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Flambée des prix : les budgets des communes accusent le coup

À l'exception des régions, l'ensemble des collectivités locales devraient voir leurs marges de manœuvre se réduire en 2022, selon la note de conjoncture de la Banque postale sur les finances locales. En cause : l'inflation dont les effets se font particulièrement ressentir sur les budgets des communes. Leurs charges à caractère général devraient s'envoler de près de 15%.

À quelques semaines de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2023, le gouvernement ne pourra sans doute plus arguer de la "bonne santé" financière des collectivités locales constatée en 2021, pour repousser des demandes de soutien en leur faveur - comme il l'avait fait lors des débats de cet été sur la loi de finances rectificative. Car la situation financière du secteur public local connaît cette année une "dégradation", qui, malgré son caractère "modéré" - selon le qualificatif choisi par le directeur des études de la Banque postale - n'en est pas moins réelle. Luc Alain Vervisch a présenté à la presse, ce 21 septembre au siège parisien de l'établissement bancaire, la dernière édition de sa traditionnelle note de conjoncture sur les finances locales. Un document qui dessine de manière précise le tableau des finances locales en 2022.

Il en ressort que l'embellie de 2021 a été de courte durée. Le secteur local est désormais aux prises avec un "effet ciseau" qui rappelle les pires moments du quinquennat de François Hollande. Les collectivités locales avaient alors dû encaisser le choc de la baisse des dotations, sans avoir eu le temps d'engranger le bénéfice des politiques visant à maîtriser leurs dépenses de fonctionnement.

Énergie : les lourdes factures des communes

Les collectivités locales ressentent en effet durement les effets de l'inflation. Globalement, leurs dépenses de fonctionnement grimperaient cette année de 4,9% - un taux d'évolution qui n'a pas été enregistré "depuis près de 15 ans" - pour atteindre 213,5 milliards d'euros. Dans le détail, les charges à caractère général (54,1 milliards d'euros) s'envoleraient de 11,6%, notamment sous l'effet de la hausse des prix de l'énergie et des matières premières. Les frais de personnel, qui représentent une dépense de 75,2 milliards d’euros, connaîtraient quant à eux une croissance de 4,1%, du fait des diverses revalorisations salariales (en particulier la hausse du point d'indice au 1er juillet).

Mais, à l'heure de la flambée des prix de l'énergie, toutes les collectivités locales ne sont pas logées à la même enseigne. En effet, les factures qu'elles consacrent à ce poste varient beaucoup d'une catégorie de collectivité à une autre. En 2021, les régions ne déboursaient en moyenne que 2 euros par habitant, mais la facture était 5 fois plus élevée pour les intercommunalités à fiscalité propre (environ 10 euros par habitant). Le maximum était atteint par les communes. Parce qu'elles gèrent de nombreux équipements et services, elles ont consacré l'an dernier 44 euros par habitant au poste énergie. Un montant moyen qui, il faut le préciser, masque des disparités. Davantage affectées par les "charges de centralité", les communes de 3.500 à 30.000 habitants ont dépensé en matière d'énergie en moyenne 48 euros par habitant, contre 38 euros pour les communes de plus de 100.000 habitants et 43 euros pour celles de moins de 500 habitants.

TVA : la bonne surprise de l'année

On ne s'étonnera donc pas que l'explosion de la facture énergétique puisse faire bondir les charges à caractère général des communes. La Banque postale s'attend à une hausse de près de 15% de ce poste, qui représente plus de 20 milliards d'euros et un quart des dépenses de fonctionnement des communes.

Le "filet de protection" prévu pour 2022 par la loi de finances rectificative votée début août devrait certes alléger le fardeau. Mais n'en bénéficieront que les collectivités ayant subi une perte d'épargne brute d'au moins 25%. Du fait notamment de cette règle, ce sont seulement un peu plus de 8.000 communes et environ 150 intercommunalités qui bénéficieraient d'un soutien estimé à 397 millions d’euros, selon les calculs de la Banque postale.

En période d'inflation maîtrisée, l'année 2022 aurait été considérée, côté recettes, comme un bon cru, avec une progression de 3,2% de celles-ci. Globalement, les recettes fiscales sont bien orientées, avec en particulier une hausse d'au moins 9% des fractions de TVA attribuées aux intercommunalités et aux départements. L'inflation n'a en effet pas que des effets négatifs, puisqu'elle dope la TVA. Selon Luc Alain Vervisch, il s'agit d'un "effet d'aubaine dont les collectivités ne sont pas conscientes".

Hausse de l'investissement en trompe l'oeil

La taxe foncière sur les propriétés bâties, qui bénéficie pour l'essentiel aux communes, augmenterait quant à elle de 5,9% en 2022. L'indexation des valeurs locatives sur l'inflation constatée sur la majeure partie de 2021 (+ 3,4%) a tiré le produit de la taxe à la hausse, permettant aux communes de peu recourir au levier fiscal. Sur un échantillon de plus de 1.400 communes représentant les deux-tiers des bases, seules 12% ont relevé cette année le taux de la taxe sur le foncier bâti. L'évolution des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) est en revanche moins favorable, puisque cette taxe due sur les transactions immobilières devrait "se stabiliser au global sur l’année 2022". La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) est pour sa part attendue en baisse d'un peu plus de 3%.

Au total, les finances des différentes collectivités présentent des états de santé singulièrement différents. Les régions ont des couleurs avec une épargne brute qui doit rebondir de 5%, tandis que les départements limitent la casse (leur épargne brute ne doit reculer que de 0,5%). Mais le bloc communal essuie un coup dur. Singulièrement les communes : leur épargne brute devrait reculer de 11,3%. Pour elles, le choc sera donc probablement supérieur à celui qu'elles avaient connu en 2020, du fait de la crise liée au Covid-19. Cette année-là, l'épargne brute communale s'était repliée de 8,5% (budgets principal et annexe consolidés).

Malgré un contexte plutôt défavorable, l'investissement poursuivrait cette année la reprise amorcée l'année dernière, avec une hausse similaire (proche de 7%). Même les communes augmenteraient leurs dépenses dans ce domaine. Mais l'essentiel de ces dépenses supplémentaires seraient absorbées par les augmentations des prix pratiqués par les prestataires.