Fichier national du permis de chasser : le décret est paru avec un coup de retard conséquent
La loi de 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité (OFB) devait faire émerger un fichier national du permis de chasser cogéré par l’OFB et la Fédération nationale des chasseurs (FNC), pour faciliter les contrôles en matière de police de la chasse et identifier les détenteurs d’un port d’arme validé. Rappelé à l’ordre par le Conseil d’Etat, le gouvernement (démissionnaire) vient enfin, ce 5 septembre, soit plus de cinq ans après la création de l’OFB, de publier le décret nécessaire pour préciser les modalités de constitution et de mise à jour de ce fichier national du permis de chasser, et en définir les conditions de consultation par les agents de l’OFB et de la FNC.
Alors que l’ouverture générale de la chasse n’est plus qu’une question de jours, un décret, paru ce 5 septembre, met en œuvre le fichier national du permis de chasser mentionné à l'article L.423-4 du code de l’environnement. Il s’agit d’un décret d’application attendu de la loi n°2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité (OFB), pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (l’avis de la CNIL a été rendu le 18 juillet 2024). Sa publication était initialement prévue pour février 2020. Le retard se chiffre donc en années. L’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) s’en est d’ailleurs agacée au point de formuler fin 2021 un recours en excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat.
Contraint par la décision de la Haute juridiction (n°459252 en date du 13 novembre 2023) enjoignant à Elisabeth Borne, alors Première ministre, de prendre ce décret dans un délai de six mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, le gouvernement s’y est finalement plié, plus de cinq ans après la promulgation de la loi du 24 juillet 2019. L'élaboration du décret se serait heurtée, selon ce dernier, à certaines difficultés d'ordre juridique et technique, du fait notamment des interconnexions devant être réalisées entre le fichier national mentionné à l'article L.423-4 du code de l'environnement et les fichiers existants consacrés au contrôle des armes, tels que le fichier national des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA) et le système d'information sur les armes (SIA). Des difficultés "pas de nature à justifier une abstention qui s'est prolongée au-delà d'un délai raisonnable", a tranché le Conseil d’Etat.
Données croisées de l’OFB et de la FNC
La loi de 2019 portant création de l’OFB a été l'occasion de prendre des mesures importantes pour la sécurité à la chasse : règles pour la chasse en battue (gilet fluorescent, panneaux d’information), formation décennale obligatoire à la sécurité, pouvoirs de l’OFB renforcés et création d’un fichier national du permis de chasser. En réalité, cet outil - confié à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) puis, après 2005, à la Fédération national des chasseurs (FNC) - était déjà prévu par l’article L.423-4 du code de l’environnement. Toutefois, le décret d’application n’a jamais été pris, et concrètement, l’ONCFS ne disposait pas des données sur les validations annuelles du permis de chasser. Il est prévu que le fichier national du permis de chasser soit à présent cogéré par l’OFB et la FNC à partir des données croisées du fichier central des titres permanents du permis de chasser (FCTP) de l’OFB et du fichier central des validations et autorisations de chasser (FCVA) de la FNC.
Pour rappel, le droit de chasser est conditionné à la détention de trois éléments : un titre permanent du permis de chasser (obtenu par la réussite d'un examen et délivré à vie), la validation du permis de chasser (demande administrative et cotisation à renouveler chaque année auprès de la fédération départementale compétente) et la souscription d'une assurance chasse. Le fichier national vise donc dans un but de contrôle administratif à centraliser les données relatives aux détenteurs d'un permis de chasser, d'une validation du permis de chasser ou d'une autorisation de chasser. Il permet par ailleurs la consultation des refus de délivrance du permis de chasser et de retrait de la validation du permis de chasser, des retraits et des suspensions du permis de chasser et de l'autorisation de chasser, ainsi que des résiliations des contrats d'assurance chasse. Enfin, il facilite la réalisation d’un suivi statistique.
Modalités de consultation et de conservation
Les agents de l’OFB et de la FNC "individuellement désignés et habilités" - respectivement par le directeur général ou par le président - pourront avoir accès au fichier. Le décret liste également toute une batterie de destinataires (inspecteurs de l'environnement affectés à l’OFB et dans les parcs nationaux ; agents de développement des fédérations départementales des chasseurs ; agents des réserves naturelles et de l'Office national des forêts (ONF) ; police et gendarmerie nationale, etc.) pour lesquels la consultation du fichier se fera sur "requête individuelle".
Le décret prévoit la conservation des données relatives au titulaire de l'autorisation de chasser, à ses accompagnateurs et au titulaire de la validation du permis de chasser pendant une durée de six années au terme de la validation ou de l'autorisation - soit sept ans au total -, ce qui correspond au délai de prescription administrative ou judiciaire. Il est en outre précisé que les données relatives aux événements affectant le permis de chasser, l'autorisation de chasser ou la validation du permis de chasser "sont conservées jusqu'à la fin de la mesure administrative ou de la mesure judiciaire affectant le permis de chasser, l'autorisation de chasser ou la validation du permis de chasser". Elles ne seront conservées au-delà qu'en cas de contentieux, en archivage intermédiaire et jusqu'à expiration des voies de recours. Notons que le texte prévoit la consultation automatique, "aux seules fins de vérifier si l'identité de la personne concernée n'y est pas enregistrée", du fichier national des interdits d'acquisition et de détention d’armes (FINIADA). Certains destinataires n’y auront pas accès (inspecteurs de l’environnement ; agents de développement des fédérations départementales des chasseurs ; agents des réserves naturelles et de l’ONF).
Référence : décret n°2024-889 du 4 septembre 2024 relatif au fichier national du permis de chasser, JO du 5 septembre 2024, texte n°10. |