Plan anti-terrorisme - FIPD : une circulaire détaille la répartition des 20 millions d'euros supplémentaires pour 2015
C'était une des annonces importantes du plan de lutte contre le terrorisme présenté par Manuel Valls, le 21 janvier, dans la foulée des attentats du début d'année : le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) va être abondé de 60 millions d'euros en trois ans pour financer des actions de prévention de la radicalisation. Une circulaire du 23 mars signée du secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance (SG-CIPD) détaille la répartition de l'abondement prévu pour 2015, soit 20 millions d'euros en plus des 53 millions d'euros initialement programmés cette année.
Trois priorités ont été arrêtées : 8,6 millions iront à la prévention de la radicalisation, 9 millions d'euros à la sécurisation des sites sensibles (vidéoprotection, moyens d'accès…) et, enfin, 2,4 millions d'euros seront consacrés à l'équipement des policiers municipaux.
Cette circulaire vient ainsi compléter la précédente circulaire du 31 décembre 2014 sur la répartition du FIPD pour 2015 qui, pour la première fois, faisait de la prévention de la radicalisation l'une de ses priorités, de façon à financer des actions mises en place dans le cadre du plan anti-djihad d'avril 2014.
Gilets pare-balles et postes radio
Concrètement, les 2,4 millions d'euros consacrés à l'équipement des policiers municipaux répondent à deux des engagements pris par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, le 26 janvier, auprès de l'Association des maires de France (AMF) et des syndicats de police municipale, à savoir l'achat de gilets pare-balles et de terminaux portatifs de radiocommunication. L'objectif est "d'améliorer les conditions de travail et de protection" des policiers, rappelle la circulaire, alors que les syndicats de policiers avaient manifesté leur inquiétude après l'assassinat d'une policière municipale de Montrouge (Hauts-de-Seine), Clarissa Jean-Philippe, le 8 janvier. Afin de répartir ces équipements, le SG-CIPD Pierre N'Gahane demande aux préfets de prendre "dans les meilleurs délais, l'attache des maires et des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale dotés de police municipale".
Lors de la réunion du 26 janvier, Bernard Cazeneuve avait promis l'achat de 8.000 gilets pare-balles financés pour moitié par l'Etat (4.000 revolvers Manhurin doivent également être mis gracieusement à disposition des policiers municipaux à la demande des maires). L'aide sera plafonnée à 250 euros par gilet et pourra venir subventionner les achats réalisés par les collectivités depuis le 1er décembre 2014, précise la circulaire. Les gardes champêtres sont également éligibles.
Concernant les terminaux portatifs, il s'agira d'étendre une expérimentation menée sur quatre sites pour améliorer l'interopérabilité des réseaux entre forces de sécurité et polices municipales. Les terminaux seront pris en charge par l'Etat à hauteur de 30% dans la limite de 420 euros, le but étant de permettre aux policiers municipaux de communiquer avec les forces de sécurité via les réseaux INPT ou Rubis du ministère de l'Intérieur. Une instruction spécifique sera adressée aux préfets sur cet aspect.
Prévention de la radicalisation
Sur les 8,6 millions d'euros consacrés à la prévention de la radicalisation, 2,6 millions d'euros seront centralisés et soutiendront des partenariats nationaux, des formations, des campagnes de communication et de "contre-discours". La circulaire rappelle par ailleurs qu'un appel à projets a été lancé le 13 janvier 2015 pour sélectionner une équipe mobile d'appui psychologique qui pourra être sollicitée par les cellules de suivi des préfets. D'après le cahier des charges de l'appel à projets, cette équipe devra être en mesure de traiter 150 situations courant 2015. Elle sera opérationnelle dès le mois d'avril.
Les six millions d'euros restants seront déconcentrés et feront l'objet d'appels à projets départementaux. Les dotations départementales seront calculées en fonction de la répartition des crédits du FIPD pour 2015 (hors vidéo) mais aussi du nombre de signalements au numéro vert du Centre national d'assistance et de prévention de la radicalisation. Les crédits serviront à soutenir les actions engagées par les cellules départementales de suivi des préfets en matière d'accompagnement des familles. Le SG-CIPD entend "favoriser des actions innovantes qui mobilisent différents partenaires au niveau territorial". Quatre types d'actions seront financées en priorité :
- la mise en place de référents de parcours (travailleurs sociaux, éducateurs) ;
- la mobilisation de postes de psychologues et psychiatres formés à la radicalisation ;
- des actions éducatives citoyennes, d'insertion sociale et professionnelle, notamment des chantiers éducatifs et d'insertions, des séjours éducatifs, des chantiers humanitaires, etc. ;
- des actions de soutien à la parentalité, notamment des groupes de parole.
Sécurisation des sites sensibles
La sécurisation des sites sensibles (lieux de culte, écoles confessionnelles, sièges d'institutions cultuelles…) mobilisera 9 millions d'euros au total, dont 6,5 pour des équipements de vidéosurveillance. Ces derniers seront subventionnés dans la limite de 80% "au regard du caractère prioritaire du projet et de la capacité financière du porteur de projet". "Les implantations envisagées par les maîtres d'ouvrage devront impérativement s'intégrer dans un ensemble d'actions visant à protéger le site sensible d'actes terroristes", précise la circulaire. Les dossiers doivent suivre le circuit habituel pour les projets de vidéoprotection et être transmis à la délégation aux coopérations de sécurité.
Les autres mesures de sécurisation des sites sensibles viseront à renforcer la sécurité de l'accès (portail, clôture, porte blindée, interphone…) ou l'intérieur des bâtiments. Là encore, le taux de subvention pourra aller jusqu'à 80% du coût du projet. Les dossiers sont à transmettre au SG-CIPD.
Les 20 millions de crédits supplémentaires du FIPD font partie des transferts prévus par le gouvernement pour financer les "mesures urgentes" du plan anti-terroriste de Manuel Valls, qui s'élèvent au total à 397 millions d'euros pour 2015. Ces mesures font l'objet d'un "décret d'avance" déjà validé par la commission des finances de l'Assemblée le 25 mars. Sur l'ensemble, 150 millions d'euros doivent servir à couvrir les frais du ministère de la Défense fortement mobilisé pour la surveillance des lieux sensibles à travers l'opération Sentinelle.