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Environnement - Forum mondial de l'eau : les Français inquiets des effets de la pollution de l'eau sur leur santé

Une grande majorité de Français placent la pollution de l'eau en tête des priorités environnementales et s'inquiètent des menaces sur la santé et les écosystèmes des eaux usées non traitées, selon un sondage* réalisé pour le compte du Siaap (Service public d'assainissement de l'agglomération parisienne) et publié ce 12 mars à l'ouverture du Forum mondial de l'Eau (FME) qui se tient à Marseille jusqu'au 17 mars. 95% des personnes interrogées sur les priorités d'actions environnementales ont placé la pollution de l'eau devant celle de l'air (94%). Près de neuf personnes sur dix (88%) jugent l'extinction d'espèces animales et végétales et l'épuisement des énergies fossiles (87%) prioritaires. Et le réchauffement climatique demeure un sujet de préoccupation pour 84%.
Une grande majorité des Français (96%) considère que les eaux usées, si elles ne sont pas traitées, entraîneront des maladies chez les individus et des menaces pour la survie des écosystèmes. L'eau est par ailleurs considérée comme une ressource limitée pour plus de huit personnes sur dix (82%), alors que 14% pensent le contraire et estiment qu'il y en aura toujours suffisamment pour toute la planète. Et si plus de neuf Français sur dix (91%) indiquent faire attention à la quantité d'eau qu'ils utilisent chez eux, plus de huit sur dix estiment que pour faciliter l'assainissement des eaux usées, il faudrait surtout agir sur les usages industriels et agricoles de l'eau. Le droit à l'accès à l'eau potable a été reconnu à l'échelle de la planète par l'ONU en juillet 2010, mais 65% des Français l'ignorent toujours. Ils sont cependant plus de sept sur dix (74%) à considérer que la France a un rôle à jouer dans la promotion du droit à l'eau potable et à l'assainissement au niveau mondial.

Deux milliards de personnes privées d'eau potable

Plus de deux milliards de personnes sont en effet toujours dépourvues de cette ressource essentielle et la question de l'accès universel à l'eau potable et à des sanitaires corrects est au centre des réflexions du FME qui réunit quelque 20.000 participants dans la cité phocéenne. "Les défis sont immenses et les faits tenaces", a reconnu le Premier ministre François Fillon dans son discours d'ouverture devant un parterre de chefs d'Etat et de gouvernement, de ministres et de représentants de l'industrie et de la société civile de 140 pays. Il a invité à "réfléchir aux moyens de rendre cet accès universel en 2030" car "les morts déplorés chaque année à cause des risques sanitaires que cela entraîne se comptent en millions", a rappelé le chef du gouvernement. "C'est une situation qui n'est pas acceptable", a-t-il dit, appelant "la communauté internationale à se mobiliser pour y remédier".
Les précédents forums tenus à l'initiative du Conseil mondial de l'eau (ONG, gouvernements et organisations multilatérales) ont essentiellement établi des diagnostics sur l'accès à l'eau dans le monde. Celui de Marseille s'intitule "Le temps des solutions". Selon le 4e rapport de l'ONU sur l'eau dans le monde, présenté ce 12 mars au forum, l'accroissement de la population - qui passera à 9 milliards en 2050 - et le réchauffement climatique aggravant inondations et sécheresses menacent ces ressources si rien n'est fait.

La France partisane d'une gouvernance mondiale de l'eau

La question de la bonne gouvernance a été désignée comme l'une des priorités des engagements qui devraient être pris à l'issue de l'édition 2012 du rendez-vous mondial sur l'eau, trois ans après celui d'Istanbul. François Fillon s'est fait une nouvelle fois l'avocat d'une gouvernance mondiale de l'eau inscrite dans celle de l'environnement à la même échelle. "Il n'y a aucune raison qu'il y ait une organisation mondiale du commerce et pas une telle organisation de l'environnement", a-t-il martelé.
Les ONG écologistes et de solidarité avec les pays pauvres, qui se réuniront en forum alternatif du 15 au 17 mars à Marseille, se sont mobilisées contre les tendances de "marchandisation de l'eau", notamment par les grands groupes industriels. Dans une déclaration qui sera remise jeudi 15 mars aux responsables du forum officiel, ces militants plaident pour la création d'un tribunal international de l'eau à l'image du TPI de La Haye compétent pour les crimes contre l'humanité. L'Afrique reste le continent le plus mal loti en matière d'accès à l'eau potable (40% de la population en manquent toujours) selon l'ONU. Et les conséquences du réchauffement climatique ne feront qu'y accentuer la pression sur les ressources naturelles, rappellent les experts. "Le changement climatique est une menace réelle et croissante. Sans une bonne politique de prévention et d'adaptation, des centaines de millions de personnes risquent la faim, les maladies, les pénuries d'énergie et la pauvreté", selon l'ONU. Pour répondre à la hausse de 70% de la demande alimentaire afin de nourrir les 9 milliards d'humains attendus en 2050, la consommation mondiale d'eau pour l'agriculture devrait bondir de 20%, estime l'ONU.

Anne Lenormand avec AFP

* Sondage réalisé par l'institut Harris du 20 au 22 février auprès d'un échantillon de 1.226 personnes représentatives de la population âgée de 18 ans et plus selon la méthode des quotas.

Les temps forts politiques du Forum mondial de l'eau

- La conférence ministérielle du 13 mars : elle regroupe 120 délégations ministérielles qui travaillent sur l'adoption de la déclaration ministérielle. Elle est précédée par 12 tables rondes de haut niveau portant sur l’adaptation au changement climatique, le financement des infrastructures, l'économie verte et la croissance verte, la mise en oeuvre d’un droit à l'eau et à l'assainissement, l'avenir du dessalement de l'eau, la promotion de la coopération sur les eaux transfrontalières, la gestion des eaux usées, l'eau et la santé, l'eau pour le développement en Afrique, la sécurité de l'eau et le développement durable, l'eau, l'énergie, l'alimentation, et l’eau et les catastrophes.
- La conférence parlementaire les 15 et 16 mars : cette plateforme d'échange et de coopération entre les législateurs des différentes régions du monde, qui associe des experts internationaux spécialistes des grandes questions liées au développement et à la gestion de l’eau entend répondre aux trois directions stratégiques du forum : "assurer le bien-être de tous", "contribuer au développement économique" et "préserver la Planète bleue". Le programme est composé de deux parties : "le temps des solutions", jeudi 15 mars de 8 h 30 à 13 h 00 et "le jour J des engagements pour relever les défis mondiaux de l’eau", vendredi 16 mars de 8 h 30 à 13 h 00, avec un accent particulier sur les contributions et le rôle de l'Europe.
- La conférence des autorités locales et régionales les 14 et 15 mars : organisée par le Conseil mondial de l’eau et Cités et gouvernements locaux unis (CGLU), cette troisième conférence internationale portera le premier jour sur les progrès accomplis d’Istanbul à Marseille, la gouvernance des services d’eau et d’assainissement, la gestion de l’eau dans les mégalopoles et la perspective d'une meilleure gouvernance régionale de l’eau. Le second jour sera centré sur la culture de l’eau dans la gouvernance locale, la coopération et la solidarité internationale, les solutions pour l’eau des autorités locales et régionales. Enfin son assemblée générale portera sur le thème "eau et développement durable".
- 6 "trialogues régionaux", axés sur des objectifs-cibles sélectionnés par les régions, envisageront la manière dont les différents niveaux décisionnaires peuvent collaborer pour atteindre ces objectifs : trialogue Asie-Pacifique sur la sécurité de l’eau domestique en zone urbaine (14 mars, 11 h 00) ; trialogue Méditerranée sur la gouvernance de l’eau (14 mars, 11 h 00) ; trialogue Amériques sur "l’eau pour un développement économique, social et durable des Amériques" (14 mars, 14 h 30) ; trialogue arabe sur l'eau et l'énergie (14 mars, 14 h 30) ; trialogue Afrique sur la "coopération transfrontalière : mécanismes juridiques internationaux" (15 mars, 8 h 30) ; trialogue Europe "action européenne pour l’accès pour tous à l’eau et à l’assainissement : encourager les mécanismes de solidarité" (15 mars à 11 h 00).

A.L.