groupes de travail, ou encore les modalités de travail avec les communes membres. Mais, parmi eux, les avis sont très partagés sur l'utilité du dispositif. Un résultat qui est révélé, alors que le rapport remis fin mai par Éric Woerth sur la décentralisation (voir notre article) a proposé de rendre obligatoire l'adoption d'un pacte de gouvernance en début de mandat.

Compétences : des règles de répartition "suffisantes"

Pour 72% des intercommunalités interrogées, les lois qui, durant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron, ont assoupli le fonctionnement du bloc communal (loi de 2018 sur les compétences eau et assainissement, loi Engagement et Proximité de 2019 et loi "3DS" de 2022) "ont contribué à apaiser le dialogue entre les élus locaux". Une majorité (54%) jugeant qu'elles "ont fluidifié quelques points, mais sans impact majeur". À noter : seulement 11% souhaitent que le législateur aille "encore plus loin".

Interrogées sur la répartition des compétences entre communes et intercommunalités, que le législateur a cherché à assouplir au cours des dernières années, 65% des intercommunalités ayant répondu à l’enquête estiment le cadre juridique "suffisant à ce jour" pour organiser cette répartition. Au contraire, un nouveau travail législatif est nécessaire pour 34% d’entre elles, car le cadre actuel leur apparaît trop rigide. Mais ces dernières sont divisées sur la portée de la réforme, la moitié seulement estimant que les compétences intercommunales doivent être facultatives (avec, au sein de ces intercommunalités, des nuances, là encore, quant à leurs avis).

Statut unique d'intercommunalité

Sur la possibilité de transférer une compétence facultative à l'intercommunalité pour une partie seulement des communes membres (fonctionnement "à la carte"), les répondants font état d'avis majoritairement défavorables (58%).

L'idée d'un élargissement des possibilités de délégation de compétences intercommunales promue par le rapport Woerth n'est pas du goût d'une grande majorité d'intercommunalités : seulement 11% estiment que "cela apporterait une souplesse appréciable pour quelques compétences". 

Le scénario, évoqué dans le rapport de l'ex-ministre du Budget, de la création d'un statut juridique unique pour l’intercommunalité à fiscalité propre - un statut aligné peu ou prou sur celui des communautés de communes et visant à remplacer les quatre statuts existants aujourd'hui – ne rencontre pas de succès non plus. 93% y sont défavorables, principalement parce que "ce projet n’est pas urgent ou constituerait une perte de temps".

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis