Finances des départements : ces vingt années qui ont changé la donne
En 20 ans, le profil financier des départements a beaucoup évolué, leur rôle croissant de collectivités responsables des solidarités étant financé de plus en plus par des parts d'impôts nationaux, dépourvus de levier fiscal. Une étude réalisée par la Banque postale et l'Assemblée des départements de France (ADF), dévoilée à l'occasion des Assises des départements de France, décrypte la mue que les départements ont ainsi connue, tout en s'attachant à montrer les effets particuliers de la crise du Covid-19 sur leurs finances.
La place prépondérante que l'action sociale a prise dans leurs budgets de fonctionnement est un des événements majeurs de ces vingt dernières années pour les départements. Déjà forte en 2002 (47%), cette part a grimpé à 58% en 2004 avec le transfert de l'allocation du revenu minimum d'insertion (RMI), devenu revenu de solidarité active (RSA) en 2009. Depuis 2019, elle s'établit à "environ 62%". Les principaux autres postes de dépenses en matière de fonctionnement sont demeurées "relativement stables" au cours des deux dernières décennies : il s'agit des dépenses de personnel (autour de 20%), des contributions aux services départementaux d'incendie et de secours (autour de 5%) et des dépenses de fonctionnement dédiées aux collèges (même proportion).
Du côté de leurs recettes de fonctionnement, les départements ont changé de modèle. Légèrement majoritaire il y a vingt ans, la part des impôts directs est passée à moins de 8% en 2021. L'exécutif actuel a donné le coup de grâce avec le transfert au début de cette année de la part départementale de taxe sur le foncier bâti aux communes. À la place de leurs taxes directes, les départements ont obtenu des parts d'impôts nationaux (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, taxe spéciale sur les conventions d’assurance, part supplémentaire de droits de mutation à titre onéreux et TVA). Au total, les impôts indirects représentent actuellement les deux tiers des recettes de fonctionnement des départements (contre 15% en 2001). Dépendantes d'une fiscalité évoluant avec la conjoncture économique et sans pouvoir de taux, les collectivités départementales pourraient connaître des difficultés "certaines années, essentiellement en période de récession", pointe l'étude. Les dotations ne servant plus guère d'amortisseur, puisque leur part dans les recettes de fonctionnement a quasiment été réduite de moitié (de 30% en 2003 à 18% en 2021).
Bonne résistance en 2020
L'ensemble de ces évolutions ne sont pas étrangères à la chute que l'investissement des départements a connue globalement sur la période. De 30% en 2001, sa part dans les dépenses totales est passée à 15% en 2020. À noter, la tendance baissière de l'investissement a été interrompue en 2018, avec depuis cette date une reprise s'opérant sans dégradation de l'encours du délai de désendettement (qui équivaudrait en 2021 à trois ans et demi d'épargne brute).
La crise sanitaire a eu des conséquences moins brutales sur les budgets départementaux que les élus départementaux et les experts ne le craignaient initialement. La hausse d'un peu plus de 7% en 2020 des dépenses engagées pour le RSA "a été l’impact majeur" de cette crise sur les finances départementales. Globalement, les recettes de fonctionnement des départements sont restées dans le vert (+ 0,5% l'an dernier). Le recul des DMTO perçus par les départements a en effet été limité à 1% sur le plan national. En octobre dernier, les départements voyaient s'éloigner la crise, avec la conjonction de deux phénomènes : le retour du nombre de bénéficiaires du RSA à son niveau d'avant la crise liée au Covid-19 et un boom des DMTO (estimé à + 20% pour 2021). Mais cette embellie ne sera peut-être pas durable. "Un moindre dynamisme du marché de l’immobilier dans les mois qui viennent ne peut pas être écarté", préviennent la Banque postale et l'ADF.